Question de Mme LE HOUEROU Annie (Côtes-d'Armor - SER) publiée le 10/06/2021

Question posée en séance publique le 09/06/2021

M. le président. La parole est à Mme Annie Le Houerou, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

Mme Annie Le Houerou. L'Insee estime que, durant la période allant du premier confinement, en mars 2020, à mars 2021, ce sont 29 % des ménages qui auraient vu leur revenu mensuel baisser.

L'Observatoire des inégalités, dans son rapport de 2021, conclut que la crise sanitaire agit comme un accélérateur des inégalités, en précipitant dans la pauvreté des personnes qui en étaient proches.

Le Gouvernement met en œuvre sa réforme de l'assurance chômage dans un contexte où beaucoup de Français ont encore la tête sous l'eau. D'après l'étude d'impact menée par l'Unédic, 1,15 million de personnes, dont 345 000 jeunes, vont constater une baisse moyenne de 17 % de leur allocation.

Qui sont ceux qui pâtiront de cette réforme ? Les personnes qui alternent des contrats courts, de l'intérim et des périodes d'inactivité, non par choix, mais par impossibilité de trouver des emplois stables. Elle frappera de nouveau les jeunes, à qui vous ne proposez que des dispositifs précaires. Cette réforme va toucher les régions où le taux de chômage est le plus fort : près de 10 000 personnes dans mon département des Côtes-d'Armor ; plus de 52 000 personnes en Bretagne, et 200 000 personnes en Île-de-France, dont 45 000 jeunes.

Vous vantez une réforme porteuse de justice sociale, grâce au bonus-malus sur les contrats courts, mais vous oubliez de préciser que ce dispositif n'entrera en vigueur qu'à l'automne 2022, alors que les effets dévastateurs de votre réforme seront effectifs dès ce mois de juillet !

Ne pensez-vous pas que nos concitoyens les plus précaires ont déjà lourdement payé cette crise ? Quel est le but de cette réforme, sinon de faire des économies, une fois de plus, sur le dos des plus vulnérables ?

Je vous le demande solennellement, monsieur le Premier ministre, monsieur le secrétaire d'État : abrogez cette réforme ! (Applaudissements sur les travées des groupes SER et CRCE.)


Réponse du Secrétariat d'État auprès de la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion, chargé des retraites et de la santé au travail publiée le 10/06/2021

Réponse apportée en séance publique le 09/06/2021

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé des retraites et de la santé au travail.

M. Laurent Pietraszewski, secrétaire d'État auprès de la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion, chargé des retraites et de la santé au travail. Madame la sénatrice, j'ai pris connaissance de l'étude du parti socialiste que vous avez évoquée. (Marques d'étonnement sur les travées du groupe SER. – Rires sur des travées du groupe Les Républicains.)

Les chiffres qui ont été repris sont effectivement issus du cadrage de l'Unédic, mais, au total, l'utilisation qui en est faite aboutit à des conclusions erronées et terriblement anxiogènes, d'autant qu'ils sont tronqués. Je vais vous dire pourquoi.

D'abord, vous évoquez une solution disparate selon les régions. J'espère que vous ne découvrez pas qu'il y a plus de chômage dans le nord et dans le sud du pays que dans d'autres régions ! (Mme Laurence Rossignol s'exclame.) Pour ma part, en tant qu'élu des Hauts-de-France, je ne suis pas étonné. Établir une carte qui indique simplement les différences en termes de densité de population et de nombre de chômeurs, je pense que cela a peu d'intérêt in fine…

Sur le fond de cette réforme, ensuite, je vous répondrai qu'aucun demandeur d'emploi actuel ne sera pénalisé ; aucun d'entre eux ne verra ses droits baisser au 1er juillet ! (Protestations sur les travées des groupes SER et CRCE.) C'est la réalité, même si cela vous fait réagir…

M. Pierre Laurent. À vous entendre, ce sont les syndicats qui mentent…

M. Fabien Gay. Et l'Unédic aussi !

M. Laurent Pietraszewski, secrétaire d'État. Je le redis, la réforme ne concernera que ceux qui se retrouveront sans emploi au-delà de cette date. Seuls ceux qui gagnent plus en étant au chômage plutôt qu'en travaillant toucheront une allocation plus basse. C'est l'objet de la réforme.

Il ne vous aura pas échappé que, dans le dispositif porté par Muriel Pénicaud auparavant, puis par Élisabeth Borne et moi-même aujourd'hui, il y a une volonté d'introduire de l'équité et de ne plus permettre que l'on gagne davantage au chômage qu'en travaillant. (M. David Assouline s'exclame.)

Là encore, le montant total des droits ne baissera pas, puisque les personnes dont l'allocation sera plus basse la toucheront plus longtemps.

M. Fabien Gay. C'est faux !

M. Laurent Pietraszewski, secrétaire d'État. Le capital d'allocations chômage reste le même ; simplement, il sera réparti sur une plus longue durée. En réalité, le droit global est le même.

M. David Assouline. Faux !

M. Laurent Pietraszewski, secrétaire d'État. Pour finir, je souhaite rappeler que le marché du travail est en très nette reprise, madame la sénatrice. Vous invoquez le fait que cette réforme a été pensée à un autre moment, mais nous voyons bien que la situation économique actuelle la justifie aussi. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

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