Question de Mme BELRHITI Catherine (Moselle - Les Républicains) publiée le 07/07/2022

Mme Catherine Belrhiti attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur et des outre-mer sur la formation des gendarmes et policiers en matière linguistique.

En cas d'accident impliquant un Allemand et un Français, les gendarmes ou policiers ne sont bien souvent pas en capacité de parler allemand, anglais, espagnol ou italien, ce qui constitue un handicap à une bonne communication dans de telles situations. Au gré des mutations, les personnels se retrouvent dans des départements frontaliers dans lesquels ils n'ont pas les attaches familiales ou scolaires qui auraient pu les conduire à être familiarisés avec les langues étrangères frontalières.

Elle lui demande dans quelle mesure le ministère de l'intérieur et des outre-mer peut faire avancer la formation linguistique des forces de l'ordre, particulièrement utile dans les départements frontaliers.

- page 3284


Réponse du Ministère de l'intérieur et des outre-mer publiée le 09/02/2023

L'importance de la pratique des langues est parfaitement identifiée par les forces de sécurité intérieure afin de permettre au personnel de pouvoir échanger avec les ressortissants étrangers traversant notre territoire notamment. C'est pour cela que la gendarmerie nationale a déployé un programme de formation répondant à quatre objectifs principaux : – maîtriser la langue anglaise ; – acquérir et entretenir les compétences linguistiques utiles pour garantir la sécurité des territoires et la maîtrise des flux ; – entretenir et développer des compétences linguistiques rares ; – faciliter l'intégration du gendarme au sein des structures internationales et dans les opérations extérieures. La gendarmerie met ainsi en œuvre un accompagnement pour répondre aux besoins d'expertise et aux missions spécifiques qu'elle est amenée à assurer. La réalisation de ces objectifs s'appuie sur le centre national de formation aux langues et à l'international de la gendarmerie et sur le département linguistique de l'École des officiers de la gendarmerie nationale, qui relèvent du commandement des écoles de la gendarmerie nationale. Bien que détenir une compétence linguistique ne constitue pas un prérequis pour servir en gendarmerie, cela est considéré comme un atout. Près de 20 % des gendarmes détiennent un niveau linguistique connu et mesuré (selon une étude réalisée en 2018) et pour lesquels l'anglais est la langue la plus maîtrisée, devant l'espagnol, l'allemand, l'italien, le portugais et la langue arabe. La scolarité très dense des élèves gendarmes ne permet cependant pas d'intégrer un module d'enseignement linguistique. Par ailleurs, les élèves gendarmes choisissent leurs affectations au mérite, dans l'ordre du classement et non en fonction d'une compétence rare ou particulière. Devant la nécessité de disposer de personnels rompus aux langues étrangères, une offre de formation existe, développée par le centre national de formation linguistique de la gendarmerie (CNFLIG). Elle s'adresse à tous les militaires de la gendarmerie, particulièrement au profit des militaires affectés en régions frontalières mais également à destination des gendarmes affectés en zones touristiques. Elle propose des stages "unités opérationnelles" mais également, par un enseignement dématérialisé, en Enseignement à distance (EAD), une réappropriation de la langue anglaise (langue internationale la plus utilisée). Le commandement des écoles de la gendarmerie nationale développe des projets de partenariats de formation, sous un angle Erasmus +, visant à proposer une scolarité complète, intégrée et régionale avec les partenaires européens, frontaliers pour la plupart : – le projet Polaris, développé avec l'Espagne, est à cet égard le plus abouti : il vise non seulement à accroître les compétences linguistiques des élèves gendarmes appelés, demain, à rejoindre les unités opérationnelles, mais il a également pour ambition de développer une culture des forces de sécurité européennes ; – l'Unité Opérationnelle Franco-Allemande (UOFA) est une unité de circonstance qui, outre les aspects d'interopérabilité techniques et opérationnels, permet de développer une compétence linguistique professionnelle. Elle contribue à la sécurité des mobilités, en associant la gendarmerie nationale et la police fédérale allemande, au niveau de la frontière entre les deux pays mais également à l'occasion de certains grands événements. Une unité opérationnelle franco–espagnole est en cours de création. Les gendarmes qui composent ces deux unités disposent déjà d'une compétence linguistique. Un vocabulaire technique et opérationnel est développé en formation. Des partenariats à Chaumont avec l'Allemagne et à Tulle avec l'Espagne ont vocation à développer l'aisance linguistique. Au sein de la police nationale, la pratique des langues étrangères s'est également développée pour mieux répondre aux nécessités opérationnelles (lutte contre l'immigration clandestine, accueil des touristes étrangers…) et la formation des fonctionnaires de la police nationale répond à trois objectifs : tester le niveau pour repérer les compétences ; offrir une formation adaptée aux nécessités opérationnelles ; fournir des outils de soutien. Si, à l'instar de la gendarmerie, les langues ne font pas partie intégrante des conditions de recrutement des gardiens de la paix, un questionnaire à choix multiples en langue anglaise a cependant été ajouté aux épreuves du concours externe de gardien de la paix, la maîtrise de l'anglais étant aujourd'hui un réel enjeu professionnel. En formation initiale, depuis janvier 2021, la direction centrale du recrutement et de la formation de la police nationale (DCRFPN) incite les élèves gardiens de la paix à maintenir ou améliorer leur niveau d'anglais en les orientant vers des sites internet. Parallèlement, la DCRFPN va concevoir des modules d'apprentissage à distance, disponibles sur le e-campus de la police nationale. Ces modules viendront compléter ceux conçus pour la police aux frontières (PAF) dans le cadre de la formation adaptée au premier emploi des gardiens de la paix stagiaires (gardes frontières en situation d'aubette et gardes en CRA) et permettront de viser des situations professionnelles précises (accueil, plainte, contrôle d'identité, accident de la circulation routière…). Par ailleurs, à l'approche des grands événements de 2023 et 2024, les modules d'adaptation au premier emploi de fin de scolarité évolueront et intégreront des situations spécifiques pour répondre aux besoins opérationnels. L'anglais sera privilégié, mais d'autres langues pourraient compléter l'offre. En formation continue, l'offre est également variée. Elle concerne l'anglais, l'allemand, l'italien, l'espagnol et l'arabe. Les stages sont dispensés à la direction centrale du recrutement et de la formation de la police nationale (site de Clermont-Ferrand) et couvrent les niveaux de A2 à C. En langue arabe, l'initiation à l'arabe littéral permet d'apprendre l'écriture. Les formateurs de la DCRFPN se déplacent régulièrement sur les sites d'affectation des stagiaires pour des actions de formation, particulièrement en zone frontalière (centres de coopération policière et douanière, directions interrégionales de la police aux frontières…). Pour parfaire leur formation et ajouter à l'aspect linguistique la connaissance du système policier du pays partenaire, les fonctionnaires de la police nationale ont également à leur disposition des programmes d'échanges avec l'Allemagne, l'Espagne et l'Italie. Une réflexion est en cours afin d'élaborer les instruments les mieux adaptés à la gestion de manifestations de grande ampleur (Coupe du monde de rugby, Jeux Olympiques…). Dans ce cadre, tous les agents du ministère de l'Intérieur et des Outre-mer ont la possibilité, en 2022, de se soumettre à des tests « certifiants » de leur niveau sur l'échelle européenne. Des formations par niveau seront alors proposées. Pour réaliser ces tests de niveau, la police nationale mobilise deux outils. En premier lieu, la certification en langues étrangères de la police nationale dénommée « Lango », application qui permet d'évaluer le niveau CECR (Cadre Européen Commun de Référence pour les Langues). En second lieu, l'examen de langues de la police nationale qui permet d'identifier les fonctionnaires pratiquant une langue rare. Enfin, la police nationale complète son offre de formation en développant divers outils : des guides et lexiques dans différentes langues, dans des versions traditionnelles, mais également sur l'intranet, et bientôt sous forme d'applications informatiques dédiées à l'entraînement aux langues. Afin de répondre efficacement aux enjeux, la police nationale développe un réseau de formateurs internes occasionnels en anglais qui, à leur tour, délivreront des formations sur tout le territoire. Au sein de la DCRFPN, la section langues étrangères est composée de professeurs certifiés ou contractuels et de policiers. Cette mixité est un atout dans la compréhension des besoins opérationnels et dans la connaissance des systèmes policiers étrangers, enjeu de coopération internationale. S'agissant des corps de commissaires et d'officiers de police, les concours d'accès (mais pas la voie d'accès professionnelle) prévoient des épreuves de langues affectées d'un coefficient souvent conséquent. En formation initiale, tous les élèves officiers et commissaires de police passent un test de positionnement linguistique à l'entrée à l'École nationale supérieure de la police (ENSP). Le résultat positionne l'élève sur un niveau de langue (A1 à C1) et détermine son groupe/niveau d'appartenance en formation. La formation suivie à l'ENSP s'exécute intégralement à distance et uniquement en anglais via le recours à un prestataire spécialisé. La durée d'apprentissage est libre, sachant que la licence est souscrite pour six mois. À l'issue, les élèves passent une épreuve orale notée qui compte dans le classement de fin de scolarité à raison de 20 points (sur 460) (coefficient 1) pour les officiers de police et de 20 points (sur 480) (coefficient 0,5) pour les commissaires. Sur le plan des formations préparatoires, partenariales et internationales,  l'ENSP contribue à la politique linguistique de la police nationale en permettant aux commissaires et aux officiers en formation initiale d'acquérir et d'améliorer leurs acquis en matière linguistique. Le département des formations préparatoires, partenariales et internationales de l'ENSP valorise et facilite les échanges interculturels des commissaires et des officiers en formation initiale en organisant des voyages d'études des promotions au sein d'académies de police étrangères jumelées à l'établissement et en accueillant sur chacun de ses deux sites (Saint-Cyr-au-Mont-d'Or et Cannes-Ecluse) des délégations d'académies étrangères. Des voyages d'études sont également organisés au profit des commissaires stagiaires et des élèves officiers, favorisant l'acculturation des cadres de police dans un environnement multiculturel et multi linguistique.

- page 1002

Page mise à jour le