Question de M. JOMIER Bernard (Paris - SER) publiée le 01/06/2023

Question posée en séance publique le 31/05/2023

M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. Bernard Jomier. Monsieur le président, avant de poser ma question, je veux saluer Mme la Première ministre pour ses propos concernant Pétain et le Rassemblement national. (Applaudissements sur les travées du groupe SER. - M. Jean-Michel Arnaud applaudit également.)

Certes, la politique ne se résume pas à des positions morales, mais celle-ci, eu égard à votre fonction et, en particulier, à votre histoire personnelle, madame la Première ministre, mérite le respect. (Marques d'agacement sur des travées du groupe Les Républicains.)

Ma question sera simple. Un protocole thérapeutique portant sur 30 000 personnes a été mis en oeuvre jusqu'au 31 décembre 2021 dans notre pays en violation flagrante de la loi protégeant les personnes soumises à une recherche médicale. C'est un fait inédit, grave, sans précédent.

Monsieur le ministre de la santé, pourquoi une telle inertie des pouvoirs publics face à ce scandale ? Pourquoi a-t-il fallu tant de temps pour que se déclenche enfin une action comme celle que l'on l'a vue ce matin ? Pourquoi n'avez-vous pas pris les mesures pour mettre fin à ce scandale ? Que comptez-vous faire maintenant ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

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Réponse du Ministère de la santé et de la prévention publiée le 01/06/2023

Réponse apportée en séance publique le 31/05/2023

M. le président. La parole est à M. le ministre de la santé et de la prévention.

M. François Braun, ministre de la santé et de la prévention. Mesdames, messieurs les sénateurs, monsieur le sénateur Bernard Jomier, vous évoquez une étude qui a été présentée en preprint, c'est-à-dire qui n'est pas encore acceptée par des revues scientifiques - heureusement, devrais-je dire. Elle porte sur 30 000 patients qui, pour dire les choses, ont été traités à l'institut hospitalo-universitaire (IHU) Méditerranée Infection de Marseille, en dehors de tout cadre d'expérimentation clinique et de tout cadre d'utilisation des médicaments, puisque les médicaments utilisés l'ont été hors autorisation de mise sur le marché (AMM) - de surcroît, ces médicaments avaient déjà fait la preuve de leur inefficacité dans le traitement de la covid-19.

L'inspection générale des affaires sociales (Igas) et l'inspection générale de l'éducation, du sport et de la recherche (IGÉSR) nous ont rendu, en septembre 2022, à ma collègue Sylvie Retailleau et à moi-même, les conclusions d'une enquête sur cette situation. Devant la constatation aussi bien de pratiques managériales que de méthodes de suivi des études cliniques inappropriées, voire déviantes, nous avons immédiatement saisi le procureur de la République de Marseille, sur le fondement de l'article 40 du code de procédure pénale - nous l'avons fait à deux reprises.

Nous avons, à la suite de cela, convoqué l'ensemble des administrateurs de l'IHU, en leur imposant la mise en place d'un plan de redressement sur la base des conclusions de l'enquête.

Comme vous, je déplore le nouvel épisode inadmissible de cette affaire, sachant que la justice suit son cours, comme vous avez pu le constater comme moi dès ce matin.

Devant cette proposition de publication, qui, pour moi, s'apparente à de la provocation, nous serons amenés à prendre, ma collègue Sylvie Retailleau, pour l'enseignement supérieur et la recherche, et moi-même, toutes les mesures nécessaires envers l'ensemble des signataires de cet article - le service juridique est en train de les étudier. (M. François Patriat applaudit.)

M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier, pour la réplique.

M. Bernard Jomier. Monsieur le ministre, je pense que vous avez vous-même conscience de la faiblesse de votre réponse.

Il y a deux ans, les alertes étaient déjà nombreuses : rapports de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM), de l'Igas, etc. Bien avant, en 2015, l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) quittait le conseil d'administration de l'IHU Méditerranée Infection.

Qu'a fait l'université d'Aix-Marseille pour mettre fin à ces dérives ? Rien.

Qu'avez-vous fait, messieurs les ministres ?

Monsieur Véran, alors que vous étiez ministre de la santé, vous n'avez pas répondu à la question écrite que j'avais posée concernant les dérives de l'IHU.

Mme Frédérique Vidal, qui était alors ministre de la recherche, n'a pas non plus répondu à mes questions.

Si l'ensemble des institutions de notre pays et les ministres se sont tus et ont fait preuve de faiblesse, c'est peut-être parce que le chef de l'État est allé couvrir de sa chaleureuse immunité le patron de l'IHU... C'est un dysfonctionnement grave de nos institutions. (Bravo ! et vifs applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)

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