Question de M. OUZOULIAS Pierre (Hauts-de-Seine - CRCE) publiée le 27/10/2022

M. Pierre Ouzoulias interroge Mme la Première ministre sur le respect par le secrétariat général pour l'investissement des engagements de la France en matière d'évaluation de la recherche.
Le secrétariat général pour l'investissement, placé sous son autorité, gère un plan d'investissement pour l'innovation de cinquante-quatre milliards d'euros dont notamment le programme « France 2030 ». Lors d'un entretien accordé à un média spécialisé le 13 septembre 2022, son secrétaire général a déclaré à propos de l'évaluation des projets qui lui sont soumis : « Dans un monde idéal, et grâce à [l'intelligence artificielle] et à des algorithmes, nous pourrions par exemple imaginer presque donner une première réponse immédiate aux porteurs. C'est pourquoi nous étudions les systèmes automatisés qui font de la recherche comparative en ligne en temps réel. Je suis certain que cela peut constituer une aide à la décision pour nos jurys ».
Le Conseil de l'Union européenne a adopté, le 10 juin 2022, des conclusions (n° 10126/22) sur l'évaluation de la recherche et la mise en œuvre de la science ouverte par lesquelles il reconnaît que « les systèmes d'évaluation de la recherche sont actuellement […] trop axés sur l'utilisation de certains indicateurs quantitatifs fondés sur des revues et des publications et sur l'évaluation d'un éventail restreint de résultats de recherche » et suggère une évolution des systèmes d'évaluation de la recherche fondée sur des critères qualitatifs. Ces recommandations s'inspirent de celles portées par l'Appel de Paris, du 5 février 2022, et défendues par la France lors de sa présidence du Conseil de l'Union européenne.
Le 16 décembre 2021, le haut conseil de l'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur, comme l'ont déjà fait cinquante-huit institutions de la recherche française, a signé la déclaration de San Francisco sur l'évaluation de la recherche dite DORA.
Il lui demande donc si le secrétariat général pour l'investissement, dans sa gestion des projets de recherche et de leurs résultats, respectera les engagements pris par la France en faveur d'une évaluation qualitative, s'il signera la charte dite DORA et, plus généralement, quelles collaborations il souhaite établir avec les autres institutions investies dans ce domaine, notamment le haut conseil de l'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur, le conseil national de la recherche scientifique et l'agence nationale de la recherche.
Enfin, il souhaite savoir si les procédures d'évaluation scientifiques mises en œuvre par le secrétariat général pour l'investissement seront soumises à l'examen du haut conseil de l'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur, conformément à l'article L. 114-3-1 du code de la recherche et à l'article premier du décret n° 2021-1536 du 29 novembre 2021.

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Réponse du Première ministre publiée le 16/02/2023

Qu'il s'agisse de l'évaluation a priori, chemin faisant ou a posteriori, les démarches et critères d'évaluation influencent les processus de décision en matière de soutien aux programme de recherche : le Secrétariat général pour l'investissement est donc tout particulièrement attentif aux critères choisis pour fonder cette évaluation. A cet égard, il se reconnait parfaitement dans les principes avancés par la Déclaration de Dora et ses prolongements, en particulier l'initiative prise sous Présidence Française de l'Union européenne en 2022 concernant l'accord pour une réforme de l'évaluation de la recherche. Le SGPI soutient plus largement la promotion de pratiques d'évaluation responsable de la recherche et de science ouverte. Plus précisément dans la conduite de France 2030, le SGPI a fait le choix d'un référentiel d'évaluation des projets de recherche multicritères, portant sur l'ensemble des dimensions clés des activités de recherche, et en accordant, comme l'y encourage la déclaration de Dora, une place significative à l'évaluation qualitative articulée à une utilisation responsable d'indicateurs bibliométriques. A titre illustratif, à côté des indicateurs de mesure d'impact des publications tels que le H index, le référentiel inclut des critères comme l'innovation développée par le chercheur, les brevets déposés, le caractère multidisciplinaire de la recherche, l'intensité partenariale dans les collaborations nouées par les structures de recherche avec des écosystèmes, l'impact socio-économique des programmes de recherche (par exemples les retombées territoriales) ou encore le rôle de la science ouverte via le nombre d'APC. Ces quelques exemples soulignent que le SGPI entend mobiliser les moyens à sa disposition non seulement pour respecter les engagements pris par la France en faveur d'une évaluation qualitative des projets de recherche, mais également pour contribuer à sa diffusion auprès de ses parties prenantes afin d'en favoriser une appropriation la plus large possible. La promotion des principes portés par la déclaration de Dora est également un objectif au cœur des travaux menés par le SGPI et l'Agence nationale de la Recherche qui opère la gestion des programmes de recherche soutenus par France 2030, ainsi que les nombreux organismes nationaux de recherche signataires de la déclaration de Dora.  S'agissant plus particulièrement de l'articulation entre le SGPI et le Haut Conseil à l'Evaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur (Hcéres), un dialogue approfondi a d'ores et déjà été engagé entre les deux organismes pour examiner comment articuler au mieux les travaux d'évaluation en matière de projets de recherche. S'il a été constaté que les périmètres et objectifs de l'évaluation ne se recoupaient pas totalement (le Hcéres étant missionné pour évaluer les établissements et les structures) alors que le SGPI doit évaluer des projets et des programmes) il a été souligné l'intérêt d'un renforcement du dialogue entre les deux institutions afin de renforcer les synergies en matière d'évaluation. Outre le partage des programmations pluriannuelles des évaluations, l'échange d'informations en « routine » sur les établissements de recherche lauréats des appels à projets France 2030 est en cours de mis en place afin que les évaluateurs et experts du Hcérès puisse disposer de cette information dans leur travail d'évaluation scientifique de ces établissements. De même les évaluations conduites par le Haut Conseil de l'évaluation de la Recherche seront mises à disposition du SGPI qui pourra en tenir compte pour éviter tout doublon et enrichir son programme d'évaluation. En cohérence avec le 2° de l'article 1 du décret relatif à l'organisation et au fonctionnement du Haut Conseil de l'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur du 9 novembre 2021, le SGPI, en lien avec son opérateur l'Agence Nationale pour la Recherche et le Ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche, entend nourrir un dialogue régulier avec le Haut Conseil afin d'assurer les conditions propices à une amélioration continue des critères et procédures mises en œuvre et permettre une prise en compte des évaluations par les acteurs.

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