Question de Mme IMBERT Corinne (Charente-Maritime - Les Républicains-R) publiée le 20/05/2021

Question posée en séance publique le 19/05/2021

M. le président. La parole est à Mme Corinne Imbert, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Corinne Imbert. Ma question, à laquelle j'associe notre collègue Catherine Deroche, s'adresse à M. le ministre des solidarités et de la santé.

En décembre 2020, un médicament innovant, le Trodelvy, est devenu accessible en France pour les femmes atteintes d'un cancer du sein « triple négatif » métastatique. Ce médicament a obtenu une autorisation temporaire d'utilisation (ATU) nominative : c'était une excellente nouvelle pour les patientes.

Mais, en février 2021, une production insuffisante prive plusieurs femmes de ce traitement innovant. L'autorisation temporaire d'utilisation nominative est retirée : c'est l'incompréhension.

Nous sommes en mai, toujours plongés dans une situation de crise sanitaire : les diagnostics sont retardés, les opérations repoussées…

Monsieur le ministre, où en est la production de ce médicament tant attendu par plusieurs milliers de femmes ?

L'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) s'est-elle assurée, avant de délivrer l'autorisation temporaire d'utilisation nominative, que le laboratoire était en mesure de produire en quantité suffisante ce médicament ?

Selon vos informations, ce laboratoire fait-il un choix délibéré en ne concentrant pas ses efforts sur la production de ce médicament en quantité suffisante ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)


Réponse du Ministère des solidarités et de la santé publiée le 20/05/2021

Réponse apportée en séance publique le 19/05/2021

M. le président. La parole est à M. le ministre des solidarités et de la santé.

M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé. Je vous remercie d'avoir posé cette question très importante, madame la sénatrice Corinne Imbert. Vous parlez du cancer du sein « triple négatif », celui qui ne présente pas les marqueurs hormonaux classiques. En France, il représente 15 % des cas de cancers du sein et touche 9 000 femmes chaque année.

Ce cancer était en déshérence sur le plan thérapeutique, mais le Trodelvy, nouveau traitement complexe et très innovant, offre beaucoup d'espoir aux patientes ; la communauté scientifique est unanime sur la question.

Ce traitement a été mis au point par une petite société américaine, depuis rachetée par le grand laboratoire Gilead – il avait déjà fait l'acquisition de start-up et de produits médicamenteux.

Le coût du médicament n'est pas en cause, madame la sénatrice. Le problème, c'est que Gilead, après le rachat du médicament, s'est trouvé chargé de le produire et de fournir ainsi un marché immense. Or la logique de production est très complexe, il faut au moins une année avant de fonctionner à plein.

Ce n'est qu'après avoir déposé une demande d'autorisation européenne de mise sur le marché, en mars 2021, que le fabricant a lancé la production. C'était il y a quelques semaines…

Je suis d'accord, madame la sénatrice : nous ne disposons pas d'assez de traitements par rapport au nombre de patientes à traiter – une soixantaine de femmes uniquement ont bénéficié du médicament à date.

Mais je vous ferais observer que seules les patientes françaises se sont vu administrer ce traitement en Europe. Aucun autre pays n'a été capable de l'acquérir, faute de capacités de production suffisantes. La France a été le seul pays d'Europe à commander de nouveau le médicament, pour augmenter dès le mois de juin le nombre de traitements offerts.

Le groupe Gilead s'est engagé à fournir toutes les quantités suffisantes lors de la délivrance de l'autorisation européenne de mise sur le marché, attendue en décembre 2021. D'ici là, nous ferons le maximum pour accroître le stock de Trodelvy.

J'insiste : nous sommes les seuls en Europe à bénéficier du médicament. Ce n'est pas suffisant, mais c'est un début. Nous voulons soigner les Françaises qui attendent ce traitement avec une impatience toute légitime, croyez en notre détermination !

M. le président. La parole est à Mme Corinne Imbert, pour la réplique.

Mme Corinne Imbert. Je vous remercie de votre réponse, monsieur le ministre. Je ne doute pas de votre sincérité, mais je me permets toutefois d'insister sur l'urgence.

Même si je me réjouis que la France soit le seul pays européen à bénéficier de ce traitement, vous imaginez bien le désespoir des femmes concernées, après avoir conçu de grands espoirs : cette attente est insupportable ! Il est essentiel d'acquérir ce médicament en quantité suffisante pour pouvoir les traiter enfin.

Cela renvoie clairement à la question de l'équité de l'accès aux traitements innovants. Je demande donc au Gouvernement de négocier l'acquisition du traitement, d'imposer une autorisation temporaire d'utilisation nominative et de continuer à lutter contre les ruptures de stocks de médicaments d'intérêt thérapeutique majeur. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

- page 4006

Page mise à jour le