Question de M. ARNAUD Jean-Michel (Hautes-Alpes - UC) publiée le 02/03/2023

Question posée en séance publique le 01/03/2023

M. Jean-Michel Arnaud. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, alors que l'agriculture biologique a longtemps été favorisée par les pouvoirs publics au nom de l'impératif écologique, elle est aujourd'hui à la marge des priorités gouvernementales : le plan national stratégique, dans le cadre de la politique agricole commune (PAC), supprime l'aide aux agriculteurs bio, l'Agence Bio est sous-financée et les dispositifs de soutien sont largement insuffisants.

Depuis quelques décennies, les pouvoirs publics promettaient un soutien massif aux pratiques vertueuses, une souveraineté alimentaire accrue et de meilleurs débouchés pour nos agriculteurs. Quelle est la situation réelle aujourd'hui ?

Les modes de production sobres en énergie et respectueux de la biodiversité sont peu reconnus et nous constatons une baisse des ventes des produits bio, depuis la crise sanitaire notamment.

Le contexte économique ne conforte en aucun cas les conditions de travail de ceux qui nous nourrissent : hausse insupportable des coûts de production, freinage des exportations, signature de traités de libre-échange comme celui avec le Mercosur, qui sont souvent synonymes de concurrence déloyale.

Le marché bio est en situation de surproduction et la demande est toujours plus morose au regard de l'inflation actuelle.

Ce déclin est comme un ver dans la pomme : il ne faut pas laisser pourrir la situation.

Que compte faire le Gouvernement pour remédier à la situation particulièrement difficile des 60 000 exploitants agricoles bio de ce pays ? (Applaudissements sur les travées des groupes UC et GEST.)


Réponse du Ministère auprès de la Première ministre, chargé du renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement publiée le 02/03/2023

Réponse apportée en séance publique le 01/03/2023

M. Olivier Véran, ministre délégué auprès de la Première ministre, chargé du renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, monsieur le sénateur Jean-Michel Arnaud, j'ai répondu précédemment à votre collègue Joël Labbé sur le bio.

Nous aimons le bio ! Nous avons besoin de nourrir l'ensemble des Françaises et des Français, mais aussi de développer notre filière bio, pour la consommation nationale comme pour l'export.

À cet égard, l'un des leviers – j'y consacrerai d'ailleurs l'essentiel de ma réponse – est la restauration collective. La loi dite Égalim 1 (loi pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous) a fixé un objectif de 50 % de produits de qualité et durables dans la restauration collective, dont 20 % de bio.

Nous souhaitons actionner plus fortement ce levier majeur, que ce soit dans les écoles, collèges et lycées, mais aussi dans les établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) ou dans les entreprises.

C'est aussi une manière de changer durablement les pratiques de consommation alimentaire que d'introduire massivement le bio dans la restauration collective.

Il se trouve que, depuis 2018, nous avons fait face à des événements et vents contraires. D'abord, la crise du covid-19 a fait perdre transitoirement à la restauration collective 40 % de son chiffre d'affaires, du fait des mesures sanitaires.

Ensuite, le contexte d'inflation que nous connaissons depuis plusieurs mois rend difficile un bilan précis pour cette année. Néanmoins, grâce aux résultats Égalim que les gestionnaires de restaurants collectifs doivent renseigner sur la plateforme « Ma cantine » nous disposerons prochainement de données plus détaillées, qui seront naturellement communiquées au Parlement.

Il faudra également accompagner la filière, car l'amélioration de la qualité des repas en restauration collective passe aussi par la lutte contre le gaspillage alimentaire et par une réflexion sur les quantités servies ou sur les recettes utilisées.

La Première ministre a publié le 29 septembre dernier une circulaire, qui permet d'aider tous les établissements publics à renégocier leurs contrats, et donc à acheter au juste prix.

En outre, les différents ministres concernés réfléchissent à des dispositifs adaptés à chaque segment de la filière de restauration collective.

Nous voulons atteindre l'objectif Égalim. Il représente un potentiel d'augmentation du chiffre d'affaires de la filière d'environ 10 %, qui viendra plus que compenser les baisses des ventes en bio constatées pour l'année 2022. (MM. François Patriat et Thani Mohamed Soilihi applaudissent.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Michel Arnaud, pour la réplique.

M. Jean-Michel Arnaud. Monsieur le ministre, il nous faut une politique ambitieuse de promotion de la filière bio et de soutien de l'agriculture biologique.

Il nous faut également clarifier les labels existants ou encore inclure systématiquement l'agriculture biologique – vous l'avez rappel頖 dans les projets alimentaires territoriaux.

La souveraineté alimentaire doit aussi passer par une meilleure attractivité du métier d'agriculteur. Je pense particulièrement en cet instant aux arboriculteurs. Alors que le groupe Carrefour met en tête de gondole des pommes polonaises, nos arboriculteurs ne s'en sortent pas : il leur manque 20 centimes de marge. Les marges ne sont pas aujourd'hui à la hauteur des coûts de production.

Tout comme l'agriculture conventionnelle, l'agriculture biologique est confrontée à l'impossibilité de lutter contre les espèces invasives. Alors que nombre de traitements sont homologués à l'échelle européenne, la France maintient, par le biais de l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses), une interdiction générale de plusieurs traitements, y compris bio, qui se cantonne à des dérogations successives et envoie un message négatif aux clients.

Comme je l'ai souvent entendu dans les travées du salon international de l'agriculture voilà quelques heures maintenant : « En France, nous avons trop souvent le droit de manger ce que nous n'avons pas le droit de produire. » (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

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