Question de M. CHAIZE Patrick (Ain - Les Républicains) publiée le 07/07/2022

M. Patrick Chaize appelle l'attention de M. le ministre de la transformation et de la fonction publiques sur la situation des fonctionnaires employés par les offices publics de l'habitat (OPH) qui font le choix de se transformer en société coopérative d'intérêt collectif (SCIC).
La loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (loi ELAN) fixe aux organismes de logement social une obligation de gestion de 12.000 logements sociaux ou d'appartenance à un groupe gérant en cumulé 12.000 logements.
Depuis l'adoption de cette loi, le secteur du logement social s'est engagé dans une dynamique de regroupement, recouvrant des situations juridiques différentes : fusion capitalistique autour d'une société « tête de file » ou création de société anonyme de coordination comme prévu à l'article L. 423-1-2 du code de la construction et de l'habitation.
Certains OPH ont choisi de se transformer en société coopérative d'intérêt collectif (SCIC) afin de pouvoir s'associer avec d'autres bailleurs sociaux sans pour autant fusionner dans une seule et même entité juridique.
Cette transformation en SCIC, société anonyme relevant du droit privé, soulève une difficulté quant aux fonctionnaires employés par les OPH.
L'article L. 411-2-1 du code de la construction et de l'habitation prévoit qu'un OPH puisse transmettre son patrimoine à un ou plusieurs organismes de logement social mentionnés aux deuxième à quatrième alinéas de l'article L. 411-2 et à l'article L. 481-1 dont une SCIC. Pour autant, il n'a pas été, a priori, prévu de dispositif spécifique s'agissant du sort du personnel fonctionnaire employé par l'OPH.
Ainsi, aucune disposition déjà existante notamment au sein du code du travail ou issue de la loi ELAN ne permet d'envisager concrètement le sort des fonctionnaires dans cette hypothèse comme cela a pu être prévu par le passé à l'occasion de la transformation des offices publics d'habitations à loyer modéré (OPHLM) et des offices publics d'aménagement et de construction (OPAC) en OPH.
L'une des solutions envisagées est que les fonctionnaires employés par l'OPH soient détachés auprès de la SCIC. Or, cette solution ne peut être que provisoire puisque la durée maximale d'un détachement est de cinq ans, durée qui peut être renouvelée mais à titre exceptionnel et qui entraîne un sentiment d'insécurité chez les fonctionnaires.
Il peut être également envisagé la mise à disposition des fonctionnaires auprès de la SCIC mais il y a lieu de s'interroger sur l'applicabilité de cette disposition en cas d'actionnariat mineur de la part des collectivités territoriales. En effet, est-il possible de considérer qu'en application de l'article 61-1 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, une SCIC est bien un « organisme(s) contribuant à la mise en œuvre d'une politique de l'État, des collectivités territoriales ou de leurs établissements publics administratifs, pour l'exercice des seules missions de service public confiées à ces organismes (…) ».
De plus, d'un point de vue très pratique, en cas de détachement ou de mise à disposition, se pose la question de la détermination de l'administration d'origine. L'OPH qui se transforme en SCIC est effectivement appelé à disparaître. Or, un fonctionnaire ne peut être détaché ou mis à disposition que d'une administration d'origine vers un organisme d'accueil.
Suivant ces éléments, il lui demande de lui préciser en cas de disparition d'une OPH, administration d'origine, à quelle administration le fonctionnaire est finalement rattaché et quelles sont les modalités de détachement ou de mise à disposition au sein de la SCIC.

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Réponse du Ministère de la transformation et de la fonction publiques publiée le 20/10/2022

Aux termes de l'article L. 421-1 du code de la construction et de l'habitation (CCH), les offices publics de l'habitat (OPH) sont des établissements publics industriels et commerciaux (EPIC). Les agents de ces établissements sont soumis à un régime de droit privé, à l'exception du directeur du service, considéré comme un agent de droit public et du comptable public. Toutefois, conformément aux dispositions de l'article 120 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, les fonctionnaires territoriaux affectés dans les OPH ont pu opter pour la conservation de leur statut, lorsque ces établissements ont été transformés en EPIC. Les dispositions des articles L. 423-2 et L. 421-6 du CCH, dans leur rédaction issue de la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique ont imposé au 1er janvier 2021, d'une part, l'adhésion des organismes d'habitations à loyer modéré gérant chacun moins de 12 000 logements sociaux à un groupe d'organismes de logement social et, d'autre part, la fusion des OPH rattachés à une même collectivité et gérant moins de 12 000 logements. Le II de l'article L. 411-2-1 du CCH prévoit qu'un OPH peut, par voie de fusion ou de scission, transmettre son patrimoine notamment à une société anonyme coopérative d'intérêt collectif d'habitations à loyer modéré (SCIC). Dans ce cadre, une opération de "fusion-absorption" d'OPH peut aboutir à la création d'une société coopérative d'intérêt collectif (article L. 422-3 du CCH), société relevant du droit privé. L'article L. 411-2-1 du CCH ne prévoit pas de disposition particulière en matière de personnels. Les salariés de droit privé de l'OPH sont automatiquement repris par la nouvelle entité conformément aux dispositions de l'article L. 1224-1 du code du travail, lequel prévoit que « lorsque survient une modification dans la situation juridique de l'employeur, notamment par […] fusion, […], tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise. ». Les fonctionnaires de l'OPH doivent, quant à eux, être repris par la collectivité territoriale ou l'établissement public de rattachement, qui doit créer les emplois correspondants conformément aux dispositions de l'article L. 313-1 du code général de la fonction publique. À l'issue, des détachements et des mises à disposition auprès de la SCIC nouvellement créée peuvent intervenir. S'agissant plus particulièrement de la mise à disposition du fonctionnaire, aux termes du 4° de l'article L. 512-8 du code général de la fonction publique, celle-ci est possible auprès « des organismes contribuant à la mise en œuvre d'une politique de l'État, des collectivités territoriales ou de leurs établissements publics administratifs, pour l'exercice des seules missions de service public confiées à ces organismes ». Cette notion a été précisée par la circulaire n° 2167 du 5 août 2008 relative à la réforme du régime de la mise à disposition des fonctionnaires de l'État. Sont ici visés les organismes de droit public ou de droit privé exerçant des missions pour le compte ou en rapport avec une politique publique conduite par l'État, les collectivités territoriales ou leurs établissements publics administratifs. Ainsi, la légalité d'une mise à disposition en dehors de la sphère administrative est appréciée au regard du domaine d'activité de l'organisme d'accueil, non de sa nature juridique. Que les collectivités territoriales soient minoritaires au sein de l'actionnariat d'une société privée est, à cet égard, sans incidence. Par conséquent, le fonctionnaire peut être mis à disposition d'une société privée dès lors qu'elle accomplit une ou plusieurs missions de service public, en lien direct avec les pouvoirs publics et que les missions confiées au fonctionnaire s'inscrivent dans le cadre des activités liées au service public. La mise à disposition auprès de la SCIC nouvellement créée ne peut intervenir qu'avec l'accord des agents. En cas de refus de leur part, il appartiendra à la collectivité territoriale ou à l'établissement public de rattachement de leur confier de nouvelles missions ou de mettre en œuvre la procédure de suppression d'emploi prévue par les articles L. 542-1 et suivants du code général de la fonction publique.

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