Question de M. MOUILLER Philippe (Deux-Sèvres - Les Républicains) publiée le 02/02/2023

M. Philippe Mouiller attire l'attention de Mme la ministre de la transition énergétique sur les conséquences financières de l'envolée et de la volatilité des prix de gros de l'électricité pour les acheteurs obligés. Conformément à l'article L. 121-6 du code de l'énergie, ceux-ci sont tenus de rembourser à l'État, le différentiel entre la valorisation qu'ils font des productions d'énergie renouvelable et le prix d'achat garanti auquel ils les ont acquises mais, en l'état, aucun texte n'encadre les modalités dans lesquelles évaluer ces recettes et effectuer leur reversement au profit de l'État. En effet, si l'article L. 121-6 du code de l'énergie prévoit bien le reversement des recettes induites par les obligations de service public, en particulier pour les acheteurs obligés, la loi n'habilite la commission de régulation de l'énergie à intervenir que lorsque les obligations de service donnent lieu à une compensation par l'État des charges qu'elles induisent pour les opérateurs. Cette situation inédite n'avait pas été anticipée par le législateur, ni a fortiori par le pouvoir réglementaire. Ainsi, les articles R. 121-22 et suivants du code de l'énergie n'encadrent que les opérations de compensation par l'État des charges induites par les obligations de service public et non celles liées au reversement lorsque lesdites obligations donnent lieu à des recettes pour les opérateurs concernés. C'est dans ce contexte que la commission de régulation de l'énergie a délibéré le 3 novembre 2022 afin de réévaluer les recettes - désignées par l'autorité de régulation « charges négatives » - induites par l'obligation d'achat pour 2023, ces recettes ayant déjà fait l'objet d'une délibération le 13 juillet 2022. Cette nouvelle évaluation, qui se fonde notamment sur des réalités de marché de gros très évolutives, est de nature à mettre en grande difficulté les acheteurs obligés et, parmi eux, les entreprises locales de distribution (ELD). En effet, les charges de trésorerie qui résultent de l'écart d'estimation basé sur la délibération de novembre et les réalités du marché de gros actuelles – orientées fortement à la baisse par rapport aux valeurs connues en novembre - sont considérables. Une telle situation, si elle perdurait, pousserait certaines des ELD à la cessation de paiement d'ici l'été 2023. Des solutions conjoncturelles sont à l'étude au sein du ministère de la transition énergétique, mais une telle situation pourrait se reproduire à l'avenir. Aussi, il lui demande s'il est envisagé d'établir un cadre légal et réglementaire plus sécurisant pour les acheteurs obligés et plus particulièrement les ELD, afin que leur qualité d'acheteurs obligés, au service de la transition énergétique dans les territoires, ne mettent pas en péril les missions de service public dont elles ont par ailleurs la charge (gestionnaire de réseaux de distribution, tarifs réglementés de vente de l'électricité, investissements dans de nouveaux moyens de production, …).

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Réponse du Secrétariat d'État auprès de la ministre de l'Europe et des affaires étrangères, chargé du développement, de la francophonie et des partenariats internationaux publiée le 15/02/2023

Réponse apportée en séance publique le 14/02/2023

Mme le président. La parole est à M. Philippe Mouiller, auteur de la question n° 391, adressée à Mme la ministre de la transition énergétique.

M. Philippe Mouiller. Ma question s'adresse à Mme la ministre de la transition énergétique et porte sur les conséquences financières de l'envolée et de la volatilité des prix de gros de l'électricité pour les acheteurs obligés.

Conformément à l'article L. 121-6 du code de l'énergie, ceux-ci sont tenus de rembourser à l'État le différentiel entre la valorisation qu'ils font des productions d'énergie renouvelable et le prix d'achat garanti auquel ils les ont acquises.

Toutefois, en l'état, aucun texte n'encadre les modalités dans lesquelles s'effectuent l'évaluation de ces recettes et leur reversement au profit de l'État.

En effet, si l'article L. 121-6 du code de l'énergie prévoit bien le reversement des recettes induites par les obligations de service public, en particulier pour les acheteurs obligés, la loi n'habilite la Commission de régulation de l'énergie (CRE) à intervenir que lorsque les obligations de service donnent lieu à une compensation par l'État des charges qu'elles induisent pour les opérateurs.

Cette situation inédite n'avait pas été anticipée par le législateur, ni a fortiori par le pouvoir réglementaire.

Ainsi, les articles R. 121-22 et suivants du code de l'énergie n'encadrent que les opérations de compensation par l'État des charges induites par les obligations de service public et non les opérations de reversement censées intervenir lorsque lesdites obligations donnent lieu à des recettes pour les opérateurs concernés.

C'est dans ce contexte que la CRE a délibéré, le 3 novembre dernier, afin de réévaluer pour 2023 ces recettes, désignées par l'autorité de régulation « charges négatives », qui avaient déjà fait l'objet d'une délibération le 13 juillet 2022.

Cette nouvelle évaluation, qui se fonde notamment sur des réalités de marché de gros très évolutives, est de nature à mettre en grande difficulté les acheteurs obligés et, parmi eux, les entreprises locales de distribution (ELD).

En effet, les charges de trésorerie qui résultent de l'écart entre l'estimation basée sur la délibération de novembre et les réalités actuelles du marché de gros sont telles qu'elles pourraient causer des cessations de paiements d'ici à l'été prochain.

Aussi, madame la secrétaire d'État, est-il envisagé d'établir un cadre légal et réglementaire plus sécurisant pour les acheteurs obligés, plus particulièrement pour les ELD ?

Je vous remercie de la réponse que vous voudrez bien apporter à cette question technique.

Mme le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Chrysoula Zacharopoulou, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'Europe et des affaires étrangères, chargée du développement, de la francophonie et des partenariats internationaux. Monsieur le sénateur Philippe Mouiller, je vous réponds au nom de ma collègue Agnès Pannier-Runacher, ministre de la transition énergétique, qui vous prie de bien vouloir excuser son absence.

Comme vous l'avez rappelé, la situation actuelle conduit à une contribution positive des énergies renouvelables aux finances publiques.

La réévaluation exceptionnelle des charges de service public décidée au mois de novembre 2022 a en effet conduit à un ajustement des nouveaux reversements, alors que les prix de marché ont baissé depuis lors.

Pour pallier ce problème, d'une part, la Commission de régulation de l'énergie a annoncé aux opérateurs son engagement de réviser ses évaluations de charges pour l'année 2023 à l'occasion de sa délibération de juillet 2023, ce qui permettra un recalibrage direct des reversements.

D'autre part, les services de l'État proposeront prochainement aux acteurs concernés, notamment aux entreprises locales de distribution, des solutions transitoires, y compris conventionnelles, afin de pouvoir éviter les cas où un stress de trésorerie insupportable se produirait au cours du premier semestre 2023. À cet égard, aucun reversement contraint ne sera mis en œuvre si un doute persiste sur son montant.

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