Question de M. LAURENT Pierre (Paris - CRCE) publiée le 07/07/2022

M. Pierre Laurent attire l'attention de Mme la ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur le rapport publié le 30 mai 2022 de la Cour des comptes européenne (CCE) portant sur les dépenses de l'Union européenne (UE) pour le climat de 2014 à 2020.
La CCE estime que les dépenses climatiques correspondantes étaient plus susceptibles de représenter environ 13 % du budget de l'UE, soit 144 milliards d'euros, plutôt que les 20 % déclarés.
Elle estime également que la méthodologie de suivi des dépenses climatiques ne prend en compte que l'impact positif potentiel sur le climat et ne suit pas les impacts négatifs potentiels des mesures qui servent d'autres objectifs de l'UE.
Le rapport de la CCE stipule également que c'est dans la politique agricole que les dépenses climatiques sont le plus surestimées, de près de 60 milliards d'euros. Citant, comme un des exemples en la matière, l'agriculture biologique, elle déclare que les chiffres de la Commission ignorent les inconvénients potentiels tels que la baisse de la productivité agricole et l'augmentation des importations de céréales en provenance de pays dont les règles environnementales sont moins strictes.
La CCE s'est inquiétée, en outre, de la fiabilité des rapports sur le climat pour la période actuelle, affirmant que la plupart des problèmes identifiés pour la période 2014-2020 subsistent. Elle s'en inquiète d'autant plus que, dans le budget actuel, l'UE s'est engagée à consacrer au moins 30 % de son budget à l'action climatique, un objectif qui passe à 37 % lorsqu'il s'agit du fonds de relance de l'UE de 800 milliards d'euros résultant de la crise de la Covid-19, adopté en 2020.
La CCE formule de nombreuses recommandations parmi lesquelles figurent celles qui traitent de la politique agricole commune (PAC), qui représente environ 40 % de l'ensemble des dépenses de l'UE.
Par conséquent, il lui demande ce que la France compte prendre comme initiatives au niveau national et européen pour remédier aux manquements dénoncés par ce rapport, rattraper le retard et remplir les objectifs futurs.

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Transmise au Ministère auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé des comptes publics


Réponse du Ministère auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé des comptes publics publiée le 29/09/2022

La lutte contre le changement climatique est une priorité majeure de la France, portée au niveau européen et reflétée par le rehaussement des ambitions climatiques du nouveau cadre financier pluriannuel (CFP) 2021-2027. Pionnière en matière de budget vert, la France est, à cet égard, attachée à ce que cette démarche innovante de cotation environnementale s'appuie sur une méthodologie rigoureuse, fiable et transparente à même d'offrir aux co-législateurs européens et à la société civile une image fidèle de l'impact du budget de l'Union sur le climat. Si l'Union européenne a su mettre en place dès 2014 une méthode de comptabilisation des dépenses environnementales, celle-ci diffère de l'approche française et présente plusieurs biais dont les rapports successifs de la Cour des comptes européenne [1] ont pu mettre en lumière les risques d'incohérence et de surestimation, tout particulièrement s'agissant des dépenses agricoles. Au-delà des approximations induites par les critères et marqueurs retenus par la Commission européenne, la Cour relève notamment l'absence de prise en compte, sur la période 2014-2020, des dépenses susceptibles d'avoir un impact préjudiciable sur le climat ainsi que les risques de surestimation associés à une cotation limitée aux seules dépenses engagées. À titre de comparaison [2], le budget vert français, estimé à partir des dépenses à payer, comptabilise les actions défavorables à l'environnement et différencie, parmi ses six critères d'évaluation, atténuation et adaptation au changement climatique. Les améliorations méthodologiques introduites par la Commission dans le cadre de la nouvelle programmation 2021-2027 et du projet de budget UE 2023 constituent une première avancée bienvenue qui devra être poursuivie tout au long des prochains exercices afin de garantir l'atteinte des objectifs que s'est fixée l'Union et la fiabilité des futures déclarations de dépenses climatiques.  La France a rappelé son attachement à ce que soient prise en compte l'ensemble des recommandations formulées par la Cour et à tirer parti des bonnes pratiques existantes au sein des États membres tout en veillant à la juste proportionnalité de la charge administrative associée et au respect des plafonds du CFP 2021-2027. Fortement investie sur ce sujet, la France a développé dans le cadre de la Présidence du Conseil de l'UE plusieurs initiatives visant à renforcer la coopération européenne et à favoriser l'émergence de méthodes communes à travers l'identification et la diffusion de bonnes pratiques. Le ministère de l'Economie et des Finances a ainsi organisé en mars 2022 une conférence dans le cadre de la PFUE pour échanger sur les mérites du budget vert, ses succès et perspectives d'amélioration. Une déclaration commune appelant à la mise en œuvre d'actions conjointes a été adoptée à cette occasion par la Commission européenne et 14 États membres. Outre la création d'un programme d'échanges entre fonctionnaires nationaux et européens, celle-ci prévoit notamment une association plus étroite des États membres aux réflexions méthodologiques menées par la Commission ainsi que des échanges renforcés afin de permettre à ces derniers d'estimer la part verte de leur contribution annuelle au budget de l'Union européenne.  [1] Rapport n° 31/2016, Document d'analyse n° 01/2020, Rapport spécial n° 09/2022, [2] Rapport n° 09/2022, p.35, tableau 6.

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