Question de Mme DURANTON Nicole (Eure - RDPI) publiée le 14/07/2022

Mme Nicole Duranton attire l'attention de M. le ministre de la santé et de la prévention sur la fragilisation du maillage territorial des soins de santé de proximité par la suppression de mesures incitatives, notamment dans les déserts médicaux.

À l'échelle nationale, 8 % de la population réside dans une commune sous-dense en médecins généralistes, au sens d'une accessibilité inférieure à 2,5 consultations par an et par habitant. Localement, l'Eure compte par exemple 167 médecins pour 100 000 habitants, ce qui représente en moyenne 598 patients par professionnel.

Au-delà des politiques publiques contraignantes pouvant être envisagées pour pallier ces difficultés, il est fondamental de créer l'attractivité sur ces territoires par des mesures incitatives. Plusieurs existent d'ores et déjà ; ainsi, l'exonération fiscale d'imposition sur le revenu prise en application de l'article 108 de la loi n° 2005-157 du 23 février 2005 relative au développement des territoires ruraux, l'aide à l'installation des étudiants, ainsi que l'aide au remplacement contribuent à un système de mesures utiles pour résorber l'étendue des territoires souvent qualifiés de « déserts médicaux ».

Pour autant, les critères actuels de l'aide au regroupement semblent aller dans un sens contraire à la répartition territoriale, pour offrir un service plus efficace et performant aux patients.

Bien que les maisons de santé pluriprofessionnelles (MSP) soient passées de 929 en 2014 à 1244 en 2017, il n'en demeure pas moins que 40% environ des 36 500 cabinets médicaux français sont unipersonnels, et cette proportion ne peut être ignorée. Il ne semble pas juste que les médecins qui font le choix courageux de continuer à assurer ce service public en dépit de conditions difficiles, parfois au-delà de l'âge de la retraite, à défaut d'être remplacés, soient pénalisés.

Elle lui demande s'il est possible d'envisager des mesures compensatoires visant à ce que cette situation, qui n'est pas isolée, ne se multiplie pas.

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Réponse du Ministère de la santé et de la prévention publiée le 15/12/2022

La politique d'accès aux soins engagée depuis plusieurs années a effectivement fait le choix des leviers incitatifs pour répondre aux problématiques de démographie médicale et de fluidité des parcours de soin. Le lancement du plan d'accès aux soins en 2017 a initié une nouvelle dynamique en portant une large palette de solutions, adaptables à chaque contexte local, car la réponse aux difficultés démographiques n'est pas unique : actions au niveau de la formation des professionnels (soutien à la réalisation des stages ambulatoires pour faire découvrir la pratique et « donner envie » d'exercer dans ces territoires), recours aux transferts de compétences, au télésoin et bien sûr appui au développement des structures d'exercice coordonné (maisons de santé pluri-professionnelles, centres de santé pluri-professionnels, communautés professionnelles territoriales de santé…), fort levier d'attractivité. Ce plan a été renforcé par la stratégie « Ma Santé 2022 », avec des dispositions à effet de court terme, comme la création de postes d'assistants médicaux, pour seconder et appuyer les médecins dans un ensemble de tâches administratives et soignantes et par le Ségur de la santé lancé en juillet 2020 qui a mis l'accent en particulier sur le déploiement de l'exercice coordonné sous toutes ses formes (maisons de santé, centres de santé ou encore communautés professionnelles territoriales de santé) et le recours à la télésanté. Eu égard au contexte démographique tendu, il s'agit de mobiliser tous les leviers existants pour trouver du temps médical et augmenter l'attractivité des territoires. Certaines solutions doivent être résolument accélérées et le développement de l'exercice coordonné en fait partie. Une récente étude de la direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (Etudes et Résultats octobre 2022, n° 1244) montre d'ailleurs que depuis 2010, l'exercice regroupé est de plus en plus plébiscité par les médecins généralistes : fin 2010, 54 % des médecins exerçaient en groupe, contre 61 % en 2019 et 69 % début 2022. Elle montre aussi que l'exercice en groupe pluri-professionnel progresse : il concerne 40 % de l'ensemble des médecins et 60 % des médecins exerçant en groupe. Le panel des leviers est large, il existe également des aides individuelles au maintien ou à l'installation des professionnels de santé dans les territoires les plus en tension : contrats proposés par l'assurance maladie ou les agences régionales de santé, aides fiscales… C'est une boîte à outils qui est mise à disposition : la solution unique n'existe pas et il convient de la co-construire au sein de chaque territoire. C'est bien un des objectifs du conseil nationale de la refondation santé de mettre autour de la table professionnels, patients et élus pour trouver ensemble les solutions les plus adaptés aux besoins des territoires et des populations, en levant les freins et en mobilisant les leviers existants.  Il convient enfin de rappeler qu'en parallèle, le projet de loi de financement de la sécurité sociale 2023 porte aussi des dispositions supplémentaires pour agir sur la réponse aux besoins de santé avec l'introduction d'une notion de responsabilité collective étendue à d'autres professions (infirmiers, dentistes…) s'agissant de la permanence des soins et l'instauration d'une quatrième année de formation en médecine générale visant à améliorer les premières années d'exercice professionnel.

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