Question de M. GILLÉ Hervé (Gironde - SER) publiée le 29/04/2021

M. Hervé Gillé attire l'attention de M. le ministre des solidarités et de la santé sur la difficulté d'application concrète de l'article 84 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2021 qui encadre et limite dans le temps les pratiques d'isolement et de contention mécanique de personnes hospitalisées sans leur consentement.
La communauté médicale rappelle que le recours à l'isolement et à la contention mécanique est un procédé exceptionnel, et bien que les professionnels soient évidemment mobilisés pour une prise en charge des patients dans la dignité, cet usage s'avère parfois nécessaire pour les patients difficiles voire dangereux. Le recours à l'isolement a vocation pour des patients en situation de violence et de crise à favoriser l'apaisement en limitant les stimulations sans recourir systématiquement à des traitements médicamenteux lourds qui peuvent apparaître comme un rempart à l'isolement, mais se révèlent contre-productifs car ne permettant pas d'élaboration psychique ni de travail d'adhésion aux soins.
Concrètement l'application stricte de cet article occasionne une surcharge administrative pour le corps médical par la multiplication des formulaires exigés pour chaque période de contention ou d'isolement (toutes les six heures pour la contention, toutes les 12 heures pour l'isolement) et l'obligation de saisine du juge. Cette surcharge administrative concerne tous les personnels, médecins, infirmiers, cadres de santé, secrétaires. Leur temps n'est plus consacré au travail clinique auprès du patient dans des services déjà en manque importants d'effectifs, alors que c'est cet encadrement humain qui permet de réduire l'isolement et la contention. De plus, la nécessité de réveiller le patient qui a souvent du mal à s'apaiser induit en général une recrudescence de l'agitation et de l'agressivité pour lesquels il est à l'isolement au risque de le prolonger. Enfin ce recours régulier au juge comporte également le risque de compromettre le secret médical par la transmission de documents mentionnant des éléments de diagnostic du patient.
Depuis des années, les professionnels de santé militent pour un contrôle judiciaire des mesures de soins sous contraintes, mais le fond du besoin de contrôle judiciaire n'a pas été évalué dans sa mise en application pratique avant la rédaction de cet article. Cette modification de la loi ignore également le manque de moyens de la justice et traduit finalement une méconnaissance du terrain, de certaines situations particulières et un manque de concertation auprès des organisations de représentation.
Les professionnels de santé du secteur psychiatrique travaillent dans des situations de grande précarité. La dégradation des conditions de travail a entraîné une nouvelle vague de départs et pour la première fois les postes vacants ne trouvent pas candidats. Les moyens de satisfaire ces besoins légaux ne pourront se faire sans professionnels de santé présents et opérationnels. La diminution des effectifs se fait évidemment au détriment des patients et des droits des personnes hospitalisées.
Dans ce contexte de crise sanitaire dans lequel la prise en charge de la santé mentale s'est révélée prioritaire, la précarité des services de psychiatrie déjà constatée depuis plusieurs années devient une urgence.
En conséquence de quoi il lui demande quels sont les moyens envisagés pour répondre aux difficultés rencontrées à l'application de l'article 84 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2021 et quels aménagements pourraient y être apportés. Il l'interroge également sur les perspectives possibles d'une loi globale concernant la psychiatrie en tenant compte de l'évolution des pratiques, des besoins et attentes des patients et de l'amélioration nécessaire des conditions de travail des professionnels de la santé mentale, à la mesure des enjeux éthiques de la société.

- page 2778

Transmise au Ministère de la santé et de la prévention


La question est caduque

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