Question de Mme HARRIBEY Laurence (Gironde - SER) publiée le 26/01/2023

Mme Laurence Harribey attire l'attention de M. le ministre de la santé et de la prévention sur le risque de rupture d'approvisionnement des médicaments d'intérêt thérapeutique majeur (MITM) d'une grande partie des petites et moyennes entreprises (PME) confrontées à une situation économique difficile due à l'inflation.

En 2018, 871 ruptures de médicaments étaient notifiées par l'agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM), obligeant 45 % des patients à changer de traitement alors que les substitutions de traitement ont des conséquences délétères sur les patients. En 2022, il y avait 3 000 ruptures qui menaçaient encore davantage la santé de nombreux patients atteints de maladies chroniques.

Nombre de traitements sont aujourd'hui produits avec une marge quasiment nulle alors que l'augmentation du coût de production est estimée entre 20 % et 30 % en 2023. Ces traitements sont aussi bien des sédatifs utilisés en anesthésie et en réanimation, que des antibiotiques injectables, des anti-inflammatoires, des antidépresseurs ou des antiparkinsoniens fabriqués à 90 % en France ou en Europe.

En cette période d'inflation de tous les intrants et de l'énergie, il est urgent de conserver notre outil industriel national et de sécuriser l'approvisionnement des patients français en traitements essentiels, en particulier lorsque les fabricants de MITM en Inde ou en Chine ne souhaitent pas approvisionner le marché français en raison des faibles prix.

À ce jour, la valorisation de la production locale n'a été matérialisée que sur une douzaine de dossiers, le comité économique des produits de santé (CEPS) confirmant ne pas savoir faire une augmentation généralisée des prix. Pourtant, différents outils juridiques tels que l'article 28 de l'accord cadre peuvent être utilisés par le CEPS pour renforcer la souveraineté d'approvisionnement du marché français en médicaments matures essentiels.

Elle demande donc au Gouvernement un moratoire des baisses de prix en 2023 pour les médicaments d'intérêt thérapeutique majeur, puis une majoration globale du prix de ceux fabriqués en France.

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Transmise au Ministère du travail, de la santé et des solidarités


Réponse du Ministère du travail, de la santé et des solidarités publiée le 15/02/2024

La précédente feuille de route 2019-2022 a marqué des avancées importantes dans la gestion des pénuries et des tensions d'approvisionnement de produits de santé, notamment en terme de nouvelles obligations imposées aux industriels (obligation de détention de stocks minimums), mais il nous faut désormais aller plus loin et poser les jalons d'une nouvelle stratégie en matière de prévention et de gestion des pénuries. Lors du comité de pilotage de la feuille de route de lutte contre les pénuries de produits de santé qui s'est déroulé en présence des ministres de la santé et de la prévention et de l'industrie le 2 février 2023, il a été acté le lancement d'une phase de co-construction avec l'ensemble des parties prenantes. Les travaux menés au second trimestre 2023 ont permis d'établir un certain nombre d'actions concrètes qui seront présentées dans une nouvelle feuille de route pluriannuelle. Parmi ces premières actions concrètes, nous pouvons évoquer dans un premier temps, la mise en place d'une première liste de médicaments essentiels, publiée le 13 juin 2023 qui a vocation à renforcer la surveillance en matière d'approvisionnements de médicaments via l'Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) ainsi que le « Plan de sécurisation de la couverture des besoins en produits de santé au cours des pathologies hivernales » porté par l'ANSM et déployé depuis octobre 2023. Dans un second temps, dans le cadre du projet de loi de financement pour la sécurité sociale pour 2024, trois mesures ont été proposées pour améliorer l'accès de nos concitoyens aux médicaments en cas de pénuries. Une première mesure, prévue à l'article 77 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2024, est destinée à prévenir les ruptures d'approvisionnement suite à l'arrêt de commercialisation de médicaments d'intérêt thérapeutique majeur matures. Afin de faciliter la reprise de droits de production, le gouvernement propose de responsabiliser les entreprises détentrices ou exploitantes d'autorisation de mise sur le marché arrêtant la commercialisation de médicaments matures en les obligeant à mettre tous les moyens en oeuvre pour trouver un repreneur. Cette mesure prévoit également la publication de la liste des médicaments thérapeutiques majeurs et renforce la capacité de régulation de cette liste par l'ANSM. Une seconde mesure, prévue à l'article 72, comporte deux volets : l'un portant sur la limitation de la vente directe entre les laboratoires pharmaceutiques et les officines et l'autre sur le renforcement des leviers d'épargne en cas de rupture d'approvisionnement (dispensation à l'unité obligatoire, obligation d'ordonnance conditionnelle au test rapide d'orientation diagnostique, limitation ou interdiction de télé-prescription). Ces mesures ont notamment vocation à faciliter la juste répartition des stocks sur le territoire et à amplifier les actions de bon usage du médicament en période de tensions en s'assurant que le médicament est prescrit à bon escient. Par ailleurs, une troisième mesure, prévue à l'article 71, permet d'élargir les dispositifs de productions alternatives aux spécialités pharmaceutiques (préparations spéciales). Ces préparations spéciales feront l'objet d'une coordination par l'établissement pharmaceutique de l'Assistance Publique - Hôpitaux de Paris qui assurera l'approvisionnement en matières premières et la qualité de ces préparations. Très récemment, afin de fluidifier la chaîne de distribution de médicaments, une charte d'engagement collective et solidaire des acteurs de la chaîne pharmaceutique a été signée le 22 novembre 2023 entre l'ANSM et les différentes parties prenantes (pharmaciens, industriels, grossistes-répartiteurs, autorités). Enfin, comme les motifs des tensions ou des pénuries sont multifactoriels, il convient d'adopter une réponse globalisée à cette problématique. Ainsi, afin de palier à certaines fragilités industrielles observées pour certains médicaments (situations de monopoles sur un ou plusieurs maillons de la chaîne d'approvisionnement), le Gouvernement travaille à des projets de relocalisation de certains principes actifs ou chaînes de production sur des médicaments essentiels. Cette ambition de relocalisation fait d'ailleurs l'objet de nombreux échanges au niveau européen pour coordonner les actions entre les différents Etats membres.

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