Question de Mme PROCACCIA Catherine (Val-de-Marne - Les Républicains) publiée le 11/05/2023

Mme Catherine Procaccia attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique sur le niveau de rémunération du livret A.

La Banque de France calculera le 15 juillet 2023 le taux actualisé du livret A, qui devrait conduire, au regard de la formule règlementaire prévue, à sa probable hausse.

Alors que 55 millions de personnes en sont détentrices, l'augmentation du taux de l'outil d'épargne préféré des Français est l'une des rares éclaircies favorables à leur pouvoir d'achat.

Pourtant, de nombreux acteurs se mobilisent déjà pour obtenir un statu quo et éviter une nouvelle hausse. Alors que le taux du livret A ne suit plus depuis de longues années l'inflation et que celui en vigueur est déjà une dérogation en défaveur des épargnants, une telle option viendrait à faire supporter à ces derniers seulement le coût des efforts sans prendre en considération ceux déjà réalisés.

Dans ce contexte, elle souhaiterait savoir s'il veillera à protéger le pouvoir d'achat des ménages et si, malgré les pressions, Bercy prendra ses responsabilités en augmentant à partir du 1er août 2023 le taux du livret A.

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Réponse du Ministère auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat et du tourisme publiée le 02/06/2023

Réponse apportée en séance publique le 01/06/2023

M. le président. La parole est à Mme Catherine Procaccia, auteur de la question n° 672, adressée à M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Mme Catherine Procaccia. Ma question porte sur la rémunération du livret A.

Le 15 juillet prochain, la Banque de France calculera le taux actualisé du livret A. Au regard de la formule réglementaire, une hausse semble probable.

Au total, notre pays dénombre 55 millions de détenteurs d'un livret A : c'est l'outil d'épargne préféré des Français et, dans le contexte actuel, une augmentation de taux serait l'une des rares mesures favorables à leur pouvoir d'achat. Pourtant, de nombreux acteurs se mobilisent pour obtenir un statu quo et éviter cette hausse.

Depuis de nombreuses années déjà, le taux du livret A ne suit plus l'inflation - le taux en vigueur résulte d'une dérogation en défaveur des épargnants. Maintenir le taux actuel reviendrait à leur faire supporter de nouveaux efforts sans prendre en considération ceux qu'ils ont déjà consentis.

M. le ministre de l'économie veillera-t-il, oui ou non, à protéger le pouvoir d'achat des ménages ? Saura-t-il résister aux pressions ? Bercy prendra-t-il ses responsabilités en augmentant, à partir du 1er août prochain, le taux du livret A ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat et du tourisme. Madame la sénatrice Procaccia, le taux du livret A a été multiplié par six en un peu plus d'un an, passant de 0,5 % au début de 2022 à 3 % aujourd'hui.

Comme vous le savez, ce taux est très supérieur à celui des produits non réglementés. Par comparaison, en 2022, l'assurance vie en fonds euros a connu un rendement moyen de 2 %. Le taux moyen des livrets ordinaires, fixé librement par les établissements bancaires, s'élevait quant à lui à 0,5 % en mars 2023.

Comparés aux produits d'épargne réglementée des autres pays européens, les produits proposés aux Français présentent des taux particulièrement rémunérateurs, pour des volumes d'épargne inégalés en Europe.

Le livret A présente d'autres caractéristiques très favorables : sa liquidité est totale ; son capital est garanti par l'État, à l'instar de ses intérêts ; ces derniers sont exonérés d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux. De ce fait, vous l'avez rappelé vous-même, ce produit d'épargne est très populaire et très attractif pour les Français.

Pour les livrets A et les livrets de développement durable et solidaire (LDDS), la collecte nette a ainsi dépassé 25 milliards d'euros au premier trimestre de 2023. Pour la même période, en 2021 et 2022, la collecte s'élevait, en comparaison, à 15 milliards d'euros. Or il s'agissait déjà d'années de collecte historiques.

Notons aussi que la variation du taux du livret A a un impact sur d'autres acteurs que les épargnants, en particulier les bailleurs sociaux et les collectivités territoriales. Leur dette contractée auprès de la Caisse des dépôts et consignations est bien souvent indexée sur le taux du livret A. Augmenter ce taux revient donc à renchérir le coût de la dette de ces acteurs, qui font pourtant face à de très grands besoins d'investissement, notamment par le temps qui courent.

Il s'agit de déterminer une juste rémunération pour les épargnants tout en assurant aux acteurs de bonnes conditions de financement. Il conviendra d'apprécier la situation l'été prochain, pour fixer le taux du livret A à compter du 1er août 2023.

Enfin, je signale que les ménages aux revenus les plus modestes peuvent également recourir à un produit qui protège intégralement de l'inflation : le livret d'épargne populaire (LEP). Près de la moitié des Français sont éligibles à ce livret, dont le taux s'établit aujourd'hui à 6,1 %.

Le Gouvernement a mené plusieurs actions de simplification et de promotion pour que davantage de Français bénéficient de cette protection, et ses efforts portent leurs fruits : le nombre de LEP ouverts a atteint 9,6 millions en mars 2023, contre 6,9 millions à la fin de l'année 2021, et l'encours total a augmenté de 44 %.

Madame la sénatrice, j'espère que ces quelques éléments de réponse seront de nature à vous rassurer et je vous certifie que Bercy prendra ses responsabilités lors des choix de l'été prochain, à l'aune des éclairages que je vous ai apportés.

M. le président. La parole est à Mme Catherine Procaccia, pour la réplique.

Mme Catherine Procaccia. Madame la ministre, Bercy prendra ses responsabilités : dont acte !

En effet, le taux de rémunération du LEP correspond à peu près à celui de l'inflation ; mais ce n'est pas le cas du livret A, tant s'en faut. Or je me souviens d'un temps où le taux du livret A représentait bien plus que la moitié du taux de l'inflation.

Le livret A résulte d'un pacte entre différents acteurs, dont ceux du logement social, que vous évoquez. Ce secteur bénéficie certes de conditions privilégiées. Mais, quand on voit les taux d'emprunt proposés aujourd'hui aux ménages, le taux du livret A, même à 3 %, semble gravement insuffisant.

Si les Français ont recours à l'épargne de précaution, c'est parce qu'ils sont très inquiets de l'avenir. (Mme la ministre déléguée manifeste sa circonspection.)

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