Question de M. GUÉRINI Jean-Noël (Bouches-du-Rhône - RDSE) publiée le 09/03/2023

M. Jean-Noël Guérini appelle l'attention de Mme la ministre de la transition énergétique sur les difficultés de recrutement dans la filière nucléaire.
Auditionné le 13 décembre 2022 par la commission d'enquête de l'Assemblée nationale visant à établir les raisons de la perte de souveraineté et d'indépendance énergétique de la France, un ancien président d'Électricité de France (EDF) n'a pas mâché ses mots pour décrire la situation : « dans ce paysage où le nucléaire était considéré comme infâme et où le nucléaire n'avait aucun avenir (…) on est confronté depuis dix ans à une panne des recrutements de personnes de qualité ». Or pour répondre aux objectifs désormais définis – modernisation du parc nucléaire existant, constructions de six «evolutionary power reactor) » ou réacteurs EPR2, études sur la construction de huit EPR2 additionnels –, une main-d'oeuvre qualifiée s'avère nécessaire : mécaniciens, agents d'exploitation, chimistes, automaticiens, chaudronniers, robinetiers, électriciens, ingénieurs en maintenance ou exploitation, techniciens en sécurité, agents de terrain, agents logistiques, planificateurs... Le délégué général à la qualité industrielle et aux compétences nucléaires d'EDF estime ainsi le besoin minimum à 10 000 à 15 000 personnes par an sur la période 2023-2030, soit environ 100 000 au total, au lieu des 5 000 recrutements annuels effectués entre 2019 et 2022.
En conséquence, il lui demande ce qui peut être mis en oeuvre afin de former et recruter celles et ceux qui maîtriseront les savoir-faire indispensables à une filière nucléaire efficace.

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Réponse du Ministère de la transition énergétique publiée le 18/05/2023

Le Gouvernement se mobilise pleinement avec tous les acteurs concernés pour que la filière nucléaire puisse s'appuyer sur des compétences suffisantes, en quantité et en qualité, pour répondre aux objectifs de politique énergétique ambitieux que poursuit la France en matière tant de sécurité d'approvisionnement que de décarbonation, au travers notamment de la relance du nucléaire souhaitée par le Gouvernement. Tout d'abord, le nucléaire a été intégré aux secteurs stratégiques français qui sont au coeur du plan France Relance lancé par le Gouvernement en 2020, avec une enveloppe dotée de 470 Meuros. Grâce à cette initiative, la filière nucléaire a pu engager depuis 2020 des actions concrêtes qui ont notamment débouché sur la création de formations spécialisées, dont une école de soudage à Cherbourg, qui constituera un atout pour la filière dans la durée, mais également de nombreux autres dispositifs en faveur de la modernisation de la filière et des compétences (bourses du nucléaire, Pass Nucléaire, Fonds France Nucléaire…). Le Gouvernement a par ailleurs publié en février 2022 le rapport « Travaux relatifs au nouveau nucléaire », ainsi que les deux synthèses des audits externes mandatés par l'Etat en 2019 puis en 2021, sur les modalités de mise en oeuvre d'un programme de construction de six réacteurs nucléaires de type EPR2. Ce rapport, prévu dans la programmation pluri-annuelle de l'énergie actuellement en vigueur, abordait notamment la capacité de la filière industrielle à s'organiser en matière de compétences. D'autre part, le Gouvernement prépare, comme le prévoit les orientations prises par le Conseil de politique nucléaire du 3 février dernier, un véritable plan Marshall des compétences en 2023. Ainsi, en réponse à une demande de la ministre de la Transition énergétique et du ministre délégué à l'Industrie du 20 janvier 2023, la filière nucléaire s'est engagée dans une action intitulée « Match », coordonnée par le Groupement des industriels français de l'énergie nucléaire (GIFEN). Cette action consiste à recenser, d'une part, les besoins en compétences et, d'autre part, les ressources de formation nécessaires pour mettre en oeuvre le programme nucléaire envisagé. Le 21 avril 2023, le GIFEN a remis aux Ministres ce rapport qui prévoit un besoin de recrutement de 100 000 personnes dans la filière nucléaire française sur la période 2023-2033, tant du côté des fournisseurs que des grands donneurs d'ordres (EDF, Framatome, Orano, CEA et Andra). Ce rapport souligne également la nécessité que les plans de performance opérationnelle engagés par les industriels soient poursuivis et amplifiés. Ce rapport est disponible au lien suivant : https://www.ecologie.gouv.fr/relance-du-nucleaire-agnes-pannier-runacher-et-roland-lescure-recoivent-rapport-du-gifen-0. Le 21 avril également, et en partenariat avec l'Université des métiers du nucléaire, les ministres ont également lancé un grand concours de l'attractivité des métiers du nucléaire, qui décernera d'ici juillet le titre « d'Ambassadeur du nucléaire » aux parties prenantes de la filière qui se seront le plus mobilisées auprès des collégiens, lycéens et plus largement étudiants de la filière nucléaire pour présenter les métiers du nucléaire. Les inscriptions à ce concours se feront via l'adresse suivante : contact@monavenirdanslenucleaire.fr et vise à apporter une première réponse concrète à très court terme à l'enjeu d'attractivité identifié par le Gifen. Le Gouvernement a également demandé le 20 janvier dernier à l'Université des métiers du nucléaire (UMN), association crée en 2021 par les acteurs de la filière pour dynamiser les dispositifs de formation du secteur nucléaire, de lui remettre un plan d'actions détaillé sur les compétences au début du mois de juin 2023, en vue de répondre aux besoins identifiés dans le rapport « Match », avec des actions concrêtes dès la rentrée de septembre 2023. Ce rapport sera remis aux Ministres le 2 juin. Enfin, un audit externe mandaté par l'Etat est en cours pour s'assurer que les initiatives de la filière sont adaptées aux enjeux de même que les mesures d'accompagnement mises en oeuvre par l'Etat, notamment dans le cadre de France 2030, qui prévoit d'ores et déjà 1,2 Mdeuros d'investissements dans la filière. Cet audit remettra ses conclusions à l'été 2023 et permettra de nourir la préparation d'une stratégie pluriannuelle en matière de compétences dans le nucléaire.

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