Question de Mme NOËL Sylviane (Haute-Savoie - Les Républicains) publiée le 20/04/2023

Mme Sylviane Noël attire l'attention de Mme la ministre déléguée auprès du ministre de l'intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité sur la responsabilité du président d'un établissement public de coopération intercommunale (EPCI) dans le cadre de l'exercice de la compétence eau potable.

La loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République (dite loi NOTRe), modifiée en 2018, a prévu que le transfert de la compétence eau et assainissement aux communautés de communes serait obligatoire le 1er janvier 2026.

Cette compétence incombe de nombreuses responsabilités et son transfert n'a fait l'objet d'aucune anticipation sur ses conséquences techniques, administratives mais aussi juridiques sur les intercommunalités concernées.

En effet, il existe un vide juridique issue de la loi NOTre qui est problématique pour les présidents d'EPCI.

En matière d'eau potable, le transfert aux EPCI à fiscalité propre semble très lacunaire : la compétence eau n'a pas fait l'objet d'un transfert des pouvoirs de police du maire au président de l'intercommunalité alors que l'assainissement (tout comme l'habitat, la collecte des déchets, la gestion des aires d'accueil des gens du voyage), fait partie des compétences pour lesquelles ce pouvoir de police est bien transféré, avec possibilité pour le président de prendre des arrêtés.

Ainsi, dans un contexte marqué par de fortes périodes de sécheresse successives, la décision du maire de prendre un arrêté ou non ne relève que de lui. En cas de désaccord de celui-ci sur l'application de son pouvoir de police, le président de l'EPCI, qui bénéficie de la compétence, n'a juridiquement pas les moyens de faire suivre les prescriptions émanant par exemple de l'agence régionale de santé (ARS).

Cette situation problématique, sans action du Gouvernement, est susceptible d'engendrer des retards dans l'application d'une décision, dans des situations souvent urgentes motivées par un enjeu de santé et de salubrité publique.

Aussi, elle lui demande si le Gouvernement entend répondre à cette question sensible et y remédier en modifiant le cadre juridique entourant la responsabilité des présidents d'intercommunalités de manière à leur donner les moyens d'exercer leur compétence obligatoire qui leur est dévolue.

- page 2586


Réponse du Ministère auprès du ministre de l'intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé des collectivités territoriales et de la ruralité publiée le 14/09/2023

L'article L. 5211-9-2 du code général des collectivités territoriales (CGCT) permet le transfert, automatique ou facultatif, de certains pouvoirs de police spéciale du maire au président de l'établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre (EPCI-FP) lorsque cet EPCI-FP détient la compétence correspondante. Les matières dans lesquelles de tels transferts sont possibles sont définies de façon limitative, et incluent notamment les pouvoirs de police spéciale du maire dans le domaine de l'assainissement. Toutefois, il convient de souligner qu'un tel transfert n'est pas envisageable en matière d'alimentation en eau potable. En effet, conformément à l'article L. 211-5 du code de l'environnement, les pouvoirs de police spéciale de l'eau appartiennent à l'État. À ce titre, le préfet peut agir en cas de risque de pollution ou de destruction du milieu naturel, ou pour la santé publique et l'alimentation en eau potable, le rôle du maire étant limité à un devoir d'information des populations. Cette prérogative spéciale du préfet ne dessaisit pas totalement le maire dans l'exercice de ses pouvoirs de police générale définis aux articles L. 2212-1 et L. 2212-2 du CGCT. Dans ce cadre, le maire est habilité à prendre les mesures nécessaires à la salubrité publique et à faire cesser les pollutions de toute nature. À cet égard, il convient de relever que le Conseil d'État a pu préciser que "le maire ne saurait s'immiscer dans l'exercice de cette police spéciale [de l'eau] qu'en cas de péril imminent"(Conseil d'État, 2 décembre 2009, Commune de Rachecourt-sur-Marne, n° 309684). Ainsi, l'action du maire doit être fondée à la fois sur les articles L. 2212-2 et L. 2212-4 du CGCT, ce dernier l'autorisant à prescrire l'exécution des mesures de sûreté exigées par les circonstances"en cas de danger grave ou imminent", tout en exigeant la communication d'urgence par le maire au préfet de département des mesures qu'il a prescrites. En toute hypothèse, les pouvoirs de police générale du maire ne peuvent faire l'objet d'un transfert à une autre autorité, raison pour laquelle les pouvoirs de police spéciale transférés en application de l'article L. 5211-9-2 du CGCT sont exercés sans préjudice du pouvoir de police générale du maire. Dans ce cadre, en matière d'alimentation en eau potable, le président d'un EPCI-FP ne saurait se substituer au préfet du département ou au maire de la commune dans leurs attributions respectives. Il n'est en outre pas envisagé de remettre en cause l'équilibre actuel de l'exercice des pouvoirs de police en matière d'eau.

- page 5396

Page mise à jour le