Question de Mme FILLEUL Martine (Nord - SER) publiée le 10/02/2022

Mme Martine Filleul interroge M. le ministre des solidarités et de la santé sur la situation inquiétante dans le département du Nord concernant les mesures de soins sous contrainte prises à la demande des directeurs d'établissements de santé psychiatrique.

En effet, il semble que les exigences législatives relatives aux mesures de soins sous contrainte prises durant l'année 2020 n'ont pas été pas respectées.

Ces dernières doivent être utilisées à titre exceptionnel car elles ne comprennent pas suffisamment de garanties pour éviter les abus.

Or, dans le Nord, 90 % des soins sous contrainte décidés par les directeurs d'établissements sont des mesures d'urgence (63 %) ou de péril imminent (27 %). L'exception est donc devenue la règle.

Par ailleurs, l'obligation légale selon laquelle les hôpitaux psychiatriques doivent être visités au moins une fois par an par le représentant de l'État dans le département ou son représentant, par le président du tribunal judiciaire ou son délégué, par le procureur de la République dans le ressort duquel est situé l'établissement et par le maire de la commune ou son représentant n'est, elle non plus, pas respectée. La majorité des établissements du Nord n'ont ainsi pas fait l'objet de ces visites de contrôle.
Elle souhaite donc savoir quelles sont les mesures mises en place par le Gouvernement pour faire respecter ces dispositions afin de s'assurer du respect des droits fondamentaux des patients admis.

- page 678


Réponse du Ministère auprès du ministre des solidarités et de la santé - Autonomie publiée le 16/02/2022

Réponse apportée en séance publique le 15/02/2022

M. le président. La parole est à Mme Martine Filleul, auteure de la question n° 2145, adressée à M. le ministre des solidarités et de la santé.

Mme Martine Filleul. La Commission des citoyens pour les droits de l'homme (CCDH), spécialisée dans la santé mentale, nous informe de la situation inquiétante dans le département du Nord concernant les mesures de soins sous contrainte prises à la demande des directeurs d'établissements de santé psychiatrique.

En application des articles L. 3212-1 et L. 3212-3 du code de la santé publique, deux procédures peuvent être utilisées à titre exceptionnel : l'urgence ou le péril imminent.

Dans le Nord, 90 % des soins sous contrainte décidés par les directeurs d'établissements sont des mesures d'urgence – 63 % des cas – ou de péril imminent – 27 % des cas. L'exception est donc devenue la règle.

Par ailleurs, l'obligation légale selon laquelle les hôpitaux psychiatriques doivent être visités au moins une fois par an, sans publicité, par le représentant de l'État dans le département et par le président du tribunal judiciaire, ainsi que par le procureur de la République et par le maire de la commune n'est pas non plus respectée : la majorité des établissements du Nord n'ont pas fait l'objet de ces visites de contrôle.

Madame la ministre, quelles sont les mesures prévues par le Gouvernement pour faire respecter ces dispositions et s'assurer ainsi du respect des droits fondamentaux des patients admis dans ces établissements ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l'autonomie.

Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargée de l'autonomie. Madame la sénatrice Martine Filleul, les chiffres de l'année 2020 sur lesquels vous vous êtes appuyée ne semblent pas présenter de différence majeure avec les autres départements de la région Hauts-de-France ni même avec la moyenne nationale en matière d'admission en soins sur décision du directeur d'établissement (SDDE).

Ainsi, les mesures de péril imminent représentaient, cette année-là, 27 % des mesures de soins sous contrainte pour le département du Nord, contre 34 % pour la région Hauts-de-France et environ 33,76 % au niveau national.

Le pourcentage sur votre département ne paraît donc ni démesuré ni plus alarmant eu égard aux besoins avérés et aux pratiques dans la région et à l'échelle nationale.

En outre, le Contrôleur général des lieux de privation de liberté souligne dans son rapport que près de 60 % des admissions en soins sans consentement sont initiés dans un service de médecine d'urgence dans notre pays.

Les visites du Contrôleur général ont mis en évidence que, dans la plupart des établissements en France, les admissions en soins sur demande d'un tiers en urgence (SDTU) ou en soins en cas de péril imminent (SPI) sont toujours prépondérantes parmi les SDDE.

Par ailleurs, les établissements de santé des Hauts-de-France habilités pour l'accueil de patients en soins psychiatriques sans consentement font l'objet d'un contrôle régulier par les services de l'agence régionale de santé, qui disposent, pour ce faire, de toutes les informations utiles.

En outre, la commission départementale des soins psychiatriques (CDSP) effectue a minima deux visites par an au sein des établissements de santé, comme l'exige l'article L. 3222-4 du code de la santé publique.

Enfin, le procureur de la République a bien effectué les visites prévues en 2020 dans les établissements de psychiatrie du Nord, conformément à la législation en vigueur, et en dépit de la situation sanitaire qui aurait pu, vous en conviendrez, heurter la programmation des contrôles en cette année particulière.

M. le président. La parole est à Mme Martine Filleul, pour la réplique.

Mme Martine Filleul. Vous comprendrez mon étonnement, madame la ministre, tant les chiffres que vous nous donnez sont en contradiction avec ceux de la Commission des citoyens pour les droits de l'homme.

Croyez bien que je resterai très attentive à ce que les patients soient traités avec la plus grande bienveillance et protégés de toute dérive. Je veillerai également à ce que les visites prévues aient bien lieu dans les établissements du Nord.

- page 1682

Page mise à jour le