Question de M. MEURANT Sébastien (Val-d'Oise - Les Républicains) publiée le 14/07/2022

M. Sébastien Meurant interroge M. le ministre de la santé et de la prévention au sujet du monopole de l'oxygène médical produit par cryodistillation.
La crise du covid-19 a démultiplié les besoins en oxygène à usage médical des hôpitaux et cliniques en France. La pharmacopée européenne – ouvrage de référence en matière de contrôle de qualité des médicaments au sein des pays signataires dont fait partie la France – comprend deux monographies sur l'oxygène : oxygène (0417) et oxygène à 93 % (2455), définissant les caractéristiques qualitatives et quantitatives de l'oxygène en vue d'assurer une qualité optimale compatible avec les exigences de santé publique.
Si la monographie oxygène (0417) a été introduite dans la pharmacopée européenne depuis plus d'un demi-siècle, elle l'a été à une époque où n'existait qu'une seule méthode de production d'oxygène : la cryodistillation. Depuis, la monographie oxygène 93 (2455) a introduit la possibilité de produire l'oxygène médical directement sur site au moyen de générateurs permettant la séparation des constituants de l'air.
Dans le même temps, les méthodes de production mentionnées dans la monographie oxygène (0417) n'ont cessé d'être restreintes, révisions après révisions pour ne laisser la place aujourd'hui qu'à une seule méthode de production : la cryodistillation qui consiste à stocker des quantités d'oxygène liquide dont la teneur en oxygène est supérieure ou égale à 99,5 %, éliminant de facto la possibilité d'utiliser des générateurs d'oxygène pour produire de l'oxygène aussi à cette teneur.
Si l'oxygène liquide a pour avantage de fournir 850 litres d'oxygène gazeux pour seulement 1 litre d'oxygène liquide, cette solution n'est pas dénuée de risques notamment le risque d'explosion lié à la réactivité comburante de l'oxygène. Équiper un hôpital avec cette solution nécessite de l'espace de stockage et un approvisionnement régulier en oxygène par livraison routière génératrice de pollution.
De l'autre côté l'installation d'un générateur d'oxygène est une solution plus économe permettant à l'hôpital de subvenir à ses besoins en oxygène en prélevant l'air ambiant comme matière première. Les risques d'explosion sont réduits car l'oxygène est produit et consommé à la demande, enfin les coûts de transport sont inexistants. De plus, dans un contexte de pandémie, le risque de rupture d'approvisionnement est inexistant. Le principal inconvénient est le besoin en électricité du générateur pour fonctionner, sans oublier la maintenance régulière.
Notre pays possède de grandes entreprises mais aussi des petites et moyennes entreprises (PME) qui proposent ces deux types de solutions aux établissements de santé français. Rien ne semble s'opposer en termes de qualité de gaz produit et de sécurité à ce que les générateurs d'oxygène se démocratisent aux côtés de l'oxygène produit par cryodistillation. Toutefois, force est de constater que les fabricants utilisant cette technologie peinent à se positionner sur le marché français face au quasi-monopole détenu par les multinationales proposant l'oxygène d'origine cryogénique.
Il lui demande combien d'hôpitaux publics en France sont équipés de générateurs d'oxygène. Il souhaite aussi connaître les raisons pour lesquelles les procédures de marché publics hospitaliers exigent, dans une écrasante majorité, la fourniture d'oxygène « liquide », excluant, de fait, la possibilité d'y répondre en proposant une production d'oxygène sur site par générateur.

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Réponse du Ministère de la santé et de la prévention publiée le 01/12/2022

Depuis plus d'une dizaine d'années, le cadre règlementaire national a évolué pour permettre le recours à des concentrateurs d'oxygène en milieu hospitalier. En effet, les recommandations d'utilisation, élaborées par l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) en 2009, précisent le cadre technique pour les établissements de santé qui souhaitent mettre en œuvre un système d'approvisionnement en oxygène par générateurs d'oxygène. Elles définissent les exigences d'installation et d'exploitation, mais également les exigences en termes de suivi du gaz. Depuis 2011, la pharmacopée européenne s'est dotée d'une monographie Oxygène 93% afin de donner un statut pharmaceutique à l'oxygène produit par concentrateurs dans les établissements de santé qui contrairement à l'oxygène produit par cryodistillation, ne dispose pas d'autorisation de mise sur le marché (AMM). Les concentrateurs d'oxygène ont un statut de dispositif médical et doivent disposer au titre de la directive 93/42/CEE du marquage CE pour être mis sur le marché en France. Lors du recours à un générateur, la production et la distribution de l'oxygène 93% sont placées sous la responsabilité du pharmacien gérant de la pharmacie à usage intérieur de l'établissement de santé qui est donc responsable de l'ensemble du processus de contrôle et de la qualité de l'oxygène produit. Il est recensé environ une dizaine d'établissements de santé hospitaliers sur le territoire qui ont recours à une source de production autonome en oxygène 93 %. Parmi ces établissements, certains ont conservé une source d'oxygène liquide. Il s'agit essentiellement d'établissements de santé situés sur des territoires ultramarins pour leur permettre de pallier les difficultés d'acheminement logistique d'oxygène liquide notamment en cas d'aléas climatiques. Il convient de préciser que les générateurs de production autonome sont prévus pour délivrer un débit constant et qu'ils ne peuvent pas répondre à une augmentation brutale des consommations telles que celles rencontrées pendant la crise épidémique Covid-19.  Néanmoins, il convient de rappeler que l'oxygène liquide médical 99,5% a un statut de médicament et dispose d'une AMM. Sa production est donc assurée dans le respect des bonnes pratiques de fabrication par les établissements pharmaceutiques autorisés et sous la responsabilité du pharmacien responsable. Il est recensé sur le territoire national 15 établissements pharmaceutiques assurant la production d'oxygène liquide. Lors des différentes vagues épidémiques de Covid-19 en 2020, 2021 et début 2022, ces installations ont supporté de très fortes augmentations de consommations en oxygène liquide. En effet, la consommation du secteur médical a augmenté de 30 % en moyenne, avec des pics de l'ordre de 400 à 500 %. Cette modalité de production, si elle reste dépendante d'un fournisseur, a démontré qu'elle avait la capacité de répondre à de forte variation de la demande.

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