Question de M. JOMIER Bernard (Paris - SER) publiée le 11/11/2021

Question posée en séance publique le 10/11/2021

M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. Bernard Jomier. Je souhaiterais que le Gouvernement nous apporte quelques précisions à la suite des déclarations du chef de l'État, hier soir, sur la crise sanitaire.

Le Président de la République a indiqué que le passe sanitaire ne pourrait continuer à être délivré aux personnes de plus de 65 ans qu'à la condition que celles-ci se voient administrer une dose de rappel. C'est la première fois qu'une borne d'âge est posée, semble-t-il.

Première question : cette mesure va-t-elle être étendue à toute la population éligible au vaccin ?

Vous estimez, dans le cadre de votre stratégie, que le passe sanitaire est l'outil qui permet de maintenir une protection collective élevée, par la vaccination.

Deuxième question : dès lors, à quelle condition le passe sanitaire pourra-t-il être levé ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)


Réponse du Ministère des solidarités et de la santé publiée le 11/11/2021

Réponse apportée en séance publique le 10/11/2021

M. le président. La parole est à M. le ministre des solidarités et de la santé. (Ah ! sur les travées des groupes SER et CRCE.)

M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé. Pourquoi cette exclamation ?

Plusieurs sénateurs du groupe SER. C'est que vous êtes populaire, monsieur le ministre !

M. le président. Poursuivez, monsieur le ministre ! Ce sont des acclamations anticipées…

M. Olivier Véran, ministre. Peut-être n'étiez-vous pas présents et que vous ne m'avez pas vu, mais j'étais dans ce même hémicycle avant-hier et hier soir, jusqu'à vingt-trois heures ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.) Rassurez-vous, je viens au Sénat toutes les semaines pour travailler plusieurs heures avec vous.

Monsieur le sénateur Bernard Jomier, vous m'interrogez sur l'extension du passe sanitaire.

Administrer en priorité une dose de rappel aux personnes de 65 ans et plus, et bientôt de 50 ans et plus, est cohérent au moins à deux titres. Vous êtes médecin, monsieur Jomier. Vous savez que le système immunitaire est plus fragile lorsque l'on prend de l'âge. Des rappels de vaccinations sont donc nécessaires, pour le covid comme pour d'autres virus, afin de réactiver le système immunitaire, de sorte que celui ait la même capacité à synthétiser des anticorps pour assurer la protection de l'organisme.

Pourquoi avoir étendu le passe ?

D'une part, nous avons laissé du temps aux personnes âgées de 65 ans et plus pour se faire vacciner. D'ailleurs, les trois quarts d'entre elles qui étaient éligibles ont d'ores et déjà ont reçu une dose de rappel. C'est un très bon résultat, mais nombre de personnes restent encore à vacciner.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Vous ne répondez pas à la question !

M. Olivier Véran, ministre. D'autre part, la logique du passe, c'est de s'assurer que le risque de contamination de soi-même et des autres est moindre lorsque l'on entre dans un lieu recevant du public, notamment fermé. Si l'on considère que, au bout d'un moment, la protection conférée par le vaccin est moins importante, il est logique de restreindre l'accès à certains lieux via le passe sanitaire. C'est pourquoi le Président de la République a lancé cet appel.

Nous sommes en train de réduire progressivement la condition d'âge concernant la dose de rappel, de la même façon que nous avions commencé à administrer les premiers vaccins aux personnes âgées, puis par tranches d'âge.

Nous disposons de retours sur la population âgée de 65 ans et plus, ainsi que sur la population âgée de 50 ans et plus. Les populations plus jeunes, dans notre pays comme ailleurs dans le monde, ont été vaccinées plus tard : nous n'avons donc pas encore de retour sur l'évolution de l'immunité les concernant. Les scientifiques estiment qu'il sera probablement nécessaire, d'ici à quelques mois, de proposer un rappel de vaccination plus large. Dans tous les cas, nous agissons en fonction des données scientifiques pour protéger les Français.

Aujourd'hui, nous faisons face à une recrudescence de l'épidémie. Ce n'est donc certainement pas le moment de se poser la question de la suppression du passe sanitaire. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – Exclamations sur les travées du groupe SER. – M. Vincent Delahaye proteste.)

M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier, pour la réplique.

M. Bernard Jomier. Monsieur le ministre, je comprends que nous nous dirigeons vers une dose de rappel pour l'ensemble de la population et que la délivrance du passe sanitaire y sera conditionnée. D'ici à un, deux ou trois ans, le passe sanitaire sera probablement toujours exigé : voilà la perspective que vous tracez.

Nous défendons l'idée que la vie en société implique des obligations, en l'occurrence la vaccination. Mais nous avons le sentiment que, avec ce passe sanitaire, vous êtes en train de changer de paradigme sur la question du contrôle. Car, de fait, vous étendez le recours à cet outil sans qu'on en perçoive bien les limites ; vous étendez le champ des contrôles systématiques, en lieu et place des contrôles aléatoires et a posteriori, qui, dans une société démocratique et de liberté, sont les plus répandus.

C'est là que se situe une interrogation profonde pour les parlementaires que nous sommes, attachés aux libertés publiques. Je constate, à regret, que le Conseil constitutionnel ne nous apporte aucune analyse contributive sur ce point. (Applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST, ainsi que sur des travées du groupe CRCE. – Mme Esther Benbassa applaudit également.)

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