Question de M. BRISSON Max (Pyrénées-Atlantiques - Les Républicains) publiée le 19/01/2023

M. Max Brisson appelle l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire à propos des difficultés rencontrées par la filière ovine laitière du département des Pyrénées-Atlantiques face à l'absence de débouchés pour la laine de brebis, dont la production représente environ 1 000 tonnes chaque année.

En effet, si de petites entreprises et des artisans valorisent une infime partie de cette laine, aucune solution n'existe pour la grande majorité de celle-ci. Cela laisse éleveurs et grandes structures de collecte totalement désemparés.

Certes, la laine grossière n'est pas adaptée à certaines valorisations, notamment textiles. Toutefois, elle a de nombreux atouts aujourd'hui reconnus. C'est pourquoi la chambre d'agriculture des Pyrénées-Atlantiques, aux côtés notamment de la chambre de commerce et d'Industrie Bayonne Pays Basque, s'est activement impliquée dans le projet Interreg-Poctefa Lanaland, qui s'est achevé en 2022.

Ce programme visait à développer des prototypes de produits à base de laine de brebis de races locales, avec pour objectif final de développer un panel de solutions capables d'absorber de gros volumes et de créer une valeur ajoutée importante.

Financé par l'Union européenne et cofinancé par la région Nouvelle-Aquitaine, le département des Pyrénées-Atlantiques et la communauté d'agglomération Pays Basque, ce programme a développé deux prototypes concluants techniquement pour valoriser la teneur en azote et en souffre de la laine : des composts et des granulés fertilisants à base de laine.

Le compostage permettrait aux éleveurs de valoriser directement la laine dans leur exploitation, en mélange avec le fumier produit par leurs animaux afin de constituer des composts plus riches bénéficiant directement à leurs prairies ou cultures.

Les granulés quant à eux permettraient à des coopératives ou entreprises locales de commercialiser un engrais durable et local pour les particuliers, avec une pertinence économique démontrée.

Ces deux solutions auraient l'avantage de traiter des quantités importantes de laine directement sur le territoire, en y conservant la valeur ajoutée, en réduisant le transport et en assurant un retour agronomique ou financier pour les éleveurs.

Pourtant, aujourd'hui, leur mise sur pied bute sur les règlements CE-N°1069/2009 et UE-N°142/2011. Bien que les essais aient montré que le processus de compostage permettait de lever les risques microbiologiques identifiés dans la réglementation, les conditions définies réglementairement pour réaliser le compostage le rendent impossible pour les éleveurs.

De ce fait, afin de réussir à l'adapter aux réglementations européennes, des études ont été diligentés pour trouver des procédés de traitement complexes permettant à la fois la fabrication et la vente de ces granulés fertilisants. Néanmoins, cet effort consenti se heurte aux pratiques d'entreprises européennes qui commercialisent le même produit sans respecter l'ensemble des exigences réglementaires, constituant ainsi une distorsion de concurrence inacceptable.

Aussi, soucieux des conséquences de cette concurrence déloyale, il interroge le Gouvernement sur la possibilité d'obtenir une évolution de la législation européenne en vigueur afin de répondre à l'absence de débouchés pour la laine de brebis en permettant le recours au compostage pour les éleveurs d'une part et en résolvant cette distorsion de concurrence quant aux granulés fertilisants d'autre part.

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Réponse du Ministère auprès du ministre de la santé et de la prévention, chargé de l'organisation territoriale et des professions de santé publiée le 15/02/2023

Réponse apportée en séance publique le 14/02/2023

Mme le président. La parole est à M. Max Brisson, auteur de la question n° 359, adressée à M. le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire.

M. Max Brisson. La production de laine de brebis des trois races laitières présentes dans les Pyrénées-Atlantiques s'élève chaque année à 1 000 tonnes. Si de petites entreprises en valorisent une infime part, aucune solution n'existe pour la grande partie de la production.

Pourtant, bien qu'elle ne soit pas adaptée à certaines valorisations, notamment textiles, cette laine a de nombreux atouts reconnus.

C'est pourquoi la chambre d'agriculture des Pyrénées-Atlantiques et la chambre de commerce et d'industrie Pau-Béarn ont lancé un programme de recherche sur le traitement de la laine, qui s'est achevé en 2022.

Deux prototypes concluants ont été développés.

Tout d'abord, le compostage, qui permet aux éleveurs de valoriser la laine directement dans leur exploitation et de produire un compost plus riche pour leurs prairies ou cultures.

Ensuite, les granulés fertilisants, qui permettent aux coopératives et entreprises locales de commercialiser un engrais durable et local à base de laine.

Ces deux prototypes créeraient, s'ils étaient généralisés, des débouchés intéressants pour la laine de brebis, ce qui profiterait à chacun des acteurs du secteur.

Cependant, leur développement bute sur la réglementation européenne. Résultat, bien que le processus de compostage permette de lever les risques microbiologiques, les conditions de sa réalisation sont rendues quasiment impossibles.

Quant à la solution des granulés fertilisants, les éleveurs de mon département constatent que, dans d'autres pays européens, des entreprises les commercialisent, enfreignant ainsi la même législation communautaire. Il en ressort une distorsion de concurrence inacceptable.

Aussi, madame la ministre, ma question est simple : le Gouvernement est-il prêt à soutenir la mise en œuvre de ces prototypes innovants, en engageant une négociation afin d'obtenir une évolution de la législation européenne ?

Mme le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée auprès du ministre de la santé et de la prévention, chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé. Monsieur le sénateur, vous interrogez le Gouvernement sur l'absence de débouchés pour la laine de brebis.

Le ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire accompagne d'ores et déjà la filière ovine dans la structuration d'une filière laine au travers du plan d'action national pour la bioéconomie, le plan de relance via le projet Tricolor et la mise en place par FranceAgriMer d'un observatoire du marché des cuirs, laines, peaux et plumes, ainsi que d'un groupe de travail chargé d'identifier des pistes de valorisation pour ces productions.

Concernant le volet sanitaire, la laine a le statut de sous-produit animal de catégorie 3 au titre de la réglementation européenne.

Pour cette catégorie de sous-produits animaux, les possibilités de valorisation sont multiples et ouvertes à l'innovation, par exemple le textile, les matériaux isolants, l'industrie pharmaceutique et cosmétique, l'alimentation animale ou encore les engrais.

Néanmoins, la réglementation européenne impose des règles pour son usage direct dans le sol en tant que fertilisant, compte tenu des risques sanitaires de diffusion de maladies animales pour les animaux d'élevage, la faune sauvage, voire l'être humain.

L'expérimentation Lanaland lancée dans le cadre du programme Interreg-Poctefa présente un intérêt, qu'il conviendra d'analyser avec attention.

La valorisation de la laine par le compostage sur place, dans l'élevage, est autorisée, mais elle nécessite l'obtention par l'établissement d'un agrément sanitaire couvrant la conformité des locaux, des équipements et du fonctionnement, ainsi que la sécurité et la maîtrise du procédé.

Afin de faciliter les démarches des exploitants, la direction générale de l'alimentation a travaillé avec la filière sur un dossier de demande d'agrément type pour les exploitants et à une flexibilité sur la fréquence des analyses d'autocontrôle.

En complément, une mission du Conseil général de l'alimentation, de l'agriculture et des espaces ruraux est en cours pour élaborer une feuille de route afin d'améliorer la valorisation et les débouchés de ces produits. Son rapport est attendu pour le mois d'avril prochain.

Mme le président. La parole est à M. Max Brisson, pour la réplique.

M. Max Brisson. Madame la ministre, je vous remercie de ces précisions.

La chambre d'agriculture et la chambre de commerce et d'industrie Pau-Béarn ont beaucoup investi, avec le soutien du Poctefa – vous l'avez dit –, dans ces deux prototypes qui pourraient constituer des débouchés très intéressants pour les éleveurs, les entreprises et les coopératives.

Par conséquent, l'ensemble des acteurs attend maintenant le résultat des analyses demandées – il faut que cela soit rapide – et la mise en place d'une procédure plus simple pour l'agrément.

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