Question de M. KANNER Patrick (Nord - SER) publiée le 18/05/2023

Question posée en séance publique le 17/05/2023

M. le président. La parole est à M. Patrick Kanner, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. Patrick Kanner. Madame la Première ministre, en préambule à ma question, je rappelle un principe intangible : la violence ne peut en aucun cas être une réponse à un mécontentement social ou politique. Aussi, au nom de mon groupe, je condamne l'agression dont a été victime Jean-Baptiste Trogneux et lui apporte notre total soutien.

J'exprime le même soutien à Yannick Morez, maire de Saint-Brevin-les-Pins, qui a subi intimidations, harcèlement et agressions, autant d'actes inqualifiables envers un élu de la République qui ne faisait qu'exercer son mandat. Il mérite également, mes chers collègues, le respect et le soutien indéfectibles du Sénat. (Applaudissements prolongés.)

Oui, un vent mauvais souffle sur notre pays. Un maire de France a dû céder devant la menace, la violence. La haine l'a emporté sur la bienveillance. La force l'a emporté sur le droit.

La multiplication des pressions et des agressions envers les élus est quantifiable et documentée. Les élus locaux, et plus particulièrement les maires, sont les fondations de la République. Quand une de ces fondations cède, comme c'est le cas avec la démission de Yannick Morez, c'est tout l'édifice qui est fragilisé.

Ce matin, l'audition émouvante de ce maire par la commission des lois du Sénat s'est transformée en réquisitoire contre les services de l'État, tant ont été révélées de graves défaillances.

Madame la Première ministre, c'est un échec, pour ne pas dire un désastre, dont il faut tirer toutes les conséquences dès aujourd'hui.

Saint-Brevin-les-Pins est aussi le signe d'une résurgence des violences d'extrême droite. Depuis plusieurs semaines, ces actes de terrorisme intellectuel et physique se sont multipliés pour empêcher les maires qui le souhaitent de prendre part à l'accueil des demandeurs d'asile.

Madame la Première ministre, on ne peut pas mettre sur un pied d'égalité l'extrême droite et d'autres formes de contestation. L'extrême droite, que ce soit au sein de nos institutions ou dans le cadre d'actions clandestines, est l'ennemie mortelle de notre démocratie ! L'État ne peut rester l'arme au pied face à ces menaces. Allez-vous engager le combat pour défendre les élus de la République ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER, sur des travées des groupes GEST et CRCE, ainsi que sur quelques travées du RDSE, du RDPI et des groupes INDEP et UC. - Mmes Laurence Garnier et Marie Mercier applaudissent également.)

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Réponse du Première ministre publiée le 18/05/2023

Réponse apportée en séance publique le 17/05/2023

M. le président. La parole est à Mme la Première ministre.

Mme Élisabeth Borne, Première ministre. Monsieur le président Patrick Kanner, pendant des semaines, Yannick Morez, le maire de Saint-Brevin-les-Pins, a été la victime d'une campagne insupportable de harcèlement en lien avec le projet d'implantation d'un centre d'accueil pour demandeurs d'asile (Cada) dans sa commune. Fin mars, son domicile a été incendié.

Oui, ces actes sont inadmissibles. Derrière chaque élu agressé, c'est la République qui est visée.

Sans aucun esprit polémique, je tiens à dire que je partage votre choc et votre indignation face à une telle situation comme face à chaque acte de violence contre un élu.

En présentant sa démission, Yannick Morez a pris une décision difficile, en son âme et conscience. Nous ne pouvons que regretter qu'il ait été conduit à faire ce choix que, naturellement, nous respectons.

Je le recevrai tout à l'heure avec des représentants de l'Association des maires de Loire-Atlantique et de l'Association des maires de France et des présidents d'intercommunalité (AMF). À cette occasion, je l'écouterai et lui exprimerai le soutien de mon gouvernement.

Les maires sont en première ligne sur le terrain : ils sont les premiers témoins de la montée de la défiance dans notre société. Nous devons les protéger, tout comme nous devons protéger l'ensemble des élus.

Pour y parvenir, le Gouvernement s'engage.

Le ministre de l'intérieur, les préfets et les forces de l'ordre sont mobilisés. Le droit pénal a été renforcé pour permettre aux associations d'élus et aux collectivités de se constituer partie civile. À plusieurs reprises, le ministre de la justice a demandé aux procureurs d'apporter des réponses fermes, rapides et visibles contre les atteintes aux élus.

Nous sommes prêts à travailler avec le Sénat, comme avec l'Assemblée nationale, pour alourdir les sanctions pénales condamnant les auteurs de violences envers les élus.

Nous voulons aller plus loin. Depuis des mois, nous préparons de nouvelles mesures que la ministre chargée des collectivités territoriales, Dominique Faure, présentera tout à l'heure. Il s'agit de renforcer le lien entre les maires et la justice, de mieux prévenir les violences et d'accompagner encore davantage les élus.

C'est un sujet auquel je tiens particulièrement et que j'ai eu l'occasion d'évoquer avec l'ensemble des associations d'élus le 12 avril dernier.

Mesdames, messieurs les sénateurs, il n'y a pas de démocratie sans respect des élus ni sécurité pour eux.

Avec vous tous, avec le Gouvernement, nous continuerons à agir. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. Rémi Féraud. Et l'extrême droite ?

M. Hussein Bourgi. Rien sur la défaillance de vos services en Loire-Atlantique ?

M. le président. La parole est à M. Patrick Kanner, pour la réplique.

M. Patrick Kanner. Madame la Première ministre, les élus de la République demandent non pas de la compassion, mais de l'action. Ils veulent surtout pouvoir agir eux-mêmes.

Quand Mme Dominique Faure évoque la création d'un centre d'analyse pour comprendre ce qui se passe dans le pays, permettez-moi de vous dire que nous le savons depuis bien longtemps, car tout est quantifié et quantifiable.

Nous demandons simplement que la réflexion qui est conduite, notamment par le Sénat, puisse aboutir à des actes permettant de protéger les élus de la République. (Applaudissements sur les travées du groupe SER, ainsi que sur des travées du groupe CRCE. - MM. Hervé Marseille et Loïc Hervé, Mme Christine Herzog et M. Albéric de Montgolfier applaudissent également.)

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