Question de Mme SCHALCK Elsa (Bas-Rhin - Les Républicains) publiée le 07/07/2022

Mme Elsa Schalck interroge M. le ministre de l'intérieur et des outre-mer au sujet de la législation sur les forêts cinéraires. Une forêt cinéraire est un site d'inhumation d'urnes funéraires biodégradables. Elle permet de vivre le deuil différemment, en offrant des lieux de mémoire et de recueillement en pleine nature. Elle offre une alternative plus économique aux familles des défunts. Elle prend également en compte le peu de place existant dans les cimetières classiques. Enfin, elle préserve l'authenticité du biotope forestier en garantissant des revenus partagés, permettant de garantir la non-exploitation sylvicole. Comme dans un cimetière, chaque arbre devient une concession pérenne. Cette nouvelle forme d'inhumation intéresse de plus en plus de communes, notamment dans le Bas-Rhin et en Alsace. Cette alternative moderne et écologique à l'offre funéraire existante, développée dans les pays européens voisins à l'instar de l'Allemagne, de la Suisse et du Luxembourg, répond à un réel besoin des collectivités, des familles et de sauvegarde des milieux naturels. À ce jour, la commune d'Arbas, en Haute-Garonne, est la première commune en France à abriter une forêt cinéraire où l'on peut réserver un emplacement et inhumer les cendres de défunts, contenues dans une urne biodégradable. Or en raison d'un blocage administratif dû à des contradictions au sein même des services de l'État, ce projet de forêt cinéraire a été suspendu alors même que de nombreuses familles souhaitent pouvoir en bénéficier. Il est aujourd'hui essentiel d'accompagner l'engagement des élus dans l'évolution de cette législation. Ainsi, elle souhaiterait savoir ce que le Gouvernement entend faire pour lever les obstacles administratifs à la mise en œuvre de ces sites afin de permettre la création de forêts cinéraires dans notre pays.

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Réponse du Secrétariat d'État auprès du ministre de l'intérieur et des outre-mer, chargé de la citoyenneté publiée le 14/12/2022

Réponse apportée en séance publique le 13/12/2022

M. le président. La parole est à Mme Elsa Schalck, auteure de la question n° 021, adressée à M. le ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Mme Elsa Schalck. Madame la secrétaire d'État, je souhaiterais vous interroger sur une évolution de société qu'appellent de leurs vœux de plus en plus de nos concitoyens et d'élus : pouvoir faire de la forêt sa dernière demeure.

Une forêt cinéraire est définie comme un site d'inhumation d'urnes funéraires biodégradables. Elle permet de vivre le deuil différemment, en offrant des lieux de mémoire et de recueillement en pleine nature, qui sont aussi pour les familles des défunts une alternative plus économique et écologique que les cimetières classiques. Cette approche prend également en compte le manque de places dans ces derniers. Comme dans un cimetière, chaque arbre d'une telle forêt devient une concession pérenne.

Les forêts cinéraires existent dans des pays européens voisins, à l'instar de la Suisse, du Luxembourg et de l'Allemagne, où la première forêt cinéraire a été inaugurée il y a déjà vingt et un ans et où l'on en recense actuellement une centaine.

Malheureusement, dans notre pays, la réglementation peut être bloquante, comme a pu nous le montrer l'exemple de la commune d'Arbas, en Haute-Garonne, dont le projet a été arrêté en raison de blocages administratifs dus à des contradictions au sein des services de l'État.

Ces contradictions résultent d'incompatibilités avec le droit funéraire en vigueur : en France, disperser les cendres d'un défunt en pleine nature est autorisé, mais l'opération doit être gratuite. En outre, une urne inhumée doit permettre la conservation des cendres, ce qui interdit en l'état les urnes biodégradables.

En Alsace, les communes sont de plus en plus nombreuses à vouloir disposer d'une forêt cinéraire et trouvent, à cette fin, d'autres solutions. C'est le cas de la commune de Muttersholtz, dans le Bas-Rhin, qui a décidé d'implanter une telle forêt grâce à des urnes fabriquées avec des matériaux naturels, comme le bois ou la pierre.

La commune d'Illkirch-Graffenstaden en fera de même sous peu en créant un jardin des souvenirs, qui permettra d'allier nature et lieu de mémoire.

Madame la secrétaire d'État, comment comptez-vous accompagner les communes qui s'engagent dans un projet de forêt cinéraire ? Envisagez-vous de préciser le cadre juridique pour de tels aménagements ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Sonia Backès, secrétaire d'État auprès du ministre de l'intérieur et des outre-mer, chargée de la citoyenneté. Madame la sénatrice Schalck, les projets de forêt cinéraire constituent des sites cinéraires dits « isolés », car ils sont situés hors d'un cimetière et ne sont pas contigus à un crématorium. La création et la gestion de ces sites reviennent exclusivement aux communes et aux établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre.

Les projets que vous évoquez ne peuvent être mis en œuvre car ils sont incompatibles avec le droit funéraire en vigueur. En effet, l'inhumation d'une urne biodégradable dans ce type de site, après réservation d'un emplacement, revient à faire payer aux familles des prestations qui doivent être gratuites.

En l'état actuel du droit, la dispersion des cendres à l'issue de la crémation est notamment autorisée « en pleine nature ». Cette opération, qui peut par exemple s'effectuer au sein d'un espace naturel forestier, est gratuite, mais ne peut donner lieu à la matérialisation d'une sépulture.

Le Gouvernement reste toutefois attentif à cette situation et aux attentes des élus locaux souhaitant s'engager dans ces projets. Afin de les accompagner, les services de l'État demeurent à la disposition des collectivités qui souhaitent, dans le respect du droit en vigueur et en veillant à la protection des intérêts des familles et de la dignité des défunts, créer un site cinéraire isolé, à l'esthétique et au fonctionnement plus écologiques que les cimetières et les sites cinéraires traditionnels.

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