Question de Mme VOGEL Mélanie (Français établis hors de France - GEST) publiée le 16/03/2023

Question posée en séance publique le 15/03/2023

M. le président. La parole est à Mme Mélanie Vogel, pour le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires. (Applaudissements sur les travées des groupes GEST, SER et CRCE.)

Mme Mélanie Vogel. Ma question s'adresse à M. le ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion.

Monsieur le ministre, dans une démocratie parlementaire normale, aujourd'hui serait la journée de l'apaisement.

Après des années de négociation avec les partenaires sociaux et toutes les forces politiques, un consensus sur l'avenir du travail et de notre système de retraites aurait été trouvé et une réforme des retraites serait en voie d'être adoptée largement et paisiblement. Tel est le modèle décisionnel qui règne dans tous les pays européens que vous aimez tellement prendre en exemple.

Mais pas ici – parce qu'ici, c'est la France !

Ici, le Gouvernement aime avoir raison tout seul, en n'écoutant personne et en agissant contre tout le monde. Qu'importe que personne ne soit d'accord avec lui !

En effet, personne, monsieur le ministre, sinon une partie des Républicains, n'est d'accord avec vous. Vous êtes tout seul : 75 % de la société française rejettent cette réforme, 93 % des actifs y sont opposés, aucun syndicat ne la défend. La majorité parlementaire elle-même est incertaine.

Alors que les Français sont encore massivement dans la rue, sept députés – qui n'ont ni voté ni examiné le texte – et sept sénateurs – auxquels le Gouvernement a imposé un vote bloqué – ont décidé à huis clos de prendre deux ans de repos aux plus précaires.

Quant à vous, vous hésitez entre une majorité de quelques voix, arrachée contre un pays transformé en poudrière, ou l'utilisation du 49.3, c'est-à-dire l'adoption sans vote d'une réforme minoritaire.

Ces deux options, monsieur le ministre, sont une folie.

Ce n'est pas parce que des outils sont légaux que leur utilisation est légitime. Ce n'est pas parce que des procédés sont constitutionnels qu'ils répondent aux standards démocratiques modernes des démocraties dignes de ce nom.

Arrêtez les frais ! À ce niveau de tension sociale et démocratique, l'urgence, ce n'est plus d'adopter cette réforme des retraites, c'est de sortir de ce fonctionnement mortifère et d'organiser démocratiquement la transition vers une République véritablement parlementaire. (Applaudissements sur les travées des groupes GEST, SER et CRCE.)

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Réponse du Ministère du travail, du plein emploi et de l'insertion publiée le 16/03/2023

Réponse apportée en séance publique le 15/03/2023

M. le président. La parole est à M. le ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion.

M. Olivier Dussopt, ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion. Madame la sénatrice Vogel, il me semble que votre question est plutôt une interpellation.

Si j'ai bien compris, vous considérez que nous ne nous trouvons pas dans une démocratie moderne. (Non ! sur des travées du groupe GEST.) C'est pourtant bien le cas.

Nous sommes dans une démocratie qui permet l'expression des oppositions et des divergences – les mobilisations que vous avez évoquées en apportent la démonstration la plus flagrante. Elle les autorise cependant dans la limite du respect de l'ordre public.

Respecter l'ordre public, c'est éviter les débordements, ce que les organisations syndicales font très bien quand elles organisent des manifestations.

Respecter l'ordre public, c'est aussi condamner les coupures sauvages d'électricité qui visent les permanences et les habitations des élus, notamment celles des sénateurs. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI, INDEP, UC et Les Républicains.) C'est éviter et condamner les coupures qui fragilisent les commerces, les établissements scolaires, les administrations, qui mettent en danger ceux qui sont hospitalisés chez eux et qui ont besoin d'électricité pour des respirateurs ou des appareils médicaux.

Mme Laurence Cohen. Quelle dramatisation !

M. Olivier Dussopt, ministre. Enfin, respecter l'ordre public, c'est respecter le fonctionnement de nos institutions.

J'ai eu le plaisir de passer ici même, avec vous, dix jours de débats, durant lesquels le Sénat a pu évoquer chacun des articles, chacune des dispositions du texte.

M. Guillaume Gontard. C'est faux !

M. Hussein Bourgi. Et le vote bloqué ?

M. Olivier Dussopt, ministre. Vous nous rappelez, madame la sénatrice, que cela s'est conclu par un vote unique. C'est vrai. Ce fut aussi le cas ici même, lors de l'examen de la réforme de 2010, ou à l'Assemblée nationale lors de celui de la réforme de 2013, ou encore sur la loi relative à la sécurisation de l'emploi. Il s'agit d'une procédure constitutionnelle qui a un objectif et un mérite : elle permet de contourner l'obstruction.

M. Pierre Laurent. Non ! C'est un passage en force !

M. Olivier Dussopt, ministre. Si tant est que nous nous posions la question, oui, il y a bien eu obstruction.

M. Jean-Marc Todeschini. N'importe quoi !

M. Olivier Dussopt, ministre. Si elle ne fut pas de la même nature que celle qui a sévi à l'Assemblée nationale, il y a bien eu obstruction. Par le dépôt de presque neuf mille amendements et sous-amendements, vous avez méthodiquement entendu paralyser le Sénat et lui retirer sa capacité à délibérer.

La majorité du Sénat et le Gouvernement ont su y répondre, afin de permettre à cette assemblée de se prononcer. Ainsi, samedi soir, le Sénat a adopté la réforme avec toutes ses dispositions.

Je forme le vœu que la commission mixte paritaire permette maintenant de trouver un texte de consensus entre l'Assemblée nationale et le Sénat. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI, INDEP, UC et Les Républicains.)

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