Question de M. OUZOULIAS Pierre (Hauts-de-Seine - CRCE) publiée le 22/09/2022

M. Pierre Ouzoulias interroge M. le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse au sujet de la publication des algorithmes locaux utilisés par les établissements de l'enseignement supérieur dans le cadre de la procédure Parcoursup.

Dans un discours prononcé le vendredi 9 septembre 2022 dans l'enceinte du lycée Lakanal, à Sceaux, dans les Hauts-de-Seine, le ministre de l'éducation nationale a déclaré vouloir modifier Parcoursup, évoquant le nécessaire besoin de transparence dans les procédures de sélection mises en œuvre par les établissements de l'enseignement supérieur.

En effet, si Parcoursup organise le recueil des vœux et des dossiers des lycéens au moyen d'un algorithme national disponible publiquement, d'autres informations sont traitées, le plus souvent, en partie ou en totalité, par les établissements de l'enseignement supérieur à l'aide « d'algorithmes locaux » qui demeurent confidentiels. Cette confidentialité a été rendue possible par un amendement gouvernemental adopté au cours de l'examen de la loi n° 2018-166 du 8 mars 2018 relative à l'orientation et à la réussite des étudiants (dite loi ORE). Le dispositif qui en résulte introduit un régime dérogatoire de communication, contraire au principe général de transparence institué par le code des relations entre le public et l'administration.

Soucieux de corriger ce tort qui nuit énormément à l'orientation des élèves, il a demandé la publication de ces « algorithmes locaux » à la ministre chargée de l'enseignement supérieur de l'époque. Sans réponse, il a alors saisi la commission d'accès aux documents administratifs (CADA), le défenseur des droits et la commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) pour en obtenir la communication.

Saisi d'une question prioritaire de constitutionnalité sur le sujet, le conseil constitutionnel, dans sa décision n° 2020-834 QPC du 3 avril 2020, a consacré le caractère constitutionnel du droit d'accès aux documents administratifs, mais a confirmé, sous certaines réserves, les restrictions apportées au droit à la communication des algorithmes par le code de l'éducation et, notamment, l'interdiction d'avoir accès aux codes sources. Néanmoins, dans le commentaire de sa décision, le conseil constitutionnel a demandé à chaque établissement de « rendre compte […] des critères qu'il a utilisés, le cas échéant au moyen de traitements algorithmiques, pour examiner les candidatures formulées sur Parcoursup ».

Prenant acte de cette décision et des déclarations du ministre de l'éducation nationale, il lui demande quelles actions il entend mener pour rendre publics les algorithmes locaux utilisés par les établissements de l'enseignement supérieur. Il lui demande également si le Gouvernement est prêt à abroger le régime dérogatoire établi par la loi ORE.

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Transmise au Ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche


Réponse du Ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche publiée le 23/02/2023

La transparence constitue l'un des objectifs du Plan étudiants élaboré en 2017 et de la loi n° 2018-166 du 8 mars 2018 relative à l'orientation et la réussite étudiante (ORE). Concernant la transparence en matière d'examen et de classement des dossiers, le Gouvernement a fait le choix en 2018 de remettre l'humain au cœur de l'examen de dossiers et d'en finir avec l'appréciation automatique. Dans chaque établissement, une commission d'examen des vœux, composée de professionnels et dont la composition est arrêtée par le chef d'établissement, a pour mission de définir concrètement les modalités et critères d'examen des vœux, dans le cadre des critères généraux d'examen publiés. L'examen de chaque candidature ne repose donc pas sur un traitement entièrement automatisé : les outils d'analyse mis à la disposition des établissements ne sont que des outils d'aide à la décision. Chaque dossier est donc examiné avant d'être classé, selon les critères définis par la formation et dont elle rend compte. L'ensemble des responsables de formation est sensibilisé par les équipes Parcoursup à cet enjeu de transparence, de qualité et de lisibilité des informations fournies aux candidats et à leur famille, en particulier les critères généraux d'examen des vœux (CGEV). Cette sensibilisation s'exerce notamment à travers les notes de cadrage qui leurs sont diffusées chaque année et lors des sessions d'information qui leurs sont proposées en amont de la phase de paramétrage. Les commissions d'examen des vœux doivent expliquer et justifier leurs choix. C'est dans ce sens que les textes ont progressivement évolué. Ainsi, chaque année les rapports de chaque commission d'examen des vœux sont mis en ligne : pour la session 2022, plus de 11 000 rapports ont été recueillis et seront rendus publics sur le site Parcoursup pour les étudiants de la session 2023. Chaque rapport reprend, sous la forme d'une présentation littéraire et d'un tableau synoptique, l'ensemble des données et modalités de la procédure passée ainsi que les critères qui ont gouverné à l'examen des vœux auquel ont procédé les formations. La procédure Parcoursup est donc loin de l'opacité qui lui est trop souvent prêtée et les efforts sont constants depuis 2018 pour améliorer la performance et la transparence. La publication avant l'ouverture de la procédure nationale Parcoursup des critères et traitements algorithmiques remettrait en cause l'équilibre trouvé par le Conseil constitutionnel qui, dans sa décision d'avril 2020, relevait que la protection du secret des délibérations des équipes pédagogiques constituait un motif d'intérêt général, qui vise à assurer l'indépendance de ces équipes pédagogiques et l'autorité de leurs décisions. Cet équilibre a d'ailleurs été reconnu et défendu par le rapport d'information des députés Nathalie Sarles et Régis Juanico publié en juillet 2020 dans le cadre de leur mission d'évaluation de l'accès à l'enseignement supérieur. De nouvelles étapes dans ce processus devront être franchies, et ce dès 2023, guidées par le souci d'améliorer l'orientation et la réussite des étudiants. Elles se construiront dans le dialogue avec les acteurs, avec le souci de renforcer aussi le travail des commissions pédagogiques dont la protection des délibérations a été confirmée par le Conseil constitutionnel. Pour 2023, le ministère agira pour rendre l'examen des candidatures par les formations plus transparent en renforçant davantage la compréhension des critères de choix des dossiers par les commissions des formations.

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