Question de Mme BONNEFOY Nicole (Charente - SER) publiée le 23/03/2023

Mme Nicole Bonnefoy appelle l'attention de M. le ministre de la santé et de la prévention sur la situation dégradée des hôpitaux de Charente et notamment celle de l'hôpital de Ruffec.

Le maintien de services de santé de proximité est essentiel pour garantir l'égalité d'accès aux soins et particulièrement en zone rurale.

La situation de l'hôpital de Ruffec est caractéristique de la désertification médicale qui atteint nos territoires. Aujourd'hui, la survie du service de médecine polyvalente est en suspens. Depuis 9 mois, le service fonctionne uniquement grâce aux chefs par interim qui se succèdent, le dernier étant arrivé pour 3 semaines, quittant le service le 27 mars 2023, faisant planer encore la menace d'une fermeture du service.

Or, le risque que les soignants quittent l'hôpital au profit d'un autre établissement augmenterait exponentiellement avec le temps de fermeture de ce service. La situation appelle donc une réponse urgente, adaptée aux besoins du service et des 80 000 habitants du bassin ruffecois.

Le service concerné comprend 29 lits qui constituent le soutien indispensable des autres services encore en fonctionnement dans cet hôpital. Il est aussi le service de proximité pour des soins palliatifs, nécessaires à une fin de vie digne, proche des familles. Sans ce service, les patients doivent être redirigés vers d'autres hôpitaux, parfois à plus de 50 km du domicile.

Malgré l'engagement sans faille des collectivités territoriales, au travers du dispositif Charente santé, l'hôpital de Ruffec ne peut se passer du soutien de l'exécutif. En plus de l'exigence de santé publique et d'accès aux soins, c'est la confiance des citoyens dans la réponse de l'État et l'attractivité du territoire qui sont à sauvegarder avant qu'il ne soit trop tard.

Les concertations lancées par les agences régionales de santé (ARS) dans le cadre du « conseil national de refondation » (CNR), les consultations citoyennes pour co-construire la feuille de route des CNR régionaux sont intéressantes mais ne répondent pas aux attentes très concrètes des habitants.

Ainsi, elle souhaiterait connaître les mesures qu'il a prévues pour traiter la problématique de cet hôpital, dont la crise sanitaire a renforcé son caractère essentiel pour les Charentaises et les Charentais.

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Réponse du Ministère auprès du ministre de la santé et de la prévention, chargé de l'organisation territoriale et des professions de santé publiée le 05/04/2023

Réponse apportée en séance publique le 04/04/2023

Mme la présidente. La parole est à Mme Nicole Bonnefoy, auteure de la question n° 529, adressée à M. le ministre de la santé et de la prévention.

Mme Nicole Bonnefoy. Madame la ministre, je souhaite vous interroger sur la situation de l'hôpital de Ruffec, mais aussi plus globalement sur la désertification médicale dans mon département de Charente.

Dans le cas de Ruffec, nous avons obtenu très récemment un sursis grâce à l'arrivée in extremis, la semaine dernière, d'un médecin intérimaire. Ce recrutement opportun permettra de maintenir les vingt-neuf lits menacés et d'éviter la fermeture du service de médecine polyvalente.

Mais cela ne change pas la situation sur le long terme. J'en veux pour exemple le centre hospitalier d'Angoulême, qui a dû fermer son service d'angioplastie le week-end du fait d'un manque de médecins intérimaires. L'intérim est devenu pour bon nombre d'hôpitaux un mal nécessaire, dont le sevrage, qu'implique la loi du 26 avril 2021 visant à améliorer le système de santé par la confiance et la simplification, dite loi Rist, va grandement fragiliser les plannings des hôpitaux publics. Il arrive parfois que plus de 50 % des effectifs soient concernés dans les services d'urgence, comme ceux de Cognac.

On peut également regretter que cette loi ne concerne que le public et qu'elle épargne les cliniques privées, qui sont pourtant en tête des rémunérations pour les pays de l'OCDE. Le Ségur de la santé a malheureusement oublié la permanence des soins et la pénibilité. La loi Rist, qui entre en application ce mois-ci, n'a pas été suffisamment anticipée. Pire, vous combattez l'intérim avant d'avoir restauré l'attractivité des carrières hospitalières.

Votre annonce, bienvenue, de la semaine dernière relative à la revalorisation de 20 % du plafond pour les intérimaires et à la prime de solidarité territoriale (PST) démontre votre impréparation lorsqu'il s'agit de penser l'accès aux soins dans nos territoires ruraux.

Vous savez l'ensemble des élus locaux mobilisés pour l'aide à l'installation de praticiens. Quelles mesures prévoyez-vous de mettre en place pour soutenir nos hôpitaux de proximité, comme celui de Ruffec, et pour prévenir des risques de fermeture de services dans nos territoires ?

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée auprès du ministre de la santé et de la prévention, chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé. Madame la sénatrice, face aux tensions actuelles sur la démographie des professionnels du soin, le centre hospitalier de Ruffec fait face à d'importantes difficultés et doit périodiquement ajuster son fonctionnement à la réalité des personnels présents, avec des réductions de capacités dans les services de médecine ou de soins de suite et de réadaptation (SSR).

Dans ce contexte, afin de maintenir la continuité des soins, l'établissement est amené à faire appel à des remplaçants intérimaires pour fonctionner.

Le centre hospitalier de Ruffec présente une dégradation de ses résultats financiers due à une baisse d'activité et à des charges majorées, du fait notamment de ce recours à l'intérim.

Cet intérim médical, par ailleurs, pour protéger les hôpitaux, est plafonné dans ses montants depuis hier, date d'entrée en application de la loi Rist vous l'avez souligné.

L'ARS accompagne avec la plus grande attention l'hôpital de Ruffec, qui a ainsi pu bénéficier de mesures de soutien : 1,127 million d'euros au titre de la restauration des marges financières de l'établissement ; 674 000 euros supplémentaires pour soutenir l'hôpital, soit un total de 1,8 million d'euros, qui fait l'objet d'une dotation sur dix ans.

L'arrivée d'une nouvelle direction pour les centres hospitaliers d'Angoulême, de La Rochefoucauld et de Ruffec permettra également d'impulser une dynamique de solidarité territoriale et de consolidation de l'hôpital de Ruffec dans son environnement, en lien avec les autres établissements du territoire, en s'appuyant sur de réels atouts : un centre périnatal de proximité reconnu et actif ; des consultations avancées ; des liens avec les professionnels libéraux du territoire, notamment dans le cadre d'une communauté professionnelle territoriale de santé (CPTS) en construction ; enfin, des équipes mobiles engagées dans la mise en oeuvre de soins de proximité.

Un travail est également engagé sur l'attractivité médicale autour de projets nouveaux, en lien avec le service de médecine : développement d'hospitalisations de jour ; création de postes partagés entre le centre hospitalier d'Angoulême et celui de Ruffec.

Par ailleurs, à court terme, une solution via un contrat de remplacement a été trouvée pour permettre la continuité de fonctionnement du service de médecine du centre hospitalier de Ruffec pour le mois d'avril, et les équipes du centre hospitalier en lien avec l'ARS recherchent des solutions pérennes.

Mme la présidente. La parole est à Mme Nicole Bonnefoy, pour la réplique.

Mme Nicole Bonnefoy. Il n'est pas une semaine sans qu'un territoire soit menacé par une fermeture de lit, de service hospitalier, ou par le non-remplacement d'un médecin généraliste.

Quand allez-vous prendre la mesure de la gravité de la désertification médicale de notre pays ? Les réponses que vous apportez ne sont pas à la hauteur !

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