Question de M. WATTEBLED Dany (Nord - Les Indépendants) publiée le 07/07/2022

M. Dany Wattebled appelle l'attention de M. le ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion sur le harcèlement et les escroqueries liés au compte personnel de formation (CPF).

Le dispositif du CPF qui est venu remplacer le droit individuel à formation (DIF) en 2015, offre à toute personne de plus de 16 ans ayant une activité professionnelle, un crédit renouvelable pour souscrire à une formation en quelques clics depuis la plate-forme officielle « mon compte formation ».

Si l'esprit de ce projet est vertueux, force est de constater que l'insuffisance de son encadrement a créé un effet d'aubaine pour une multitude d'acteurs peu scrupuleux. Arguant souvent du fait qu'à défaut d'un engagement rapide le salarié perdra tous ses droits à formation, ces acteurs harcèlent les salariés français en multipliant les appels téléphoniques pour les inciter à prendre rapidement une formation, dans le but de récupérer leur crédit afférent. Des plates-formes de démarchage téléphonique sont ainsi installées notamment au Maghreb et en Israël, avec des personnes payées à la commission pour décrocher des formations, bien qu'elles n'aient généralement aucune connaissance des formations qu'elles vendent. Les démarcheurs utilisent aussi les réseaux sociaux comme Tiktok et Facebook, avec des influenceurs allant jusqu'à proposer des récompenses aux personnes contre leur engagement dans une formation souvent de piètre qualité…

L'objectif de ce harcèlement est de récupérer au maximum les crédits formation accumulés depuis des années par les salariés. Selon la caisse des dépôts et consignation (CDC), chargée d'administrer ce dispositif, le montant de la fraude s'élèverait à 16 millions d'euros avec un piratage recensé de 14 300 comptes. Ce montant considérable ne comptabilise pourtant que les arnaques relevant du vol pur et simple, lorsque les escrocs encaissent les bénéfices au profit d'une société prétexte, sans délivrer aucune formation. Mais la plupart des fraudes, de l'aveu de la CDC elle-même, relève de la « zone grise », consistant à pousser à l'inscription à des formations réelles mais de qualité médiocre.

Face à l'importance et à la prolifération de ces arnaques au CPF, il lui semble indispensable que le Gouvernement intervienne pour y mettre un terme. C'est pourquoi, il lui demande d'une part, s'il entend interdire le démarchage téléphonique pour le CPF, comme cela a déjà été fait dans le passé pour la rénovation énergétique, et d'autre part, si une campagne d'information ne pourrait être menée dans les grands médias, à la fois pour informer les Français sur leur droit à formation et pour les alerter sur ces risques de siphonnage de leur compte CPF.

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Transmise au Ministère auprès du ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion et du ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse, chargé de l'enseignement et de la formation professionnels


Réponse du Ministère auprès du ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion et du ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse, chargé de l'enseignement et de la formation professionnels publiée le 01/12/2022

La loi du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel a permis une véritable démocratisation dans l'accès à la formation. Cependant, ce succès massif du compte personnel de formation (CPF) a également ouvert la porte à des pratiques commerciales agressives voire abusives visant à pousser les individus à acheter des formations contre leur gré. Cela se traduit par des appels, SMS, ou courriels, de la part de centres d'appels ou d'organismes de formation, effectués dans une démarche frauduleuse et véhiculant bien souvent des informations erronées sur les droits de l'individu et, ou, sur l'objet réel poursuivi par l'organisme. Si les fraudes graves telles que l'usurpation d'identité ou le détournement des droits CPF sont peu nombreuses et font l'objet d'un contrôle accru par la Caisse des dépôts et consignations (CDC), le démarchage agressif constitue aujourd'hui une nuisance réelle qui envahit le quotidien des Français. Face à l'augmentation des cas de fraude, la stratégie développée par le Ministère du travail, du plein emploi et de l'insertion avec l'appui de la CDC consiste d'une part à introduire plus de sélectivité et de contrôle des organismes de formation pour leur accès à la plateforme Mon Compte Formation et d'autre part, à se doter d'outils et de moyens pour sécuriser et améliorer le dispositif Mon Compte Formation.  Une meilleure connaissance de la fraude sur le champ de la formation professionnelle permet d'agir plus efficacement aux côtés des services de l'Etat en charge de la lutte contre la fraude comme la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, la mission interministérielle de coordination anti-fraude afin de mettre en place avec une coopération et une synergie commune d'action. La CDC réalise également des contrôles d'éligibilité au financement CPF. Par ailleurs, des mesures contre le démarchage abusif et plus généralement de lutte contre la fraude au CPF ont été inscrites dans une proposition de loi votée à l'unanimité en première lecture à l'Assemblée nationale le 6 octobre 2022. Ces mesures de lutte contre la fraude permettent d'assurer une meilleure maitrise de la dépense en : autorisant les échanges d'informations entre services de l'Etat et les acteurs de la formation professionnelle afin de prévenir et lutter contre la fraude ; permettant à la Caisse des dépôts et consignations de procéder au recouvrement forcé ; vérifiant en continu l'accès des organismes de formation au service dématérialisé Mon compte formation géré par la Caisse des dépôts et consignations via une nouvelle procédure d'enregistrement ; encadrant le recours à la sous-traitance par les organismes de formation. Enfin et depuis le 25 octobre 2022, est mis en place un renforcement de la sécurisation du parcours d'inscription en formation sur Mon Compte Formation (MCF) via France Connect + qui est une version plus sécurisée de France Connect et est destinée à accéder à des démarches plus sensibles (comme la souscription de formation sur MCF). France Connect +, via l'identification numérique de La Poste, propose une authentification renforcée (confirmation de l'opération de souscription à une formation via un code secret sur une application mobile dédiée) permettant ainsi de limiter les risques d'usurpations d'identité. Il n'y a eu aucune interruption d'accès à la plateforme MCF : les titulaires peuvent toujours se connecter et consulter leurs droits, le catalogue, gérer leur inscription ou évaluer leur formation sans identité numérique. En revanche, il leur est impossible de souscrire à une nouvelle formation à partir du 25 octobre 2022 et tant que leur identité numérique n'est pas créée et activée. Ce renforcement de la sécurisation d'accès à la souscription en formation permet d'assurer une meilleure maitrise de la dépense puisque les usurpateurs d'identité ou les démarcheurs abusifs ne peuvent plus inscrire en formation les titulaires de CPF à leur insu.

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