Question de M. SALMON Daniel (Ille-et-Vilaine - GEST) publiée le 15/04/2021

Question posée en séance publique le 14/04/2021

M. le président. La parole est à M. Daniel Salmon, pour le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)

M. Daniel Salmon. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation.

Face à l'épisode de gel d'une ampleur sans précédent qui touche depuis une semaine une large partie de la France, je souhaiterais tout d'abord adresser toute ma solidarité aux paysannes et aux paysans qui ont perdu, en une nuit, les fruits d'une année de travail. Des vignobles du Chablis aux arboriculteurs de la Drôme, en passant par les semis de betteraves de la Seine-et-Marne, c'est la désolation.

Cette catastrophe ne peut être prise comme un phénomène isolé. Elle est bien évidemment liée au dérèglement climatique. Elle fait suite à de nombreux précédents, et ce type d'aléa se reproduira à un rythme difficilement soutenable pour la pérennité du régime actuel d'indemnisation.

Le déclenchement de la procédure de calamité agricole et son déplafonnement étaient bien sûr indispensables, mais ce système n'est plus adapté pour faire face à ces épisodes climatiques extrêmes à répétition : il faut attendre de longs mois pour être indemnisé, ce qui ne permet pas de maintenir à flot des trésoreries déjà exsangues.

Les critères d'éligibilité pour accéder à ce fonds sont drastiques, avec un seuil qui évince un grand nombre de petites exploitations, sans compter toutes celles qui en sont totalement exclues.

Les viticulteurs doivent recourir à des assurances privées, inadaptées et coûteuses. Il faut maintenant engager des mesures structurantes à même de couvrir tous les risques climatiques pour toutes les cultures. L'excellent rapport sénatorial de Nicole Bonnefoy constitue une bonne base de réflexion en ce sens.

Monsieur le ministre, votre prédécesseur Didier Guillaume s'était engagé, voilà plus de deux ans, à remettre à plat le régime de calamité agricole. Les travaux ont-ils avancé depuis lors ? (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)


Réponse du Ministère de l'agriculture et de l'alimentation publiée le 15/04/2021

Réponse apportée en séance publique le 14/04/2021

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation.

M. Julien Denormandie, ministre de l'agriculture et de l'alimentation. Monsieur le sénateur Salmon, l'épisode climatique que nous venons de vivre est absolument exceptionnel et même extraordinaire. En l'espace de quelques jours, nous avons tout d'abord atteint des records de chaleur, puis connu des records de froid, et cela parfois dans les mêmes zones.

Je me trouvais ce matin auprès des équipes de Météo-France. Elles témoignaient du caractère à la fois singulier, exceptionnel et extrêmement violent de cet épisode, qui a touché près de dix régions sur les treize du territoire métropolitain.

Comme je l'ai souligné voilà quelques jours, cet épisode exceptionnel a donné lieu à la plus grande catastrophe agronomique du début du XXIe siècle.

Songez, mesdames, messieurs les sénateurs, que des centaines de milliers d'hectares ont été touchées. Il y a quelques jours, avec le Premier ministre et Olivier Dussopt, j'étais dans la Drôme et en Ardèche, où des champs entiers d'arbres fruitiers – je pense aux beaux abricots et aux belles cerises que produisent ces territoires – ont littéralement brûlé en l'espace de quelques nuits, en dépit de la véritable guerre menée par nos agriculteurs pour combattre les vagues de froid.

Le problème du gel, c'est qu'il est invisible. L'émotion de notre société est certes forte, mais elle l'aurait été encore davantage s'il s'était agi d'un incendie ravageant des centaines de milliers d'hectares.

Or la réalité est là : la détresse de nos agricultrices et de nos agriculteurs est totale. Parfois, c'est le revenu de toute cette saison, notamment pour les arbres fruitiers, qui ne viendra pas ; parfois, en particulier pour les viticulteurs, c'est celui de l'année prochaine.

Nous devons apporter une réponse – je la détaillerai par la suite – à la hauteur de l'événement exceptionnel que nous venons de vivre, au travers des mesures à la fois de court terme et de long terme. Vous avez mille fois raison, monsieur Salmon, le système de l'assurance n'est plus gréé pour faire face à de tels épisodes. (M. François Patriat applaudit.)

M. le président. La parole est à M. Daniel Salmon, pour la réplique.

M. Daniel Salmon. Je vous remercie de votre réponse, monsieur le ministre.

Cet épisode nous rappelle aussi combien notre modèle agricole hyperspécialisé, trop souvent en monoculture, est très fragile face au changement climatique.

Les politiques publiques doivent soutenir et financer des modèles agricoles plus résilients ; c'est une priorité. Elles doivent accompagner l'adaptation des systèmes de production et la transition des fermes vers des systèmes agroécologiques. La future PAC, la politique agricole commune, et la loi Climat et résilience sont des occasions uniques de répondre à ces enjeux. Il faudra être à la hauteur.

Réagir dans l'instant est intéressant et même essentiel, mais il faut aller plus loin et voir plus loin. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST. – Mme Émilienne Poumirol applaudit également.)

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