Question de Mme GERBAUD Frédérique (Indre - Les Républicains) publiée le 18/11/2021

Mme Frédérique Gerbaud interroge M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur la flambée persistante des prix des matières premières agricoles, qui menace directement l'équilibre financier, voire la survie des exploitations les plus fragiles. La fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles fait ainsi état de la hausse, ces derniers mois, de 40 % des tarifs du gazole non routier et des aliments pour bétail, ou encore de 300 % de ceux des engrais azotés. Elle souligne aussi de fortes augmentations du prix des matières plastiques. Il est établi que ce phénomène, qui affecte de nombreux autres secteurs, a pour principale origine les dérèglements de l'économie mondiale engendrés par deux années de crise sanitaire : atonie durable de la production, perturbation des circuits logistiques, pénuries, hausse brutale de la demande avec la reprise économique. Malgré tout, et dans l'attente du rétablissement progressif des équilibres économiques et des flux commerciaux mondiaux, elle lui demande quelles initiatives du Gouvernement seraient susceptibles d'atténuer, pour nos exploitants, les effets de cet emballement des prix des matières premières agricoles.

- page 6414


Réponse du Ministère de l'agriculture et de l'alimentation publiée le 05/05/2022

Ces derniers mois, la hausse du prix des engrais azotés s'expliquait principalement par une demande dynamique et par la hausse des prix de l'électricité et du gaz. En outre, les matières premières nécessaires à la fabrication des engrais azotés connaissent des hausses de prix, notamment le méthane et l'ammoniac. Pour autant, à ce jour, aucune pénurie n'a été constatée, que ce soit pour les carburants non routiers, le gaz ou les engrais. La problématique d'approvisionnement des agriculteurs est principalement due à la difficulté rencontrée par les entreprises de logistique à trouver des chauffeurs disposant de la certification nécessaire au transport de matières dangereuses (carburants, gaz ou engrais). À ce contexte déjà fortement haussier est venu s'ajouter la guerre en Ukraine, la Russie étant un des principaux fournisseurs de l'Union européenne d'engrais azotés, et de gaz pour alimenter les unités de production d'engrais azotés sur le sol de l'union européenne, qui oblige à travailler plus encore de manière préventive sur la sécurisation des approvisionnements en engrais dans les mois à venir.   Le ministère de l'agriculture et de l'alimentation est mobilisé pour trouver des solutions concrètes afin, d'une part, de faciliter, en lien avec le ministère chargé des transports, la livraison des engrais azotés et, d'autre part, de mobiliser les voies et moyens permettant de limiter la pression sur le prix des engrais azotés, notamment en engageant des actions au niveau européen. Ainsi, afin d'augmenter le nombre de créneaux de livraisons disponibles pour permettre l'approvisionnement des agriculteurs dans l'attente des produits concernés, des autorisations exceptionnelles de circulations peuvent être accordées au cas par cas au niveau local. Pour répondre aux conséquences de la crise ukrainienne, le Gouvernement a annoncé un plan de résilience, dont l'un des axes vise à sécuriser dans les mois qui viennent l'approvisionnement d'engrais en quantité suffisante par une diversification des origines, à en développer la production sur le territoire national et européen et à développer la mobilisation optimale de la ressource et l'usage des engrais organiques. Un plan souveraineté azote sera mis en œuvre à moyen terme afin de privilégier la production d'engrais vert et le développement de filières de valorisation d'engrais organique. La forte hausse du prix des engrais a des conséquences directes sur les coûts de production des agriculteurs. Toutefois, la hausse générale du prix des matières premières et de la demande alimentaire mondiale se traduit aussi par une hausse des prix de céréales et des oléagineux qui ont atteint des records historiques. L'augmentation des charges en engrais amoindrit l'effet positif de cette hausse. Cependant, pour ce qui concerne les filières animales, la structure des coûts de production est dominée par l'alimentation animale où prévalent les céréales et oléoprotéagineux, dont les cours sont en forte augmentation ainsi que, ipso facto, leurs coproduits, dont les tourteaux. Pour cette raison, le plan de résilience prévoit une aide exceptionnelle de 489 millions d'euros pour faire face à l'augmentation du coût de l'alimentation animale dans les élevages, dont les critères d'attribution sont fixés en concertation avec l'ensemble des acteurs concernés. Pour les exploitations en difficulté pour payer leurs cotisations sociales du fait d'une hausse des charges liées au conflit, une enveloppe exceptionnelle de prise en charge de cotisations sociales de 150 millions d'euros a également été débloquée. La loi dite « EGALIM 2 », promulguée en octobre 2021, impose une prise en compte des coûts de production dans les prix d'achat des produits agricoles par l'aval de la filière. Les dispositions de cette dite loi impliquent une répercussion automatique des hausses des coûts de production sur les prix d'achat des matières premières agricoles, selon une formule librement définie par les parties. Ainsi, grâce à le loi EGALIM 2, les agriculteurs ne supportent plus seuls les hausses des coûts de production, grâce à l'application de la « cascade des prix », notamment via les mécanismes de contractualisation, de non-négociabilité de la matière première agricole ou de non-discrimination tarifaire. L'État est extrêmement vigilant quant au respect de la mise en œuvre de cette loi. Les services de contrôle sont d'ores et déjà pleinement mobilisés, tout comme le médiateur des relations commerciales et le médiateur de la coopération agricole. En outre, le comité de règlements des différends commerciaux agricoles, institué par la loi, vient tout juste d'être constitué. Par ailleurs, en raison de la guerre en Ukraine et de ses conséquences sur le renchérissement des coûts de productions pour l'amont agricole, le ministre de l'agriculture et de l'alimentation et la ministre déléguée auprès du ministre de l'économie des finances et de la relance, chargée de l'industrie, ont demandé une réouverture des contrats grâce à la clause de renégociation ainsi que des dispositions adaptées en termes de pénalités logistiques. Un cycle de réunions avec l'ensemble des acteurs a d'ores et déjà été engagé en ce sens, sous l'égide des ministres.

- page 2507

Page mise à jour le