Question de Mme JOURDA Muriel (Morbihan - Les Républicains) publiée le 10/06/2021

Question posée en séance publique le 09/06/2021

M. le président. La parole est à Mme Muriel Jourda, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Muriel Jourda. Ma question s'adressait à M. le garde des sceaux, ministre de la justice, mais je constate qu'il est absent…

En mars 2019, Mme Belloubet avait fait adopter un texte pour instiller des réformes structurelles dans la justice et redonner confiance aux Français dans l'institution judiciaire. Cela n'a guère été efficace, semble-t-il, puisque moins de deux ans plus tard, le garde des sceaux annonçait une nouvelle loi censée également redonner confiance aux Français dans la justice. Or ce projet de loi n'est pas encore discuté devant les deux chambres du Parlement que le Président de la République nous annonce des États généraux de la justice !

Il faut dire que, selon un sondage, un Français sur deux déclare ne pas avoir confiance dans la justice. Dans une manifestation, la police pointe du doigt la responsabilité de l'institution judiciaire et, dans une tribune, les hauts magistrats accusent les politiques.

Dites-nous si ces États généraux, au-delà du « coup de com' » politique, qui est dénoncé, à moins d'un an de l'élection présidentielle, seront enfin un remède efficace à tous ces maux ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)


Réponse du Secrétariat d'État auprès du Premier ministre, porte-parole du Gouvernement publiée le 10/06/2021

Réponse apportée en séance publique le 09/06/2021

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé des relations avec le Parlement et de la participation citoyenne.

M. Marc Fesneau, ministre délégué auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement et de la participation citoyenne. Madame la sénatrice, je vous prie tout d'abord de bien vouloir excuser le garde des sceaux, qui est retenu à l'Assemblée nationale par un texte que vous connaissez bien, celui relatif à la bioéthique.

Comme vous l'avez d'une certaine façon dit, nous ne partons pas d'une feuille blanche. Permettez-moi de rappeler en quelques instants ce que nous avons fait en faveur de notre justice – et nous partions de loin ! – : un budget en hausse continue depuis 2017 de 21 %, avec un bond historique de 8 % en 2021 ; le lancement de la justice de proximité, avec des recrutements massifs de plus de 10 % de personnels judiciaires ; le doublement des délégués du procureur ; le lancement de 8 000 places de prison en avril dernier pour venir compléter le plan de 7 000 places lancé en 2018.

En tout, ce sont donc 15 000 places nettes qui ont été lancées sous ce quinquennat, et presque la moitié sera livrée ou en construction d'ici à 2022. Ces places, je le précise, ont été programmées budgétairement, ce qui nous change des périodes précédentes, où l'on annonçait des choses sans aucun élément budgétaire. (Exclamations.)

Le projet de loi pour la confiance dans l'institution judiciaire porte des mesures fortes pour rassurer les Français.

En matière de violences faites aux femmes, nous avons aussi œuvré, avec notamment les bracelets anti-rapprochement. C'est aussi le cas pour les violences contre les élus.

M. Jacques Grosperrin. Répondez à la question !

M. Marc Fesneau, ministre délégué. Vous m'interrogez sur l'annonce par le Président de la République du lancement des États généraux de la justice, à la demande – je le rappelle – de la première présidente et du procureur général près la Cour de cassation.

Cette action déterminée en faveur de l'institution judiciaire doit se poursuivre, et pour cela nous devons tous nous mettre autour de la table.

Il reviendra au garde des sceaux de décliner à l'automne ces États généraux afin que, partout sur notre territoire, tous les acteurs du monde judiciaire – avocats, magistrats, agents pénitentiaires, greffiers, forces de sécurit頖, mais également les parlementaires et, bien sûr, nos concitoyens puissent construire un contrat d'objectifs partagés.

Je le répète, nous ne partons pas de rien. Nous avons beaucoup œuvré durant ce quinquennat et nous devons continuer à le faire, en faveur de la justice et des actions dont elle a besoin. Tel est le sens de ces États généraux. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. le président. La parole est à Mme Muriel Jourda, pour la réplique.

Mme Muriel Jourda. Vous avez raison, monsieur le ministre, nous ne partons pas d'une page blanche. Cela fait vingt ans que le budget de la justice augmente sans discontinuer. Quant à la réunion des acteurs de la justice, nous en avons pris l'initiative voilà deux ans, à l'instigation de Philippe Bas, alors président de la commission des lois du Sénat. Je dois dire, d'ailleurs, que Mme Belloubet n'avait alors pas écouté un seul des mots que nous avions prononcés, y compris lorsqu'il y avait un consensus entre tous les acteurs.

Je crois que vous ne prenez pas conscience de l'importance du problème et de la difficulté d'aujourd'hui.

Je rappelle que, l'année dernière, en plein confinement, des policiers fuyaient sous des tirs de mortier à Saint-Denis.

Au mois de février, cette année, un retraité n'a pas pu obtenir de la justice de récupérer sa maison, alors qu'elle était occupée par des squatteurs ; ce sont des particuliers qui l'ont aidé à le faire.

Enfin, le mois dernier, les consommateurs de crack du quartier de Stalingrad ont été dispersés par des tirs de mortier que l'on attribue à des riverains et qui, en tout cas, ont été approuvés par eux.

L'État de droit se délite. Non seulement le droit n'est plus appliqué et les policiers fuient devant les délinquants, mais nos concitoyens préfèrent la justice privée à la justice de la République.

Ce n'est pas une aimable causerie entre acteurs de la justice qui va nous permettre de résoudre ces problèmes, mais la restauration de l'État régalien. Nous en sommes loin ! (Vifs applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

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