Question de Mme NOËL Sylviane (Haute-Savoie - Les Républicains) publiée le 28/07/2022

Mme Sylviane Noël attire l'attention de Mme la ministre de la culture s'agissant des réclamations de droits d'auteur adressées récemment par la Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique (SACEM) aux propriétaires de locations saisonnières.

En effet, il semblerait que les loueurs de meublés de tourisme, chambres d'hôte, gîtes et hôtels doivent désormais s'acquitter d'un montant forfaitaire annuel de 198,01 euros hors taxes, au simple motif qu'ils mettent à disposition dans leurs hébergements, une télévision, une radio ou encore un lecteur DVD.

La SACEM ajoute que les propriétaires doivent souscrire à ce forfait afin de diffuser des œuvres dans les chambres et les parties communes, sans aucune restriction. La SACEM considère qu'elle répond ainsi à une mission d'intérêt général inscrite dans le code de la propriété intellectuelle. Elle précise également que des contrôles seront effectués par ses agents et qu'en cas de refus de paiement de ces droits d'auteur par les propriétaires, le montant de l'amende peut aller jusqu'à 300 000 euros.

En pleine saison touristique, ces propriétaires ne comprennent pas cette mesure qu'ils contestent vivement, notamment en raison du manque de clarté qui l'accompagne alors qu'ils payent déjà une redevance audiovisuelle, sans compter l'impôt sur le revenu sur leurs bénéfices de location.

De plus, ils ne louent pas tous nécessairement leurs logements durant l'intégralité de l'année et rien ne prouve non plus une utilisation systématique de ces appareils médiatiques par leurs clients. Ils ne font donc que mettre à disposition de leur clientèle une simple fourniture d'installations pour rendre leur séjour plus agréable. Il n'y a donc pas nécessairement et systématiquement d'acte de communication au public justifiant une rétribution auprès de la SACEM de ces droits d'auteur.

Cette mesure est donc très contestée et ne fera qu'accroître encore la pression permanente que subissent déjà ces propriétaires de locations saisonnières, très éprouvés par la crise sanitaire et qui se retrouvent dans une industrie du tourisme en plein redémarrage.

Aussi, elle sollicite le Gouvernement pour qu'il puisse clarifier rapidement cette situation et remédier ainsi aux incertitudes liées à ces réclamations de droits d'auteur aux propriétaires de locations saisonnières par la SACEM.

- page 3941


Réponse du Ministère de la culture publiée le 08/09/2022

Le code de la propriété intellectuelle (CPI) reconnaît aux titulaires de droits de la musique des droits patrimoniaux sur leurs œuvres, prestations ou phonogrammes. Les sommes dont le paiement est aujourd'hui réclamé par la société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique (SACEM) aux exploitants d'hébergements touristiques (hôtels, résidences de tourisme, chambres d'hôtes, gîtes et meublés de tourisme) qui procèdent à des diffusions musicales dans leurs parties communes ou leurs chambres couvrent non seulement la rémunération due aux auteurs et compositeurs mais aussi la rémunération, dite « rémunération équitable », due aux artistes-interprètes et aux producteurs de phonogrammes au titre de la diffusion publique des phonogrammes du commerce. L'intervention de la SACEM est juridiquement fondée, s'agissant des droits d'auteur, sur l'article L. 122-2 du CPI qui soumet à l'autorisation de l'auteur la représentation de son œuvre, laquelle consiste dans la « communication de l'œuvre au public par un procédé quelconque ». La Cour de cassation a précisé que l'hôtelier qui met à la disposition de ses clients un appareil permettant la réception de programmes de télévision réalise un acte de communication au public soumis à autorisation des auteurs et partant, au paiement de redevance y afférente (Civ. 1ère, 14 janvier 2010). De même, la Cour de justice de l'Union européenne a jugé que la distribution d'un signal au moyen d'appareils de télévision par un établissement hôtelier aux clients installés dans les chambres de cet établissement, quelle que soit la technique de transmission du signal utilisée, constitue un acte de communication soumis au droit d'auteur (CJUE, 7 décembre 2006, C 306/05). Les rémunérations versées aux auteurs ne constituent en aucun cas une taxe ou une redevance de nature fiscale et les organismes de gestion collective chargés de percevoir ces rémunérations, dont la SACEM, constituent des entités de droit privé et non des établissements placés sous la tutelle du ministère de la culture. Si ce dernier dispose d'un pouvoir de contrôle sur ces organismes, il ne lui appartient pas de se prononcer sur le bien-fondé de leur politique de gestion des droits. Le ministère de la culture est néanmoins attentif à ce que ces organismes prennent en compte les préoccupations exprimées par les utilisateurs de son répertoire, notamment au regard de l'économie des exploitations modestes. À cet égard, la SACEM a introduit en 2014 un système de tarification simplifié réservé aux petits établissements d'hébergement touristique disposant de 10 chambres ou moins, ainsi qu'aux chambres d'hôtes et gîtes. Le montant de ce forfait annuel, soit 120,11 € HT en 2022 au titre des droits d'auteur, tend à harmoniser le traitement de ces petites structures. Ce forfait a été établi par référence au minimum applicable aux établissements hôteliers. Il convient en effet de s'assurer que le traitement spécifique accordé aux établissements d'hébergement touristique n'induise pas de distorsion de concurrence au détriment des exploitants d'établissements hôteliers. Il apparait souhaitable que la SACEM poursuive ses efforts de simplification des modalités d'accès aux œuvres et de partenariat avec les exploitants du secteur touristique, sans pour autant priver les auteurs de leurs droits et de la juste rémunération de leur activité créatrice. À cet égard, la SACEM poursuit actuellement des discussions avec les principales fédérations et associations représentant les acteurs de l'hébergement touristique en vue d'adapter les conditions de son intervention à la réalité des exploitations les plus modestes. Ces échanges portent également sur les voies possibles d'une centralisation des démarches et du paiement des redevances de droits d'auteur via ces fédérations ou associations.

- page 4352

Page mise à jour le