Question de M. REQUIER Jean-Claude (Lot - RDSE) publiée le 07/07/2022

M. Jean-Claude Requier attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice sur les mesures permettant de lutter contre le vol de ruches.
La surmortalité des abeilles, qui cause déjà un préjudice évident aux apiculteurs, semble entretenir un trafic délictueux et l'on constate une augmentation des vols de ruches.
Engager les éleveurs d'abeilles à s'assurer contre le vol et à équiper les ruches de matériels de traçage ou de vidéosurveillance n'est pas satisfaisant car cela implique des dépenses onéreuses, et les apiculteurs professionnels comme amateurs sont découragés. Pour leur part, ils demandent une aggravation des dispositions pénales actuelles qu'ils ne jugent pas suffisamment dissuasives, et notamment l'introduction d'un montant d'indemnisation de 1000 € par ruche volée.
Il lui demande dans quelle mesure l'efficacité du dispositif pénal pourrait être amélioré afin de lutter contre ce fléau, et s'il entend donner des instructions et définir des modalités de contrôle et d'enquête suffisamment opérants pour lutter contre ces faits.

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Réponse du Ministère de la justice publiée le 26/01/2023

Les atteintes aux biens au sein du milieu agricole constituent une préoccupation majeure des professions du secteur primaire. Le phénomène des vols de ruches présente une sensibilité toute particulière, au regard du double préjudice subi par les exploitations apicoles. En effet, non seulement les apiculteurs concernés souffrent de la soustraction frauduleuse de leur outil de production et de leur matériel d'élevage, mais ils font également face à la perte de production de miels consécutive à ces vols. Le coût en hausse des essaims et les épisodes de mortalité plus fréquents offrent aux délinquants des motivations supplémentaires, en particulier dans des zones isolées où leur action est facilitée par la rareté des témoins. Le vol de ruches, comme tout vol, est puni, aux termes de l'article 313-1 du code pénal, d'une peine de 3 ans d'emprisonnement et 45 000 euros d'amende. Les circonstances de sa commission (vol commis en réunion, avec dégradations ou en pénétrant par effraction ou par ruse dans un local destiné à l'entrepôt de marchandises ou matériels), permettent d'aggraver les peines encourues à 5, 7 ou 10 ans d'emprisonnement et 75 000, 100 000 ou 150 000 euros d'amende en fonction du nombre de circonstances aggravantes relevées (1, 2 ou 3). En outre, il convient de relever que si les faits s'inscrivent dans le cadre d'un réseau criminel organisé spécialisé notamment dans le trafic de ruches, ils sont susceptibles de recevoir la qualification criminelle de vol en bande organisée et faire encourir à leurs auteurs 15 ans de réclusion criminelle et 150 000 euros d'amende. Le législateur a également prévu des peines complémentaires applicables aux auteurs de vols, notamment l'interdiction de gérer ou d'exercer une activité professionnelle en lien avec l'infraction (apiculteur) ou la confiscation du produit de l'infraction. Les juridictions disposent ainsi d'un arsenal législatif qui apparait suffisant pour répondre par des peines proportionnées à la gravité de l'infraction. S'agissant de l'octroi, dans le cadre de l'action civile, d'un plafond minimum de dommages-intérêts, à hauteur de 1000 euros par ruche, il convient de relever qu'une telle disposition porterait atteinte au principe de réparation intégrale du préjudice subi et au principe selon lequel le juge ne peut, sur l'action civile, statuer ultra petita. Le ministère de la justice est pleinement engagé dans la lutte contre ces agissements contre le monde agricole qui font l'objet de la plus grande attention des procureurs de la République diligentant systématiquement des enquêtes pénales aux fins d'en identifier les auteurs et de les présenter à une juridiction. Par ailleurs, a été mise en place en octobre 2019 une cellule nationale de suivi des atteintes au monde agricole nommée Déméter à la direction générale de la gendarmerie nationale pour notamment gérer, identifier et poursuivre les auteurs d'intrusions, d'atteintes aux biens ou d'agressions chez des agriculteurs. Fruit de ces efforts, la baisse des atteintes aux biens en milieu agricole constatée en 2020 (baisse 16 % entre 2019 et 2020) s'est poursuivie en 2021, avec une régression de 14 % de ce type de délinquance durant les neuf premiers mois de l'année au regard de la même période de l'année précédente (source Service central de renseignement criminel et cellule Déméter de la DGGN, 2021).

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