Question de M. GONTARD Guillaume (Isère - GEST) publiée le 01/06/2023

Question posée en séance publique le 31/05/2023

M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour le groupe Écologiste - Solidarité et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST et sur des travées du groupe SER.)

M. Guillaume Gontard. Madame la Première ministre, j'avais prévu de vous interpeller avec véhémence pour dénoncer les manoeuvres auxquelles se livrent votre gouvernement et vos alliés pour empêcher un vote en séance plénière de l'Assemblée nationale, quand bien même serait-il symbolique, sur le report de l'âge légal de la retraite.

Cependant, au regard des événements consternants survenus ce matin à l'Assemblée nationale, c'est avec une profonde gravité que je m'adresse à vous. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe Les Républicains.)

Madame la Première ministre, les droits des oppositions politiques sont le fondement même de la démocratie. C'est à l'aune de ces droits que l'on juge de la qualité d'une démocratie. Notre pays, à tous les échelons, national ou locaux, fait déjà pâle figure, avec une hypertrophie des pouvoirs exécutifs et des assemblées réduites à leur seule fonction tribunitienne.

M. Marc-Philippe Daubresse. Vous avez passé votre temps à faire de l'obstruction... Pyromane !

M. Guillaume Gontard. Pour tous nos partenaires européens, régimes parlementaires rompus à la négociation et à une certaine culture du compromis, notre régime politique est une incongruité, pour ne pas dire une aberration.

Dernière manifestation en date d'une culture politique très différente, le président du Gouvernement espagnol, Pedro Sánchez, remet son mandat en jeu après avoir perdu une élection municipale.

Rien de tel chez nous, où le Gouvernement avance en écrasant toute contestation devant lui.

Ce matin, c'est bien plus que la bataille des retraites qui s'est jouée à l'Assemblée nationale. En torpillant une initiative parlementaire de l'opposition, en bafouant le droit d'amendement,...

M. Marc-Philippe Daubresse. Vous passez votre temps à faire de l'obstruction !

M. Guillaume Gontard. ... en transformant le corset de l'article 40 de la Constitution en véritable étau, vous créez un précédent délétère qui menace de réduire à néant le droit d'expression déjà famélique des parlementaires.

Madame la Première ministre, vous qui êtes une démocrate - vous l'avez clamé ici même en juillet 2022 -, comment pouvez-vous tolérer la dérive autoritaire dans laquelle le Président de la République vous enferme ? (Applaudissements sur les travées des groupes GEST et SER, ainsi que sur des travées du groupe CRCE.)M. le président. La parole est à Mme la Première ministre.

Mme Élisabeth Borne, Première ministre. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, monsieur le président Gontard, je suis souvent surprise d'entendre ceux qui se disent défenseurs du Parlement être les premiers à en refuser les règles. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et INDEP, ainsi que sur des travées des groupes UC et Les Républicains.)

Monsieur le président Gontard, revenons-en aux faits. L'examen de la réforme des retraites a eu lieu, avec 175 heures de débat parlementaire. Elle a été votée par deux fois par le Sénat, et le Conseil constitutionnel s'est prononcé très clairement sur la conformité de l'essentiel du texte à notre Constitution et sur le rejet de deux demandes de référendum d'initiative partagée qui visaient à l'abroger.

La proposition de loi dont vous parlez, et qui fait actuellement l'objet d'un examen par la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale, aggraverait considérablement les charges publiques et réduirait les recettes. Cela contrevient de façon évidente à l'article 40 de la Constitution, et vous le savez, monsieur Gontard.

Personne n'est dupe de la manoeuvre qui se joue. Comme vous en appelez au respect du Parlement et au débat, je vous renvoie à ces principes. Ce matin, la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale a voté pour supprimer l'article de la proposition de loi qui visait à abroger la réforme des retraites. C'est un vote clair et démocratique, mais, immédiatement après, la Nouvelle Union populaire écologique et sociale (Nupes) a répondu par l'obstruction, avec le dépôt de 3 000 sous-amendements, pour empêcher un vote final en commission. (Eh oui ! sur les travées du groupe Les Républicains. - M. Rémi Cardon et Mme Michelle Gréaume protestent.)

M. Marc-Philippe Daubresse. Pompiers pyromanes !

Mme Élisabeth Borne, Première ministre. La réalité, c'est que lorsque le résultat d'un vote déplaît à la Nupes, elle n'a qu'une réponse : l'obstruction.

De mon côté, je crois en notre Constitution et je respecte le travail du Parlement. Aussi, je souhaite que l'examen de la proposition de loi puisse aller à son terme dans de bonnes conditions et que le contrôle de la recevabilité des amendements puisse s'exercer normalement, dans la sérénité. En somme, je ne souhaite qu'une chose : le respect de nos règles et du débat parlementaire. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et INDEP, ainsi que sur des travées des groupes UC et Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour la réplique.

M. Guillaume Gontard. Madame la Première ministre, l'obstruction, c'est vous : tordre les règles, ce n'est pas appliquer les règles ! (Exclamations sur les travées des groupes UC et Les Républicains.) Vous auriez pu entrer dans l'Histoire en ouvrant une page nouvelle de notre république parlementaire, mais vous y entrerez, hélas ! comme une fossoyeuse de la démocratie française. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST, ainsi que sur des travées des groupes SER et CRCE. - Protestations sur des travées des groupes UC, RDPI, INDEP et Les Républicains.)

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Réponse du Première ministre publiée le 01/06/2023

Réponse apportée en séance publique le 31/05/2023

M. le président. La parole est à Mme la Première ministre.

Mme Élisabeth Borne, Première ministre. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, monsieur le président Gontard, je suis souvent surprise d'entendre ceux qui se disent défenseurs du Parlement être les premiers à en refuser les règles. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et INDEP, ainsi que sur des travées des groupes UC et Les Républicains.)

Monsieur le président Gontard, revenons-en aux faits. L'examen de la réforme des retraites a eu lieu, avec 175 heures de débat parlementaire. Elle a été votée par deux fois par le Sénat, et le Conseil constitutionnel s'est prononcé très clairement sur la conformité de l'essentiel du texte à notre Constitution et sur le rejet de deux demandes de référendum d'initiative partagée qui visaient à l'abroger.

La proposition de loi dont vous parlez, et qui fait actuellement l'objet d'un examen par la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale, aggraverait considérablement les charges publiques et réduirait les recettes. Cela contrevient de façon évidente à l'article 40 de la Constitution, et vous le savez, monsieur Gontard.

Personne n'est dupe de la manoeuvre qui se joue. Comme vous en appelez au respect du Parlement et au débat, je vous renvoie à ces principes. Ce matin, la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale a voté pour supprimer l'article de la proposition de loi qui visait à abroger la réforme des retraites. C'est un vote clair et démocratique, mais, immédiatement après, la Nouvelle Union populaire écologique et sociale (Nupes) a répondu par l'obstruction, avec le dépôt de 3 000 sous-amendements, pour empêcher un vote final en commission. (Eh oui ! sur les travées du groupe Les Républicains. - M. Rémi Cardon et Mme Michelle Gréaume protestent.)

M. Marc-Philippe Daubresse. Pompiers pyromanes !

Mme Élisabeth Borne, Première ministre. La réalité, c'est que lorsque le résultat d'un vote déplaît à la Nupes, elle n'a qu'une réponse : l'obstruction.

De mon côté, je crois en notre Constitution et je respecte le travail du Parlement. Aussi, je souhaite que l'examen de la proposition de loi puisse aller à son terme dans de bonnes conditions et que le contrôle de la recevabilité des amendements puisse s'exercer normalement, dans la sérénité. En somme, je ne souhaite qu'une chose : le respect de nos règles et du débat parlementaire. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et INDEP, ainsi que sur des travées des groupes UC et Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour la réplique.

M. Guillaume Gontard. Madame la Première ministre, l'obstruction, c'est vous : tordre les règles, ce n'est pas appliquer les règles ! (Exclamations sur les travées des groupes UC et Les Républicains.) Vous auriez pu entrer dans l'Histoire en ouvrant une page nouvelle de notre république parlementaire, mais vous y entrerez, hélas ! comme une fossoyeuse de la démocratie française. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST, ainsi que sur des travées des groupes SER et CRCE. - Protestations sur des travées des groupes UC, RDPI, INDEP et Les Républicains.)

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