Question de Mme ESTROSI SASSONE Dominique (Alpes-Maritimes - Les Républicains) publiée le 09/03/2023

Mme Dominique Estrosi Sassone attire l'attention de M. le ministre de la santé et de la prévention au sujet de l'étiquetage de la cholécalciférol, principale forme de vitamine D.
En effet, dans des doses adaptées à chaque personne, la vitamine D présente, selon l'académie nationale de médecine, de nombreux aspects bénéfiques : sur le métabolisme phospho-calcique et la prévention des maladies osseuses (rachitisme et ostéomalacie) mais aussi dans d'autres affections telles que les infections, les maladies auto-immunes, le diabète, les maladies cardiovasculaires et les cancers par inhibition des cellules tumorales. Pour toutes ces raisons, elle a recommandé « une supplémentation vitaminique D dans la population française » dans un rapport de 2012, confirmé en 2020.
En octobre 2022, l'agence nationale de sécurité sanitaire (Anses) a donc recommandé de ne pas inclure la vitamine D dans le dispositif d'affichage des perturbateurs endocriniens puisqu'à faible dosage le bénéfice médical est reconnu. Plusieurs États membres de l'Union européenne ont également assoupli leur législation et demandé une norme européenne moins stricte.
Pourtant, dans le cadre de nouveaux projets d'arrêtés, le Gouvernement maintient le cholécalciférol dans la liste des perturbateurs endocriniens, comme en témoigne le nouvel affichage spécifique à la vitamine D prévu par les ministères de la santé et de la transition écologique : « contient du cholécalciférol : cette substance présente des bénéfices sur la santé dès lors que sa concentration dans le produit respecte les limites supérieures de sécurité fixées par les autorités sanitaires (se référer à la notice du produit ou aux informations du fabricant). Au-delà de ces limites, la substance présente des propriétés de perturbation endocrinienne avérées ou présumées. En cas de doute, demandez l'avis d'un professionnel de santé. »
Si cette mention met en avant les bienfaits de la vitamine D, elle est de nature à inquiéter les consommateurs dès lors qu'elle sera affichée uniquement sur des produits dit « sûrs ». Les produits sur lesquels l'affichage sera présent sont, en effet, autorisés sur le sol français car ils respectent les limites maximales autorisées et ont un dosage considéré comme bénéfique pour le consommateur.
Toujours dans son rapport d'octobre 2022, l'Anses a ainsi précisé que « l'identification du cholécalciférol sur les étiquettes de produits alimentaires en contenant est de nature à apporter une information erronée sur le risque, dans la mesure où les apports journaliers de vitamine D associés à la consommation d'aliments sont inférieurs à la limite supérieure de sécurité définie pour le cholécalciférol et que, de plus, un évitement de ces produits accentuerait la situation de mauvaise couverture des besoins qui concerne déjà une fraction importante de la population (34,5 % de la population avait un statut vitaminique D insuffisant en 2015) comme le rappelle le haut conseil de la santé publique dans son rapport du 21 juin 2022 recommandant la consommation d'aliments riches en vitamine D. Potentiellement, les recommandations de consommation associées à l'étiquetage du cholécalciférol au même titre que d'autres perturbateurs endocriniens avérés tel que le bisphénol A, pourrait conduire à amoindrir la perception des risques associés à ces derniers et ainsi à augmenter l'exposition correspondante du public. »

Elle lui demande s'il entend modifier les projets d'arrêté qui ont été présentés aux professionnels du secteur de la pharmacie et des compléments alimentaires, mais également comment il entend garantir l'accès à la vitamine D à tous les âges de la vie sans que l'étiquetage ne mène à une confusion avec les perturbateurs endocriniens reconnus comme tels par les autorités de santé.

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Réponse du Ministère de la santé et de la prévention publiée le 06/07/2023

Il est signalé la présence de la vitamine D (cholécalciférol) dans la liste des substances identifiées comme perturbateurs endocriniens pour la mise en oeuvre de la loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire, dite « AGEC ». L'article 13-II de cette dernière (codifié à l'article L. 5232-5 du Code de la santé publique) prévoit que toute personne mettant sur le marché des produits à destination des consommateurs, contenant des substances dont l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES) qualifie les propriétés de perturbation endocrinienne avérées ou présumées « met à la disposition du public par voie électronique, dans un format ouvert, aisément réutilisable et exploitable par un système de traitement automatisé, pour chacun des produits concernés, les informations permettant d'identifier la présence de telles substances dans ces produits ». Cette obligation s'inscrit dans les objectifs de la 2ème Stratégie nationale sur les perturbateurs endocriniens (SNPE 2) et vise à assurer aux citoyens une information transparente sur la présence de perturbateurs endocriniens (PE) dans les produits de consommation. Pour l'application de cet article 13-II de la loi AGEC, un projet d'arrêté, prévu par le décret n° 2021-1110 du 23 août 2021, doit fixer la liste des substances présentant des propriétés de perturbation endocrinienne. Le cholécalciférol (ou vitamine D3) a été identifié comme possédant des propriétés perturbant le système endocrinien dans le cadre de son évaluation au titre du règlement européen (UE) n° 528/2012 sur les produits biocides en vue de son autorisation en avril 2019 pour un usage rodenticide. Cette substance a ainsi été inscrite dans la liste I des substances identifiées comme PE au niveau européen publiée sur le site Edlists issu d'une coopération entre plusieurs Etats-membres dont la France. Dès lors et conformément aux recommandations de l'ANSES, il est prévu de citer le cholécalciférol dans la liste des PE avérés et présumés annexée au projet d'arrêté précité pour l'application de la loi AGEC, conformément aux recommandations de l'ANSES. L'agence a de plus été saisie le 30 mai 2022 afin d'identifier les éléments scientifiques pour préciser le profil toxicologique du cholécalciférol, notamment sur la fonction endocrine, et les impacts sanitaires d'une exposition à cette substance justifiant l'inclusion de cette substance dans la liste des PE avérés et présumés annexée au projet d'arrêté. Dans ce cadre, l'ANSES s'est rapprochée des autres agences et institutions sanitaires afin d'assurer la cohérence entre les différents travaux menés sur la vitamine D. L'avis de l'ANSES, publié le 27 octobre 2022, souligne les bénéfices sur la santé du cholécalciférol jusqu'à une certaine dose alors que « l'effet délétère résultant du dépassement des capacités de régulation homéostatique (résultant directement de son mode d'action endocrinien) intervient à un niveau de dose très élevé, bien supérieur aux doses alimentaires ». En outre, pour la mise en oeuvre de l'article 13-II de la loi AGEC, un second projet d'arrêté a été rédigé pour préciser les modalités relatives au contenu et aux conditions de présentation des informations. Il a été soumis fin décembre 2021 à la consultation des parties prenantes et a été notifié à la Commission européenne le 17 mars 2023, avec un troisième arrêté désignant l'application Scan4Chem comme moyen d'information alternatif à la mise à disposition des informations sur une page internet dédiée. En vue d'assurer la cohérence du dispositif réglementaire, les trois arrêtés d'application seront publiés simultanément au cours du second semestre 2023. Les projets d'arrêtés ont été adaptés afin de tenir compte spécifiquement des bénéfices pour la santé du cholécalciférol aux doses recommandées par les autorités sanitaires. De plus, un dispositif d'accompagnement doit être mis en place afin d'informer le grand public et les professionnels de santé, en rappelant les bénéfices de la vitamine D3 et les recommandations sanitaires, mais aussi les risques en cas de surdosage (secondaires à l'effet perturbateur endocrinien) qui peuvent entraîner des conséquences sanitaires graves, surtout chez les nouveau-nés et les personnes âgées (hypercalcémie, atteinte rénale, pouvant aller jusqu'au décès).

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