Question de Mme LE HOUEROU Annie (Côtes-d'Armor - SER) publiée le 02/02/2023

Mme Annie Le Houerou attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire sur la situation de la filière porcine biologique en Bretagne et sur le territoire national. La filière porcine s'est organisée pour répondre à une demande croissante en porcs biologiques mais, depuis le second semestre de l'année 2021, la consommation de la viande de porcs « bio » connaît une forte baisse.
En conséquence, l'économie des producteurs de porcs « bio » est fragilisée. Plus généralement, c'est l'avenir de la filière porcine biologique qui est menacé.
Le respect de la loi n° 2018-938 du 30 octobre 2018 pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous (dite loi ÉGAlim), qui prévoit au moins 20 % de produits biologiques dans des établissements collectifs tels que la restauration scolaire et universitaire, permettrait de générer suffisamment de demande en porcs « bio » pour éviter la situation qui vient d'être évoquée.
Elle lui demande quelles sont les intentions du Gouvernement pour soutenir cette filière, en Bretagne et sur le territoire national, et faire respecter la loi EGAlim.

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Réponse du Ministère auprès du ministre de la santé et de la prévention, chargé de l'organisation territoriale et des professions de santé publiée le 15/02/2023

Réponse apportée en séance publique le 14/02/2023

Mme le président. La parole est à Mme Annie Le Houerou, auteure de la question n° 384, adressée à M. le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire.

Mme Annie Le Houerou. Madame la ministre, ma question porte sur les soutiens qu'il convient d'apporter en urgence à la filière porcine biologique qui s'effondre en Bretagne.

La filière porcine s'est organisée pour répondre à une demande croissante en porcs biologiques. Or, depuis le second semestre 2021, la consommation de viande de porc bio connaît une forte baisse. La filière porcine biologique subit de ce fait une situation de surproduction qui la contraint à baisser ses prix en s'alignant sur ceux des porcs conventionnels.

Ce déclassement ne permet plus aux producteurs biologiques de couvrir leurs coûts de production. L'augmentation du prix des matières premières, de l'alimentation et de l'énergie, conjuguée à l'amortissement des investissements nécessaires à la conversion à l'agriculture biologique, notamment l'adaptation des bâtiments, met les producteurs en très grande difficulté.

L'avenir de la filière porcine biologique est donc en danger, alors même que l'objectif, fixé par le plan de la filière porcine française, de passer de 0,5 % à 5 % de production porcine biologique est loin d'être atteint : en France, en 2021, seuls 1,45 % des porcs abattus étaient issus d'un élevage biologique.

La loi du 30 octobre 2018 pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous, dite Égalim, complétée par la loi du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, dite Climat et résilience, prévoit l'emploi dans la restauration collective d'au moins 50 % de produits de qualité et durables, avec au moins 20 % de produits biologiques. Nous en sommes très loin dans nos écoles, nos collèges, nos lycées, nos hôpitaux ou nos établissements médico-sociaux. Le seul respect de cette loi permettrait pourtant d'éviter la situation de surproduction que je viens d'évoquer et assurerait la pérennité de la filière porcine biologique en Bretagne et dans la France entière.

L'agriculture biologique a un impact positif sur la santé, le climat et la biodiversité. Elle permet de réduire diverses pollutions et répond assurément aux enjeux agricoles et sociaux actuels et futurs.

Madame la ministre, que prévoit le Gouvernement pour venir, d'urgence, en aide aux producteurs de viande bio, qui se trouvent dans un désarroi total ?

Sans un soutien apporté au plus vite, ces producteurs de Plouisy, de Plélo et d'ailleurs courent à la catastrophe. On sait quels dégâts humains cela entraînerait !

Mme le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée auprès du ministre de la santé et de la prévention, chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé. Madame la sénatrice, vous m'interrogez sur la situation de la filière porcine biologique sur le territoire national, plus particulièrement en Bretagne.

Rien n'indique qu'atteindre l'objectif de 20 % de produits bio servis en restauration collective augmenterait de façon significative les achats de porc bio. En effet, les restaurants collectifs n'auraient pas l'obligation de servir de la viande de porc bio et pourraient toujours retenir d'autres productions sous label biologique ou de la viande de porc vendue sous d'autres labels, voire dépourvue de label.

La principale difficulté de la filière porcine biologique réside dans les problèmes qu'elle rencontre en s'efforçant de mieux valoriser ses produits, notamment toute la carcasse du porc. À ce jour, dans la majorité des cas, seule une partie de la carcasse, notamment les jambons, est valorisée en agriculture biologique ; le reste intègre des circuits conventionnels.

Une deuxième difficulté provient des surcoûts importants générés par les bâtiments d'élevage et l'organisation de production spécifiques que nécessite la production de porc bio. Cela rend impossible de déclasser transitoirement les viandes en produits conventionnels, alors que d'autres filières peuvent se le permettre, car les pertes financières seraient vite intenables.

Le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire a annoncé le 6 décembre 2022, aux assises de l'agriculture et de l'alimentation biologiques, un projet de structuration de la filière porcine biologique ; le travail a été engagé avec l'agence Bio et les représentants de la filière.

Il a également annoncé un abondement supplémentaire du fonds Avenir Bio, à hauteur de 2 millions d'euros, à destination des filières biologiques les plus touchées, dont la filière porcine, ainsi qu'une campagne de communication à destination du grand public, dotée de 750 000 euros, pour augmenter la demande, réitération de la campagne #BioRéflexe de 2022.

Enfin, une campagne de communication sera lancée en 2023, grâce aux financements du programme européen de promotion de la filière, de manière à stimuler la consommation de produits bio en restauration commerciale.

Par ailleurs, le ministère a ouvert aux régions qui le souhaitent la possibilité de mobiliser les reliquats du Fonds européen agricole pour le développement rural (Feader) 2014-2022 pour mettre en place en 2023 une aide au maintien à l'agriculture biologique. La région Bretagne l'a fait.

Par ailleurs, le futur programme Ambition Bio sera l'occasion de construire, avec les filières et les acteurs de l'agriculture et de l'alimentation biologiques, une véritable stratégie renouvelée d'accompagnement et de structuration de ces filières de qualité tenant compte des résultats des études prospectives en cours, qui seront d'ailleurs l'occasion de mieux équilibrer l'offre et la demande.

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