Question de Mme DREXLER Sabine (Haut-Rhin - Les Républicains-A) publiée le 06/04/2023

Mme Sabine Drexler interroge M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires sur les intentions de l'État pour envisager un transfert de gestion des canaux d'irrigation du Haut Rhin.
Entre 1950 et 1961, l'État a construit un canal de navigation et d'utilisation de la force hydraulique du fleuve, long de 50 km, étanche et parallèle au Rhin, entre Kembs et Vogelgrun ainsi que des canaux secondaires et tout un système de vannage pour apporter de l'eau aux agriculteurs et aux communes. Ces canaux en béton empêchent l'alimentation par infiltration naturelle à travers les graviers du fleuve de la nappe phréatique du Rhin, qui est une des plus grandes d'Europe et qui fournit l'eau potable à plus de 3 millions d'habitants et sert à l'irrigation et à l'industrie.
L'État laisse depuis une vingtaine d'année ce réseau tomber en ruine, réduit son alimentation au tiers de sa capacité et ne l'alimente plus durant tout l'hiver.
Le syndicat gemapien (syndicat mixte des cours d'eau et canaux de la plaine), regroupant les 39 communes et 5 intercommunalités du secteur ainsi que la Collectivité européenne d'Alsace (CeA) ont sollicité à deux reprises l'État pour transférer ces ouvrages selon les règles classiques de concession hydroélectriques du Rhin.
Ce syndicat a un projet de transformation de ces canaux bétonnés en rivières naturelles pour augmenter la biodiversité, qui s'est effondrée suite à la baisse de la nappe, et à nouveau favoriser l'alimentation de la nappe par infiltration en y adjoignant également des zones humides d'infiltration.
Alors que la ressource en eau est un sujet prioritaire dans tous les territoires et que l'environnement et la renaturation sont des objectifs de l'État, elle lui demande pourquoi il fait la sourde oreille et refuse encore d'ouvrir des discussions en vue d'une rétrocession de la gestion de ces canaux aux acteurs locaux.

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Réponse du Ministère auprès du ministre de l'intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé des collectivités territoriales et de la ruralité publiée le 14/04/2023

Réponse apportée en séance publique le 13/04/2023

M. le président. La parole est à Mme Sabine Drexler, auteur de la question n° 579, adressée à M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.

Mme Sabine Drexler. Alors que la gestion de l'eau défraie la chronique, permettez-moi d'évoquer un problème qui touche la nappe phréatique d'Alsace, la plus grande ressource en eau d'Europe. Dans les années 1950, l'État a construit un canal long de 50 kilomètres, parallèle au Rhin, utilisé pour la navigation et pour l'hydroélectricité. Ce canal étanche empêche l'alimentation par infiltration naturelle de la nappe phréatique, avec un volume manquant chiffré à un milliard de mètres cubes par an. Les conséquences en ont été un abaissement de plusieurs mètres de la nappe, un assèchement des puits, des rivières et des zones humides.

Pour limiter les effets de ces aménagements et à la suite de manifestations, l'État a construit un canal d'irrigation en béton, alimenté grâce à des droits d'eau sur le Rhin qui permettent une recharge de la nappe de plus de 500 millions de mètres cubes par an.

Toutefois, depuis une vingtaine d'années, l'État laisse ce réseau tomber en ruine et réduit son alimentation au tiers de sa capacité, quand il ne le coupe pas à certaines saisons. Les effets désastreux de cette politique se font sentir par des périodes de stress de la nappe phréatique de plus en plus fréquentes et par des rivières à sec.

Le syndicat de gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations (Gemapi) des canaux et rivières de la Plaine a sollicité l'État à plusieurs reprises pour qu'on lui transfère ces ouvrages et pour que vous fassiez appliquer les contrats de concession hydroélectrique du Rhin, en vertu desquels l'énergéticien doit prendre à sa charge les frais liés à ses incidences sur la nappe. Ce syndicat souhaite transformer ces canaux bétonnés en rivières naturelles pour que la biodiversité se développe à nouveau et pour réalimenter la nappe par infiltration naturelle. Malheureusement, l'État fait la sourde oreille.

Quand l'État acceptera-t-il de s'asseoir à la table des négociations avec le syndicat Gemapi du secteur et s'engagera-t-il à faire respecter la loi et les conditions des contrats de concession ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Dominique Faure, ministre déléguée auprès du ministre de l'intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité. Madame la sénatrice Drexler, au sein de l'État, c'est le ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire, et non le ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires, qui est actuellement propriétaire des canaux d'irrigation de la Hardt, ces derniers étant gérés en pratique par la direction départementale des territoires du Haut-Rhin.

Ces canaux ne sont pas bétonnés et ne sont donc pas étanches, sur toute leur longueur. Ils réalimentent la nappe grâce aux droits d'eau agricoles. Ils sont entretenus par l'État pour rester fonctionnels et restent dans un état que nous jugeons convenable. Ils permettent un transit d'eau avec un débit toujours maintenu, même sur une plus longue période, le chômage d'hiver ayant été nettement réduit.

L'État est favorable à un transfert vers une collectivité territoriale et l'a exprimé depuis de nombreuses années. Une collectivité pourrait mener un ambitieux projet de renaturation en allant au-delà des besoins agricoles stricts. Des discussions ont donc été menées par le ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire avec le département du Haut-Rhin, puis avec la Collectivité européenne d'Alsace depuis la création de celle-ci.

Une stratégie de transfert est en cours d'élaboration par le ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire, en collaboration avec les services déconcentrés de l'État concernés. Elle doit permettre d'assurer la transmission du foncier, des ouvrages et des moyens humains et financiers dans les meilleurs délais.

M. le président. La parole est à Mme Sabine Drexler, pour la réplique.

Mme Sabine Drexler. Nous avons un syndicat local volontaire, motivé pour travailler sur ce dossier. Il faudrait peut-être lui donner l'occasion de vous faire part de cette volonté.

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