Question de Mme GRÉAUME Michelle (Nord - CRCE) publiée le 14/07/2022

Mme Michelle Gréaume attire l'attention de Mme la ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur la situation au Tigré.
Le Tigré est depuis novembre 2020 le théâtre d'un conflit sanglant entre le gouvernement fédéral éthiopien et le front de libération du peuple du Tigré (TPLF). Une véritable catastrophe humanitaire se déroule loin des feux de l'actualité dans ce territoire coupé du monde. Dans de récents rapports, Amnesty International et Human Rights Watch ont confirmé les exactions et massacres commis contre les populations civiles par les différents belligérants. Ils accusent également les milices alliées au Gouvernement d'Addis-Abeba de crimes de guerre et de possibles crimes contre l'humanité sur fond de nettoyage ethnique. Cette guerre civile a également aggravé la situation alimentaire de cette région parmi les plus pauvres du monde. Le programme alimentaire mondial (PAM) estime que 4,6 millions de personnes sur une population de 6 millions d'habitants souffrent d'insécurité alimentaire dont 2 millions de pénurie alimentaire extrême. La reprise de convois humanitaires depuis avril, aussi salutaire soit-elle, reste notoirement insuffisante pour répondre aux besoins des populations. L'enlisement de ce conflit avec le risque de déstabilisation de toute la corne de l'Afrique, l'urgence à venir en aide aux populations et à mettre fin aux crimes perpétrés nécessiteraient une réaction internationale d'une tout autre ampleur.
En conséquence elle lui demande de bien vouloir lui préciser le rôle exercé par la France en ce sens, afin de mettre fin au conflit, assurer la protection des populations civiles, déployer toute l'aide humanitaire, enquêter et traduire devant la justice les responsables des crimes de guerre.

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Réponse du Ministère de l'Europe et des affaires étrangères publiée le 29/12/2022

Après deux ans de conflit au nord de l'Ethiopie, l'accord de Pretoria, conclu le 2 novembre sous l'égide de l'Union africaine par le gouvernement fédéral et le front de libération du Tigré, a permis d'aboutir à la déclaration d'une cessation des hostilités. Il s'agit d'une première étape importante en vue de la résolution de cette crise. La situation humanitaire causée par ce conflit est dramatique, avec des conséquences graves pour les populations civiles dans les trois régions affectées par les combats, le Tigré, l'Afar et l'Amhara. Face à cette situation, la France et l'Union européenne (UE) se sont mobilisées pour obtenir l'accès de l'aide humanitaire aux populations et une réponse à la hauteur des besoins. En 2022, la France est le 7e bailleur humanitaire en Ethiopie avec près de 17 millions d'euros pour répondre à la situation qui découle du conflit, mais également pour apporter un soutien aux régions affectées par les sécheresses. L'Union européenne est de son côté le 2e bailleur humanitaire en Ethiopie, derrière les Etats-Unis. Ce conflit a également donné lieu à des exactions massives. Le rapport conjoint publié par la Commission éthiopienne des droits de l'Homme et le Haut-Commissariat des Nations unies pour les droits de l'Homme (HCDH) le 3 novembre 2021 avait conclu qu'un faisceau d'éléments permettait d'estimer que toutes les parties au conflit avaient commis des violations du droit international des droits de l'homme, du droit international humanitaire et du droit international des réfugiés, dont certaines pouvaient constituer des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité. Le rapport publié le 19 septembre par la Commission internationale d'experts des droits de l'Homme, établie par le Conseil des droits de l'Homme à Genève avec le soutien de la France et de l'UE, arrive aux mêmes conclusions sur la gravité des exactions commises. L'accord de Pretoria prévoit la mise en place d'un mécanisme de justice transitionnelle visant l'établissement de la vérité, la réparation et la réconciliation. Il est désormais primordial que ce processus soit mis en œuvre afin d'assurer la prise en compte des victimes et la lutte contre l'impunité. La France, qui a condamné les atteintes aux droits humains, est prête à soutenir ce processus avec ses partenaires européens. La France est très attachée à la souveraineté, à l'intégrité territoriale et à l'unité de l'Ethiopie. Afin de les préserver et de soutenir l'accord de Pretoria du 2 novembre, la France restera mobilisée en soutien de la médiation de l'Union africaine et active à New York, à Genève et à Bruxelles afin que l'ONU et l'UE demeurent saisies de la question et pèsent de tout leur poids vers la restauration de la stabilité et de la prospérité en Ethiopie, et de la paix dans la région.

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