Question de M. LAURENT Pierre (Paris - CRCE) publiée le 25/11/2021

M. Pierre Laurent attire l'attention de M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur la situation en République démocratique du Congo (RDC).
Ce pays est l'un des plus pauvres du monde alors qu'il regorge de richesses de toutes sortes. Par ailleurs, depuis vingt-cinq ans, des atrocités se déroulent notamment à l'est de ce pays dans ce qu'il est convenu d'appeler les deux guerres du Congo, qui sont en fait des guerres de pillage au bénéfice, en dernier ressort, de multinationales qui passent notamment par des pays voisins. Les conséquences de ces guerres ont fait des millions de victimes faisant de ce conflit au Congo sans doute le plus meurtrier depuis la Seconde Guerre mondiale. Ces atrocités sont documentées chaque année depuis 2003 par un groupe d'experts de l'organisation des Nations unies (ONU), qui fait également état des multinationales qui y sont impliquées, ainsi que dans le rapport Mapping publié en octobre 2010. Le rapport Mapping, commandé par le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l'homme, recensait de nombreux crimes de guerre, crimes contre l'humanité et de possibles génocides commis entre 1993 et 2003 en RDC et recommande des poursuites à ce sujet. En cohérence avec cet objectif, le titulaire du prix Nobel de la paix 2018, de nationalité congolaise, revendique depuis trois ans la création d'un tribunal pénal international et la création de chambres mixtes avec des magistrats congolais et internationaux au sein de juridictions congolaises pour poursuivre les auteurs de violations des droits de l'homme. Il lui demande ce que la France compte faire en vue d'appuyer cette démarche.
Par ailleurs, il est à noter que dans la suite des dernières élections nationales en 2018, dont les résultats ont été très contestés - y compris, dans un premier temps, par la France - l'opposition ainsi qu'un bon nombre d'acteurs de la société congolaise, et parmi eux les églises, mettent en cause l'organisation de la commission électorale initiée par le pouvoir en place qui se ferait, selon eux, en complicité avec des chancelleries étrangères dont celle des États-Unis et de l'Union européenne. Ils craignent que si les leçons de 2018 ne sont pas tirées et que des mesures ne sont pas rapidement prises pour apaiser les tensions et renforcer la confiance de la population, le pays se dirige vers une nouvelle crise majeure et déstabilisatrice. Ils dénoncent également la répression dont ils font l'objet à l'occasion de manifestations pour exiger la réforme consensuelle de l'administration électorale, dénoncer la dégradation des conditions de vie, la corruption et des massacres dans la partie Est du Congo. Il souhaite donc savoir quels actes la diplomatie française compte poser par rapport à l'ensemble de ces sujets.

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Réponse du Ministère de l'Europe et des affaires étrangères publiée le 06/01/2022

Le rapport du Haut commissariat aux droits de l'Homme concernant les violations les plus graves des droits de l'Homme et du droit international humanitaire commises en République démocratique du Congo (RDC) entre 1993 et 2003 a d'abord pour objectif d'« aider le nouveau Gouvernement [congolais] en le dotant des outils nécessaires pour gérer les processus post-conflit ». Selon le rapport lui-même, il appartient aux autorités de la RDC de choisir le dispositif pénal le plus approprié au traitement judiciaire des faits décrits. La France suit attentivement les développements proposés par les autorités congolaises et se tient prête, en fonction des besoins qui pourraient être exprimés, à les soutenir. La France est également engagée en faveur de la lutte contre l'impunité des crimes commis en RDC. Elle soutient un mandat robuste de la MONUSCO en la matière, afin que la Mission puisse travailler avec les autorités congolaises à renforcer le système judiciaire du pays, enquêter sur les crimes les plus graves et traduire les intéressés en justice. Elle a, par ailleurs, contribué à la mise en place de régimes de sanctions des Nations unies et de l'Union européenne, permettant de désigner des personnes ou entités qui se sont rendues coupables de violations des droits de l'Homme ou du droit international humanitaire en RDC. À titre bilatéral, la France mène une coopération active pour consolider le secteur de la justice, en particulier en appui à l'Institut national de formation du personnel judiciaire et pénitentiaire (INAFORJ). Elle encourage également le Gouvernement congolais à avancer dans son projet de réforme en matière de justice transitionnelle.  La France reste attentive au respect des droits de l'Homme et de l'État de droit en RDC, y compris dans le cadre du processus électoral en cours. Le 26 octobre dernier, au travers d'une déclaration conjointe avec d'autres partenaires internationaux de la RDC, la France a encouragé les autorités congolaises à rechercher l'adhésion au processus électoral de tous les acteurs concernés, la Commission électorale nationale indépendante (CENI) à renforcer sa redevabilité, et l'ensemble des parties prenantes à se concerter en vue d'assurer la crédibilité et le bon déroulement des futures élections. Elle se tient prête à apporter un appui technique aux autorités congolaises, dans un cadre bilatéral, européen ou multilatéral, pour l'organisation d'élections crédibles, transparentes et inclusives, dans les délais prévus par la Constitution. La France réaffirme, par ailleurs, son attachement au strict respect de la liberté d'expression et de la liberté de presse, ainsi que son engagement constant aux côtés de la société civile congolaise.

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