Question de M. GONTARD Guillaume (Isère - GEST) publiée le 11/05/2023

M. Guillaume Gontard interroge M. le ministre de la santé et de la prévention sur la situation des hôpitaux dans toute la France, mais plus particulièrement à Grenoble et à Voiron, dans le département de l'Isère.

Depuis plusieurs mois, le centre hospitalier universitaire (CHU) de Grenoble Alpes se trouve dans une situation alarmante, due au manque de moyens disponibles. En grève illimitée depuis le 6 décembre 2022, le personnel soignant alerte depuis des mois les pouvoirs publics pour dénoncer les conditions de travail et demander la réouverture de lits. Sur la région grenobloise, en l'espace de dix ans, faute de personnel suffisant le nombre de lits d'hospitalisation a été réduit de moitié. Les conditions de travail se dégradent de plus en plus, les départs s'accumulent et rendent les conditions d'hospitalisation extrêmement mauvaises, malgré tous les efforts des personnels restés en poste. Cette situation inédite a d'ailleurs poussé les représentants du personnel à déposer, il y a quelques semaines, un signalement auprès du procureur pour mise en danger de la santé d'autrui.

Aux urgences du CHU de Grenoble, la situation de crise a atteint son stade le plus critique. Avec la fermeture des urgences de Voiron et de Bourgoin-Jallieu, les urgences du CHU de Grenoble Alpes sont complètement saturées. Certains patients, souvent très âgés, attendent parfois plusieurs jours aux urgence. Conséquences dramatiques de cette situation : depuis décembre 2022, trois personnes dont le pronostic médical n'indiquait pas d'urgence à leur arrivée, sont décédées aux urgences en attente d'un lit. Dernièrement, un homme de 91 ans est décédé après avoir attendu trois jours un lit d'hospitalisation en gériatrie.

La situation du centre hospitalier de Voiron est également préoccupante. Depuis plusieurs mois, un collectif de citoyens et de soignants cherche à interpeller les élus et le Gouvernement sur le manque de moyens et de personnels important qui les touche. Alors que l'hôpital de Voiron est pratiquement neuf ; sa construction a été terminée en 2021 ; un bâtiment entier se retrouve vide, faute de moyens, alors qu'il pourrait accueillir des lits pour prendre en charge les patients qui en ont besoin.

Le manque de moyens dans les hôpitaux de Grenoble et de Voiron touche, malheureusement, les hôpitaux de tout le pays. Ces conditions de travail mettent en danger la santé des patients mais également celle des soignants qui exercent dans des conditions intenables, mais pour encore combien de temps et à quel prix ? Il lui demande si le Gouvernement compte enfin prendre des mesures efficaces pour améliorer la situation du système hospitalier en France et en particulier en Isère où elle est particulièrement critique.

- page 3022


Réponse du Ministère auprès du ministre de la santé et de la prévention, chargé de l'organisation territoriale et des professions de santé publiée le 17/05/2023

Réponse apportée en séance publique le 16/05/2023

M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, auteur de la question n° 664, adressée à M. le ministre de la santé et de la prévention.

M. Guillaume Gontard. Madame la ministre, depuis plusieurs mois, les hôpitaux isérois se trouvent dans une situation alarmante. À Voiron, un collectif de citoyens et de soignants cherche à interpeller le Gouvernement sur le manque de moyens et de personnel.

Bien que l'hôpital de Voiron soit pratiquement neuf, un bâtiment entier est vide, alors qu'il pourrait accueillir des lits pour prendre en charge les patients qui en ont besoin.

Le centre hospitalier universitaire Grenoble Alpes (CHU-GA) se trouve également en grande difficulté. Les représentants du personnel, en grève illimitée depuis plusieurs mois, alertent sur leurs conditions de travail. Ils ont d'ailleurs déposé un signalement auprès du procureur pour mise en danger de la santé d'autrui.

Avec la fermeture des urgences de Voiron et de Bourgoin-Jallieu, toutes les urgences du CHU-GA sont complètement saturées. Conséquence dramatique de cette situation, depuis décembre 2022, trois personnes dont le pronostic médical n'indiquait pas d'urgence à leur arrivée sont décédées alors qu'elles attendaient un lit.

L'équipe de chirurgie pédiatrique vient, elle aussi, de craquer. Six nouveaux arrêts de travail obligent à annuler les interventions pédiatriques. Près de cinq cents enfants et leurs familles sont aujourd'hui dans l'attente.

Nous avons appris récemment que 123 lits seraient rouverts en septembre, mais cela ne compensera malheureusement pas le nombre de lits fermés.

Aussi, madame la ministre, comptez-vous enfin prendre des mesures efficaces pour améliorer la situation du système hospitalier en France, notamment en Isère, où elle est particulièrement critique ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée auprès du ministre de la santé et de la prévention, chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé. Monsieur le sénateur Guillaume Gontard, le Gouvernement a déjà pris de nombreuses mesures pour améliorer la situation du système de santé et des hôpitaux, notamment les investissements du Ségur, ainsi que la revalorisation des primes de nuit et des astreintes de garde.

Notre mobilisation est constante pour continuer de traduire les engagements du Président de la République en termes d'attractivité et de refondation de nos hôpitaux, à l'échelon national comme local.

Certaines de ces mesures produisent déjà leurs effets, d'autres auront un impact à moyen terme. Leur mise en oeuvre revient aussi aux acteurs territoriaux pour élaborer des solutions durables.

Concernant la situation du CHU Grenoble Alpes, des tensions existent en effet, principalement dues à une pénurie de ressources humaines médicales et paramédicales, plutôt qu'à un manque de moyens.

Cependant, je ne puis vous laisser dire que la moitié des lits sont fermés, car c'est faux. Ces fermetures sont liées tant à l'évolution des prises en charge qu'à des problématiques d'effectifs. Quant au signalement adressé au procureur, il a été classé sans suite.

Je puis, en revanche, vous assurer que toutes les précautions sont prises par la gouvernance de l'établissement pour assurer la sécurité des patients en adaptant l'organisation aux ressources disponibles.

S'agissant du service des urgences du site de Voiron, celui-ci n'est pas fermé : son organisation a été adaptée sur les plages horaires de nuit, du fait d'une insuffisance de ressources médicales.

Pour ce qui concerne les locaux disponibles, il s'agit non pas d'un bâtiment entier vide, mais d'une unité non utilisée en raison d'un projet initial d'installation d'une clinique voisine qui n'a pas été mené à terme. Ces espaces seront réaffectés à l'avenir en fonction des besoins de la population et des ressources disponibles.

Le centre hospitalier Pierre Oudot, à Bourgoin-Jallieu, reste opérationnel, offrant ainsi une solution de rechange pour les patients. L'offre de soins urgents est également complétée par les cliniques privées, dont les services d'urgence continuent à jouer leur rôle.

En réaction à ces tensions, les mesures d'urgence pérennisées issues de la mission flash sont pleinement mobilisées sur le territoire isérois. Elles comprennent l'envoi d'infirmiers à domicile par le service d'aide médicale urgente (Samu) pour des levées de doute et la revalorisation des rémunérations pour encourager les praticiens à participer aux gardes et à la régulation médicale, entre autres.

Ces actions, appuyées par l'engagement des professionnels de santé, permettent de garantir la continuité de la réponse aux besoins de soins sur le territoire.

Enfin, l'agence régionale de santé (ARS) joue un rôle dans la coordination des acteurs, fluidifiant les filières de soins grâce à des avancées, comme celle qui a été récemment obtenue dans la filière psychiatrique et qui a permis de soulager le service d'urgence du CHU-GA.

M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour la réplique.

M. Guillaume Gontard. Si je vous comprends bien, madame la ministre, tout va bien !

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée. Non !

M. Guillaume Gontard. Cela ne me semble pourtant pas tout à fait le cas... À Voiron, à Bourgoin-Jallieu ou à Grenoble, la situation est particulièrement dramatique. J'aurais donc aimé que vous apportiez une réponse plus précise, qui corresponde à l'urgence présente ; il faut en effet agir tout de suite.

Il est vrai qu'il y a une pénurie de ressources, liée notamment aux conditions de travail. De nombreux médecins démissionnent et, du fait d'un taux de postes vacants de 50 %, le CHU-GA fonctionne avec seulement la moitié de ses effectifs.

Le problème n'est pas seulement financier, vous l'avez dit : les hôpitaux sont confrontés à des difficultés de recrutement. Il faut urgemment augmenter le nombre de places en faculté de médecine et favoriser le recrutement extérieur, par exemple en facilitant la reconnaissance de l'équivalence de diplôme des médecins étrangers.

- page 4264

Page mise à jour le