Question de M. KANNER Patrick (Nord - SER) publiée le 03/06/2021

Question posée en séance publique le 02/06/2021

M. le président. La parole est à M. Patrick Kanner, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. Patrick Kanner. Monsieur le Premier ministre, après votre réponse à la question précédente, je tiens à saluer votre sens du dialogue.

Je ne doute pas un seul instant que, ni de près ni de loin, ni philosophiquement ni politiquement, vous ayez la moindre sympathie pour le Front national.

Toutefois, au lendemain d'élections législatives partielles, à quelques semaines aussi de deux rendez-vous électoraux majeurs, force est de constater que l'extrême droite progresse dans notre pays. Dans les intentions de vote, dans les médias, mais également dans les esprits. Aujourd'hui, l'hypothèse que, pour une troisième fois, la famille Le Pen soit présente au second tour d'une élection présidentielle devient une évidence.

Mme Jacqueline Eustache-Brinio. Grâce à qui ?

M. Patrick Kanner. Et encore, ce n'est pas le scénario le plus pessimiste…

Vous n'êtes pas les seuls responsables de cette évolution politique.

Mme Sophie Primas. François Mitterrand !

M. Patrick Kanner. Mais votre majorité présidentielle porte depuis quatre ans le destin du pays. La sombre perspective que je viens d'évoquer est-elle pour vous une fatalité ou, au contraire, pensez-vous utiliser les dix prochains mois pour nous éviter ce naufrage ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER. – Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)


Réponse du Premier ministre publiée le 03/06/2021

Réponse apportée en séance publique le 02/06/2021

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Jean Castex, Premier ministre. Je ferai plus court, monsieur le président Kanner…

Mesdames, messieurs les sénateurs, je l'ai déjà indiqué à plusieurs reprises : en politique, il faut se déterminer par rapport à soi-même et par rapport à ce qu'on considère être l'intérêt général du pays. (M. Bruno Sido applaudit.)

La meilleure façon d'éviter que des idées autres que celles que vous représentez ne parviennent au pouvoir, c'est, premièrement, n'avoir pour seule boussole que les valeurs de la République, de la démocratie et de l'État de droit. Elles sont chevillées au corps de l'action du Gouvernement et du Président de la République.

Deuxièmement, c'est de mener une politique au service de nos concitoyens, au service du redressement économique, au service de la lutte contre la crise sanitaire, au service de la réduction des inégalités, y compris territoriales, au service d'une lutte sérieuse, opérationnelle et non démagogique contre l'insécurité. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)

Voyez-vous, mesdames, messieurs les sénateurs, monsieur le président Kanner, c'est tout à fait ce que mon gouvernement s'emploie à faire ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – M. Pierre Louault applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Patrick Kanner, pour la réplique.

M. Patrick Kanner. En tout cas, monsieur le Premier ministre, les Français ne l'entendent pas ainsi. Vous me répondez « mesures », vous nous répondez « programme de gouvernement » : de notre point de vue, je vous l'accorde, c'est peut-être, effectivement, la meilleure façon de mener la bataille sur le terrain ; pour autant, permettez-moi de m'inquiéter de votre stratégie.

Vous avez choisi votre adversaire et vous jouez une partition dangereuse, qui peut s'avérer tragique pour notre pays. En faisant exploser le paysage démocratique, en promouvant l'ambiguïté du « en même temps », en espérant la disparition de la gauche et, maintenant, de la droite, en méprisant les corps intermédiaires, vous avez créé un champ de ruines et vous ne tenez pas compte des avis du Parlement, en particulier de celui de la Haute Assemblée.

À cela vous ajoutez du cynisme, monsieur le Premier ministre, vous qui avez été le premier acteur du vaudeville politique que nous vivons actuellement en région PACA, dans un pitoyable tripatouillage politicien.

Mme Patricia Schillinger. Oh là là !

M. Patrick Kanner. Le résultat, malheureusement, on le connaît, on le voit dans les sondages. Vous courez de manière désordonnée après la thématique sécuritaire, et vous avez également sous-estimé la colère sociale de nos concitoyens, que l'exercice du grand débat n'a pas suffi, malheureusement, à calmer.

Aujourd'hui, le danger est à nos portes, l'extrême droite, comme dans d'autres pays européens, peut prendre le pouvoir sans violence. Dans moins d'un an, le deuxième tour de la présidentielle sera passé, et vous ne pourrez pas dire que vous ne saviez pas, monsieur le Premier ministre ! (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

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