Question de M. TODESCHINI Jean-Marc (Moselle - SER) publiée le 20/01/2022

M. Jean-Marc Todeschini attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de la relance au sujet de la baisse programmée du pouvoir d'achat des Français.
En France, 56 millions de personnes détiennent un Livret A et 25 millions de personnes, un Livret de développement durable et solidaire (LDDS). Ces livrets d'épargne ne garantissent plus depuis 2018 une rémunération à hauteur de l'inflation. Le maintien de l'inflation à 2,8 % en décembre 2021 va se traduire par une augmentation du taux des Livrets A et des Livrets de développement durable et solidaires au 1er février. D'après les organisations syndicales, cette augmentation portera le taux de rémunération de 0,5 % actuellement à 0,8 %. Si le taux de 0,8 % est retenu par le Gouvernement, la perte de pouvoir d'achat sera de 2 % par rapport à l'inflation cumulée en 2021. L'encours total du Livret A et du LDDS étant établi à 468,9 milliards d'euros fin octobre 2021, la perte totale pour les épargnants s'élèverait alors à 2 % de cette somme, soit 9 milliards et 380 millions d'euros. Ces livrets sont essentiellement détenus par des Français issus des classes populaires et moyennes qui eux ne sont jamais concernés par les allègements fiscaux orientés vers les très riches.
En conséquence, il lui demande de bien vouloir lui indiquer les mesures que le Gouvernement entend prendre afin de maintenir le pouvoir d'achat des Français, notamment en garantissant à l'ensemble de la population que l'épargne soit préservée des effets de l'inflation et qu'un Haut Conseil de l'épargne réglementée rassemblant toutes les parties prenantes, y compris les associations de consommateurs représentatives et les organisations syndicales, soit créé afin que toutes les questions (réglementation, rémunération, finalités d'intérêt général …) touchant à l'épargne réglementée puissent être débattues de manière transparente et contradictoire.

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Réponse du Ministère de l'économie, des finances et de la relance publiée le 28/04/2022

Depuis la réforme annoncée en 2018 et son application à compter du 1er février 2020, le taux du livret A (TLA) et du livret de développement durable et solidaire (LDDS) est calculé comme la moyenne semestrielle entre les taux observés sur le marché monétaire au jour le jour et l'inflation (la variation de l'indice des prix à la consommation de l'ensemble des ménages hors tabac). Un plancher a de plus été fixé à 0,5 %. Quant au taux du livret d'épargne populaire (LEP), il est égal au taux du livret A augmenté de 0,5 %, avec un plancher égal à l'inflation moyenne sur les 6 derniers mois. Cette formule protège le rendement de l'épargne déposée sur ces livrets, et tout particulièrement celui de l'épargne des plus modestes déposée sur les LEP, tout en préservant les conditions de financement du secteur du logement social, dont le financement est, de façon prédominante, adossé à cette ressource, et qui pâtirait d'un taux du livret A trop éloigné des taux de marché. C'est cet équilibre, que ne réalisait pas la précédente formule, que le Gouvernement a souhaité atteindre. L'application stricte de cette formule aurait dû conduire à un TLA de 0,8 % à compter du 1er février 2022, mais, en raison de circonstances exceptionnelles liées à une situation très particulière de hausse brutale de l'inflation en sortie de crise, le taux du livret A a, sur proposition du Gouverneur de la Banque de France, été fixé à 1%, en dérogation de la formule, comme la possibilité en est prévue par l'arrêté du 27 janvier 2021 relatif aux taux d'intérêt des produits d'épargne réglementée. Il s'agit donc d'une mesure de protection du pouvoir d'achat des épargnants. Les conditions de financement que peut offrir le Fonds d'épargne de la Caisse des dépôts aux bailleurs sociaux dépendant directement du coût de la ressource, une hausse plus forte du TLA aurait entraîné une dégradation de la situation financière des organismes de logement social, préjudiciable à leur capacité d'investissement. L'attention du sénateur est attirée sur le fait qu'un tel niveau de rémunération, de surcroit non imposé et non soumis aux prélèvements sociaux, est inégalé pour un support d'épargne parfaitement sûr (l'Etat le garantit intégralement) et parfaitement liquide, et permettant le dépôt de sommes importantes (un épargnant cumulant un livret A et un LDDS peut déposer jusqu'à 34950 euros, auxquels s'ajoutent les intérêts capitalisés). A titre de comparaison, le taux moyen des livrets ordinaires s'est, selon les dernières données de la Banque de France, établi à 0,09 % entre septembre et novembre 2021. En outre, les ménages aux revenus les plus modestes peuvent recourir à un produit qui protège intégralement du risque d'inflation : le livret d'épargne populaire (LEP). Près de la moitié des Français sont éligibles à ce dispositif, dont le taux s'établit à 2,2% (soit la moyenne de l'inflation sur les 6 derniers mois de l'année 2021) à compter du 1er février. Ce produit restant insuffisamment utilisé, le Gouvernement a décidé de simplifier ses conditions d'ouverture et les modalités du contrôle annuel de l'éligibilité des épargnants à ce produit. Une disposition de la loi du 7 décembre 2020 d'accélération et de simplification de l'action publique prévoit ainsi que cette vérification puisse être effectuée automatiquement par les banques, qui seront en mesure d'interroger l'administration fiscale sur l'éligibilité d'un client souhaitant ouvrir ou maintenir son LEP. Par ailleurs, une meilleure communication étant nécessaire pour favoriser le recours à ce produit, la Direction générale des Finances publiques a envoyé, fin janvier, un nouveau courrier électronique à tous les ménages dont les revenus fiscaux 2021 les rendent éligibles au LEP pour les informer de leur éligibilité et du rehaussement de son taux à 2,2%. Enfin, le Gouvernement a mis en place une politique plus globale de soutien au pouvoir d'achat des Français depuis le début du quinquennat, qui s'est traduite par de nombreuses mesures, dont notamment la suppression de la taxe d'habitation, la revalorisation de la prime d'activité, la baisse de l'impôt sur le revenu des classes moyennes, l'exonération de cotisations et d'impôt sur le revenu des heures supplémentaires ou complémentaires. En outre, en réponse à la crise du Covid-19, le Gouvernement a mis en place le dispositif d'activité partielle, la prolongation des droits aux indemnités chômage, le renouvellement automatique des droits à plusieurs minima sociaux, et des aides exceptionnelles destinées aux plus fragiles. Enfin, face à la forte augmentation des prix de l'énergie et à l'augmentation de l'inflation en sortie de crise, le Gouvernement a notamment annoncé la mise en place d'une indemnité inflation et d'un bouclier tarifaire sur les prix du gaz et de l'électricité, ainsi que le rehaussement de 10 % du barème kilométrique, qui permet de déduire une partie des frais de transports de son impôt sur le revenu. La création d un Haut Conseil de l'épargne règlementée irait à l'encontre de l'objectif de rationalisation des commissions et instances consultatives et délibératives poursuivi par le Gouvernement depuis le début du quinquennat. Lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2022, on recensait 317 de ces instances, contre 443 lors du PLF 2017. Dans le domaine de l'épargne, l'Observatoire de l épargne réglementée a ainsi été supprimé par le décret n° 2019-1379 du 18 décembre 2019 portant suppression de commissions administratives à caractère consultatif. Au demeurant, le Gouvernement est bien sûr à l'écoute des acteurs que mentionne le sénateur, et il n'apparait pas nécessaire de créer une instance pour que ceux-ci puissent faire entendre leur voix. Par ailleurs, la procédure de détermination du taux des produits d'épargne réglementée, et notamment du livret A, est d'ores et déjà transparente. Le législateur a confié au pouvoir réglementaire le soin de préciser le fonctionnement du livret A, dont le taux d'intérêt applicable. L'arrêté du 27 janvier 2021 relatif aux taux d'intérêt des produits d'épargne réglementée fixe ainsi de manière transparente la procédure qui conduit à la détermination du taux d'intérêt. Enfin, les parties prenantes citées sont déjà réunies au sein du Comité consultatif de la législation et de la réglementation financière (CCLRF), qui donne son avis sur les arrêtés fixant le taux des produits d'épargne règlementée, comme sur l'ensemble des textes normatifs à portée générale sur les questions financières. Le CCLRF est en effet composé, pour partie, de représentants des consommateurs, des assemblées parlementaires ainsi que des organisations syndicales du personnel du secteur financier.

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