Question de M. SEGOUIN Vincent (Orne - Les Républicains) publiée le 09/02/2023

Question posée en séance publique le 08/02/2023

M. le président. La parole est à M. Vincent Segouin, pour le groupe Les Républicains.

M. Vincent Segouin. Monsieur le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire, les labels de qualité de la volaille française, que nous connaissons tous, comme le « Label rouge » ou la mention « AB », vont-ils disparaître ?

Depuis des années, les filières avicoles françaises ont œuvré pour produire des volailles qui répondent aux normes de production, aux exigences du bien-être animal et aux attentes des consommateurs.

Ces normes, identifiées par un étiquetage clair et simple, ont permis à la production française de trouver une place sur le marché dans des conditions de concurrence équitables.

Mais voilà que la Commission européenne a décidé, à la fin de 2022, d'accorder à tous types d'élevage pleine liberté d'utiliser des labels sans fondement et sans aucun contrôle !

Nous risquons ainsi de voir apparaître des mentions fantaisistes, comme « poulet de plein vent » ou « poulet des champs », qui tromperont le consommateur.

Alors, monsieur le ministre, ma question est simple : quelle stratégie comptez-vous mettre en place pour sauver ces labels et nos filières avicoles ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe UC.)


Réponse du Ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire publiée le 09/02/2023

Réponse apportée en séance publique le 08/02/2023

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire.

M. Marc Fesneau, ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire. Monsieur le sénateur Segouin, merci de votre question, qui me permet d'exposer clairement devant vous la position de la France, qui a déjà été exprimée à plusieurs reprises par voie écrite et orale, et lors de conseils européens.

Vous avez raison, l'inquiétude règne quant à la réforme des normes de commercialisation qui a été lancée par la Commission européenne et soumise aux États membres, pour avis uniquement. Là est bien la difficulté, dans le travail que nous avons à accomplir avec la Commission. Dès le début de cette négociation, la France a indiqué son désaccord sur différents points, en particulier sur la révision des dispositions relatives aux mentions valorisantes, réservées ou facultatives, c'est-à-dire aux normes de commercialisation.

Vous avez très bien décrit les risques que fait courir ce projet de réforme. Le premier, c'est un risque de tromperie du consommateur, par l'introduction d'une notion trop vague pour que l'on puisse valoriser un certain nombre de nos productions. Le deuxième, c'est un risque pour nos filières, en particulier celles de plein air – Label rouge et autres – ; on court le danger de ne plus pouvoir les valoriser comme elles le sont en ce moment.

J'ai écrit au commissaire européen à l'agriculture et au développement rural, j'ai discuté avec lui ; nous travaillons avec la Commission pour que la proposition qui sera examinée le 22 février prochain par le comité d'experts soit telle que nous puissions continuer de respecter les règles qui ont été édictées dans les années 1990 et sont de nature à rassurer le consommateur, à lui donner une vision claire de ce qu'il achète, et qui permettent à nos producteurs de valoriser leur production dans des conditions satisfaisantes.

C'est bien ce qui est en jeu, dans votre département de l'Orne, où je sais que vous êtes très attaché à cette filière, comme dans tous les départements d'élevage de volaille. Nous continuons à travailler au maintien de ces mentions valorisantes, mais aussi, plus globalement, au soutien d'une filière qui est déjà – je le rappelle, mais vous le savez aussi bien que moi – en grand risque du fait de la crise sanitaire qu'elle traverse, en raison de l'influenza aviaire. Sur ce sujet aussi, nous sommes au chevet de ces filières, nous travaillons avec elles pour trouver des solutions de court et de long terme, grâce notamment à la vaccination. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. le président. La parole est à M. Vincent Segouin, pour la réplique.

M. Vincent Segouin. Monsieur le ministre, au Sénat, nous saisissons toutes les occasions, sur le commerce extérieur, hier encore, ou sur la ferme France, pour vous alerter sur le déclin économique subi par la France du fait du poids des charges et des normes.

Vous nous répondez que les éleveurs français doivent monter en gamme pour trouver des marchés avec des marges plus élevées, selon les objectifs de la stratégie Farm to Fork ou du Green Deal. Le bilan de cette approche, c'est que, dans la filière avicole, la ferme France a perdu la bataille face aux importations pour la restauration collective ou les plats préparés.

Alors, il nous reste le poulet du dimanche, le poulet labélisé. Mais si vous ne défendez pas ces labels qui nous sont chers, tant pour les producteurs que pour les consommateurs, nous perdrons cette ultime bataille !

Nous constatons tous les jours que les normes et les surtranspositions s'appliquent aux agriculteurs français ; notre administration se développe toujours plus pour contrôler nos productions plutôt que les produits qui sont importés. En conséquence, nos fermes ne sont plus reprises par les jeunes. Vous vous étiez engagé à faire respecter les clauses miroirs ; nous attendons des suites ! Vous acceptez au contraire une nouvelle concurrence déloyale qui se révélera fatale pour nos productions et, probablement, pour les 15 000 emplois ruraux qui dépendent de ces labels.

Monsieur le ministre, la ferme France brûle, mais nous regardons ailleurs ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

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