Question de M. LAURENT Daniel (Charente-Maritime - Les Républicains) publiée le 07/07/2022

M. Daniel Laurent attire l'attention de M. le ministre de la santé et de la prévention sur les préoccupations des ordonnateurs-comptables du secteur hospitalier concernant l'article 168 de la loi n° 2021-1900 du 30 décembre 2021 de finances pour 2022, qui prévoit la création d'un « régime juridictionnel unifié de responsabilité des gestionnaires publics et des gestionnaires des organismes relevant du code de la sécurité sociale » placée sous l'autorité de la Cour des comptes. Ils souhaitent interpeller le Gouvernement sur le caractère potentiellement inopérant de cet article, sur les risques de dysfonctionnements qu'il induit et sur les conséquences au regard des règles actuelles de fonctionnement des établissements publics de santé qu'il fait courir aux décideurs hospitaliers. Le manque de personnel et d'attractivité dans les territoires sous-denses conduit les chefs d'établissement à recourir à l'intérim médical et aux contrats de gré à gré dépassant le plafond prévu par les textes pour maintenir une continuité de soins et d'accueil des patients. Cette disposition pourrait donc avoir des incidences sur l'offre de soins dans ces territoires. En effet, on peut parfaitement comprendre que les ordonnateurs seront plus rétifs à engager des dépenses non réglementaires sur le plan comptable, mais indispensables sur le plan sanitaire. L'exemple de l'applicabilité de l'article 33 de la loi n° 2021-502 du 26 avril 2021 du 26 avril 2021 « visant à améliorer le système de santé par la confiance et la simplification » portant sur l'intérim médical illustre pleinement les difficultés à venir, les chefs d'établissement étant placés dans des situations intenables. Les ordonnateurs-comptables du secteur hospitalier demandent qu'une telle mesure prévue dans la loi de finances soit assortie tant de schémas territoriaux clairs de la permanence des soins que des règles de pilotage des établissements publics de santé encore assouplies ou différentes. Par ailleurs, l'application d'un tel article nécessite des refontes organisationnelles de contrôle interne des établissements publics de santé, soulignant sur ce point que tous les établissements ne sont pas certifiés sur le plan comptable et n'ont pas dans ce cadre de commissaire aux comptes. De même, l'élargissement du champ des délégations de signature aux médecins, notamment chefs de pôle, impliquerait en droit leur pleine intégration au nouveau régime de responsabilité comptable. Ils souhaitent également mettre en exergue le risque majeur de rupture du principe d'égalité entre gestionnaires. Par ailleurs, l'assurabilité du risque, à l'instar du régime existant pour les comptables publics, devra également être prise en compte dans la production normative à venir. En conséquence, il lui demande quelles sont les propositions du Gouvernement en la matière.

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Réponse du Ministère de la santé et de la prévention publiée le 12/01/2023

La mise en place d'un régime unifié de responsabilité des ordonnateurs et des comptables induit peu de modifications du régime de responsabilité des ordonnateurs, voire adapte le risque auquel ils pouvaient être exposés devant la Cour de discipline budgétaire et financière. Cette réforme est distincte de la loi Rist plafonnant la rémunération des praticiens intervenant dans le cadre de remplacement. La loi Rist prévoit le blocage immédiat des rémunérations dépassant un plafond règlementaire. Ainsi, l'ordonnateur ne devrait pas être en mesure de la réaliser. La mise en place d'un régime unifié de responsabilité des ordonnateurs et des comptables permet une réforme de l'ensemble des ordonnateurs, ce qui peut, dans des cas limités concerner les praticiens hospitaliers. Les praticiens peuvent être amenés, dans le cadre de délégation de gestion à prendre des décisions relatives à la dépense de leurs établissements. Cela ne signifie pas nécessairement qu'ils sont en capacité d'ordonner la dépense publique, or ces derniers ne peuvent être responsables au sens de l'ordonnance que dans le cas où ils ordonnent directement la dépense. Il convient alors de prendre en compte que seules les "fautes graves ayant causé un préjudice financier significatif" pourraient engager leur responsabilité. Ces fautes vont bien au-delà d'une simple méconnaissance des règles financières publiques. En outre, il paraît difficile de dégager toute responsabilité des personnes ayant un pouvoir d'usage sur les deniers publics.  Il convient enfin de préciser que, si la certification permet aux établissements de travailler sur les processus de contrôle interne, elle ne peut protéger intégralement les établissements des infractions définies par l'ordonnance en soi. Par ailleurs, les établissements non certifiés sont amenés à fiabiliser leurs comptes afin de mettre en place un contrôle interne suffisant au sein de leurs établissements. En outre, de nombreux établissements non certifiés sont rattachés à des établissements supports certifiés pouvant les accompagner dans des démarches de fiabilisation des comptes et de leur contrôle interne.  Enfin, là où un ordonnateur pouvait être sanctionné pour une amende allant jusqu'à un an de traitement, le plafond est abaissé à six mois de traitement. Ainsi, comme le régime précédent, ce changement n'amène pas à considérer une assurabilité du risque pour les ordonnateurs.

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