Question de Mme LE HOUEROU Annie (Côtes-d'Armor - SER) publiée le 06/01/2022

Mme Annie Le Houerou attire l'attention de M. le ministre des solidarités et de la santé au sujet de la démographie médicale.
La problématique de la désertification médicale n'est pas nouvelle et relève d'enjeux de formation, de conditions de travail et de valorisation des professionnels de santé, généralistes ou spécialistes ; elle s'est accentuée de façon particulièrement inquiétante ces derniers mois.
La densité médicale diminue, la répartition géographique des médecins sur le territoire est très inégale, laissant apparaître dans certaines régions ou même dans certains quartiers situés en zone urbaine une importante désertification médicale. Par ailleurs la population médicale vieillissant, il est largement prévisible que la question de l'égalité de l'accès aux soins se posera de manière plus forte encore dans les années à venir. Aussi, elle lui demande quelles mesures il entend prendre pour favoriser l'implantation de médecins dans les zones rurales comme dans les zones urbaines déficitaires en professionnels de santé.

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Réponse du Ministère auprès du ministre des solidarités et de la santé - Autonomie publiée le 16/02/2022

Réponse apportée en séance publique le 15/02/2022

M. le président. La parole est à Mme Annie Le Houerou, auteure de la question n° 2032, adressée à M. le ministre des solidarités et de la santé.

Mme Annie Le Houerou. Madame la ministre, ma question porte sur la désertification médicale de nos territoires.

Plus d'un Français sur dix ne parvient pas à trouver de médecin traitant. Selon la direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (Drees), cette situation constitue une injustice sociale qui frappe d'abord les plus précaires. En effet, ces derniers ont jusqu'à huit fois plus de risques de renoncer à des soins dans les zones très sous-dotées en médecins.

Dans les Côtes-d'Armor, à Guingamp, par exemple, la menace de fermeture de la maternité et du service de chirurgie de l'hôpital fait craindre une dégradation de l'offre de soins de proximité pour un territoire de 100 000 habitants où l'indice de vieillissement est de 63 % supérieur à la moyenne nationale. Chacun a parfaitement conscience de l'intérêt d'un hôpital de plein exercice pour l'attractivité et la qualité de l'offre de soins en ville et dans les établissements d'accueil des plus vulnérables.

Autre exemple, celui de la commune d'Uzel : dans cette ville située dans le même département, un dentiste tunisien souhaite s'installer pour remplacer un autre dentiste qui quitte le territoire. Malgré la mobilisation de la municipalité, qui appuie son installation, la conformité de son dossier et la demande d'autorisation d'exercice faite auprès du Centre national de gestion en novembre 2021, ladite autorisation ne lui a toujours pas été délivrée et aucune réponse ne lui a été apportée malgré nos relances.

Pour répondre à cette désertification médicale, le Président de la République avait déclaré faire de la formation à la maîtrise de stage universitaire une priorité.

Or, en décembre dernier, le Gouvernement a publié un arrêté limitant drastiquement les possibilités de formation à la maîtrise de stages universitaires, ce qui conduit à une baisse de 200 maîtres de stage et empêche la découverte des territoires, ainsi que la pratique ambulatoire des futurs médecins.

La semaine dernière, le Gouvernement a annoncé, sans plus de précision, qu'il fixerait prochainement des objectifs aux agences régionales de santé (ARS) pour développer et promouvoir en priorité la réalisation de stages ambulatoires dans les zones sous-denses. Qu'en est-il exactement ?

Comment le Gouvernement compte-t-il résoudre la question des déserts médicaux, lever les freins à l'installation de ceux qui le souhaitent et faciliter la mise en œuvre rapide de solutions, lorsqu'elles existent ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargée de l'autonomie. Madame la sénatrice Annie Le Houerou, comme vous l'avez rappelé, le défi démographique que nous avons à relever dans nos territoires est grand.

Le nombre de médecins est en baisse régulière depuis 2010. La formation médicale a un rôle à jouer pour accroître le nombre de praticiens. À cette fin, nous mobilisons plusieurs leviers simultanément.

Tout d'abord, nous avons supprimé le numerus clausus, – tout le monde en parlait, mais personne ne l'avait fait – pour former davantage. Ainsi, 86 médecins supplémentaires seront formés chaque année dans les seules facultés bretonnes à l'horizon 2025.

Ensuite, la réalisation de stages en zones sous-denses, rurales comme urbaines, permet aux internes de découvrir les réalités plurielles de nos territoires et leur diversité – il y avait trop peu de stages ces dernières années, vous en conviendrez. Ils sont désormais plus de la moitié à faire au moins un stage en zone sous-dense au cours de leur formation.

Le contrat d'engagement de service public, allocation versée aux étudiants en santé en contrepartie d'une installation dans une zone sous-dense, a également contribué à l'installation de 3 000 jeunes professionnels en zone rurale.

En ce qui concerne la régulation des flux d'internes, nous entamons un rééquilibrage territorial en augmentant le nombre de postes dans les régions, notamment les moins bien dotées en médecins, tout en stabilisant les effectifs dans celles qui sont mieux dotées.

Certaines mesures structurantes demandent davantage de temps pour produire leurs effets : c'est le cas de l'exercice coordonné, qui représente un fort levier d'attractivité.

Au-delà du fait que les maisons de santé représentent un cadre d'exercice très attractif pour les jeunes professionnels, une étude récente démontre la capacité indéniable des médecins travaillant dans ces maisons à accroître leur patientèle.

Dans votre département, vingt-quatre maisons de santé ont ainsi pu ouvrir et six nouvelles sont en projet. Les communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) devraient, quant à elles, passer prochainement de trois à cinq.

Comme vous le savez, nous déployons par ailleurs 400 médecins généralistes dans les territoires prioritaires. Dans votre département, le nouveau zonage permet en outre de faire bénéficier d'une aide de 25 000 euros pour trois ans les nouveaux praticiens exerçant à proximité des 20 % des résidents les plus éloignés des soins.

Tous ces leviers contribueront à favoriser l'attractivité et nous permettront d'accentuer l'offre de soins dans les territoires. C'est la préoccupation constante du Gouvernement.

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