Question de Mme CARLOTTI Marie-Arlette (Bouches-du-Rhône - SER) publiée le 18/05/2023

Question posée en séance publique le 17/05/2023

M. le président. La parole est à Mme Marie-Arlette Carlotti, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Mme Marie-Arlette Carlotti. À Marseille, la pègre tue. Elle tue sur fond de vendetta entre bandes rivales régnant sur les trafics de stupéfiants. Depuis le début de l'année, la ville vit au rythme d'un assassinat par semaine et les réseaux ont plus que jamais la mainmise sur le quotidien des habitants.

En effet, les gangs ne se tuent plus entre eux, mais font de plus en plus de victimes collatérales : des enfants de 15 ans assassinés, une femme tuée au volant de sa voiture lors d'un échange de tirs, un homme atteint d'une balle perdue alors qu'il jouait aux cartes au bar du coin, un jeune touché aux jambes par une rafale tirée à travers sa porte d'entrée.

Fusillades à l'aveugle, séquestrations, lynchages mortels diffusés sur les réseaux sociaux : les trafiquants imposent leur terreur.

Avec mon collègue Jérôme Durain, je suis allée à la rencontre des victimes, de leurs familles et de la population, qui se sentent impuissantes, vulnérables, abandonnées. Car elles sont assignées à résidence dans leur cité HLM qu'elles n'ont plus les moyens de quitter, dans des quartiers mal desservis par les transports en commun, qui sont de véritables déserts médicaux et dont les écoles sont insalubres, même si le maire de Marseille a la volonté de les réhabiliter. (Marques d'ironie sur les travées du groupe Les Républicains.)

Ces habitants avaient déjà le sentiment que la République les avait abandonnés. Désormais, ils savent que, chaque jour, ils risquent leur vie, car il ne faut pas se trouver au mauvais endroit au mauvais moment.

La police pilonne les points de deal, réalise des prises de « shit » records ; c'est bien, mais, à l'évidence, cela ne marche pas. Vous avez déployé des moyens importants, notamment à Marseille, mais ils ne suffisent pas.

C'est donc sur votre doctrine que je vous interroge : croyez-vous que c'était le moment d'affaiblir la police judiciaire dont l'objectif est justement de démanteler les réseaux ? (Applaudissements sur des travées du groupe SER.)

La guerre des gangs - nous le savons - se répand dans tout le pays, et nous aurions tort de penser que cette situation ne serait propre qu'à Marseille.

Nous soutenons ici les forces de l'ordre. Nous respectons la police. Toutefois, quand les choses ne fonctionnent pas, le ministre doit revoir sa copie.

Alors, aujourd'hui, madame la ministre, au-delà de Marseille, c'est pour toutes les villes de France que nous nous indignons et que nous vous demandons ce que vous comptez faire. (Applaudissements sur les travées du groupe SER. - Mme Michelle Gréaume applaudit également.)

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Réponse du Ministère auprès du ministre de l'intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé des collectivités territoriales et de la ruralité publiée le 18/05/2023

Réponse apportée en séance publique le 17/05/2023

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité.

Mme Dominique Faure, ministre déléguée auprès du ministre de l'intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité. Madame la sénatrice Carlotti, nous partageons ce constat inacceptable.

Depuis le début de l'année, dix-sept personnes ont été tuées dans le cadre d'homicides liés au trafic de stupéfiants. Je voudrais ici, au nom de Gérald Darmanin, de Mme la Première ministre et de l'ensemble du Gouvernement, avoir une pensée pour leurs familles et leurs proches endeuillés.

Toutefois, face à cette situation intolérable - c'est là que nous divergeons -, le ministère de l'intérieur et des outre-mer est d'ores et déjà pleinement mobilisé. En effet, il s'agit non pas de ce que nous comptons faire, mais de ce que nous faisons, et que je veux rappeler.

Entre 2021 et 2022, 300 policiers ont été envoyés en renfort ; contrairement à ce que vous disiez, en début d'année, dix nouveaux policiers ont renforcé la police judiciaire, ce qui permet de créer un groupe supplémentaire au sein de l'Office anti-stupéfiants.

Trois compagnies de CRS ont également été affectées de façon permanente à Marseille, soit un total de plus de 140 policiers.

Depuis le 2 mai dernier, trente jeunes policiers en sortie d'école ont été envoyés à Marseille, madame la sénatrice.

M. François Bonhomme. C'est efficace !

Mme Dominique Faure, ministre déléguée. D'ici à septembre prochain, onze nouveaux policiers arriveront à la police judiciaire pour renforcer la brigade de recherche et d'intervention.

Rien que pour Marseille, quatre-vingt-dix postes ont été ouverts dans le cadre du prochain mouvement de mutation et seront pourvus en septembre prochain.

Enfin, grâce à la loi d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur (Lopmi), que vous avez votée au début de l'année, une nouvelle compagnie de type CRS 8 sera implantée à Marseille d'ici à la fin de 2023.

M. François Bonhomme. Pour quel changement ?

Mme Dominique Faure, ministre déléguée. Madame la sénatrice, cette politique montre d'ores et déjà des effets concrets, même s'ils sont bien sûr insuffisants.

Toutefois, il faut le rappeler, de janvier à mars 2023, 362 opérations visant des points de deal ont été effectuées à Marseille, aboutissant à la saisie de 500 kilogrammes de drogue, de 40 armes et de 800 000 euros d'avoirs criminels.

Oui, madame la sénatrice, nous devons poursuivre nos efforts - et vous avez raison de nous interroger à ce propos -, mais entendez les réponses que nous apportons d'ores et déjà ! (M. François Patriat applaudit.)

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