Question de M. BREUILLER Daniel (Val-de-Marne - GEST) publiée le 08/06/2023

Question posée en séance publique le 07/06/2023

M. le président. La parole est à M. Daniel Breuiller, pour le groupe Écologiste - Solidarité et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)

M. Daniel Breuiller. Monsieur le ministre, l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF) climatique, pour nous, c'est oui !

Écoutons les scientifiques. Les auteurs du dernier rapport du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (Giec) le disent et le répètent : l'urgence climatique est là, plus violente et plus rapide que prévu.

Écoutons Jean Pisani-Ferry et Selma Mahfouz, qui confirment l'absolue nécessité de réorienter les financements publics vers tout ce qui rend notre société plus durable et résiliente.

Écoutons les experts et les élus, dont les écologistes. (Ah ! sur des travées du groupe Les Républicains.) Ils vous interpellent pour que les collectivités soient soutenues. Plus de 25 milliards d'euros par an doivent être mobilisés à leur niveau pour amortir les chocs annoncés liés à l'augmentation des températures de 4°C en France.

Monsieur le ministre, nous n'avons plus le choix. Il faut faire en dix ans ce qui ne l'a pas été en trente. C'est un changement d'échelle et d'enjeu. Tous les leviers doivent être activés sans attendre et sans fléchir.

Aussi les plus riches doivent-ils être mis à contribution, d'abord parce que ce sont les plus pollueurs (Protestations sur des travées du groupe Les Républicains.), ensuite parce que les 378 ménages les plus aisés sont ceux qui payent le moins en proportion de leurs revenus, d'après la note de l'Institut des politiques publiques publiée hier, enfin, tout simplement, parce que la transition écologique doit se faire dans la justice sociale.

Monsieur le ministre, comment allez-vous financer la transition et l'adaptation de notre pays au bouleversement climatique ?

Vous dites non à un impôt vert exceptionnel sur le patrimoine financier des 10 % les plus riches.

Vous dites non également à un endettement pourtant légitime afin de faire face à la gravité exceptionnelle de cette crise climatique.

Monsieur le ministre, à quoi dites-vous oui ? (Applaudissements sur les travées du groupe GEST, ainsi que sur des travées du groupe SER. - Mme Cathy Apourceau-Poly applaudit également.)

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Réponse du Ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires publiée le 08/06/2023

Réponse apportée en séance publique le 07/06/2023

M. le président. La parole est à M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.

M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Monsieur le sénateur, tout d'abord je voudrais souhaiter un bon anniversaire à Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques.

J'évoque son titre à dessein : dès le début du rapport Pisani-Ferry, qui compte un peu moins de 160 pages, les auteurs soulignent qu'économie et écologie ne sont pas forcément à opposer, que la décroissance n'est pas le chemin à suivre et que la transition écologique peut s'accompagner d'une trajectoire de croissance.

M. Guy Benarroche. Quelle croissance ?

M. Christophe Béchu, ministre. Ils indiquent également que les mesurettes ou les symboles ne sont pas à la hauteur de la marche à gravir.

M. Thomas Dossus. C'est plus qu'un symbole !

M. Christophe Béchu, ministre. En cela, ils valident la planification écologique portée par la Première ministre et la méthode de ce gouvernement - voilà ce à quoi je dis oui - (Marques d'ironie sur les travées du groupe GEST.), tout comme la répartition proportionnée des efforts selon les secteurs.

L'angle d'approche que vous avez choisi renvoie à seulement deux pages de ce rapport.

Mme Mélanie Vogel. Ce sont les meilleures !

M. Christophe Béchu, ministre. Or, si aucun tabou n'existe en matière de fiscalité, le débat sur les symboles finit par nuire à l'essentiel. Si l'écologie devient le prétexte pour interdire et pour taxer, nous renforcerons l'impopularité de ces mesures auprès d'une partie de la population et nous nous éloignerons de nos objectifs.

L'enjeu, monsieur le sénateur, est non pas la transition d'un impôt, mais la transition fiscale.

M. François Bonhomme. Eh oui !

M. Christophe Béchu, ministre. Quelle transition fiscale doit être mise en oeuvre pour passer de l'essence à l'électrique, alors que 40 milliards d'euros sont issus de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) ?

Comment assurer une trajectoire de transition fiscale qui renchérit l'artificialisation, afin de rendre possible un zéro artificialisation nette (ZAN) assoupli en tenant compte des besoins des territoires ruraux (Marques de satisfaction sur les travées du groupe Les Républicains.), tout en donnant aux maires les moyens de lutter pour la dépollution des friches ?

Mme Raymonde Poncet Monge. Faites donc !

Mme Mélanie Vogel. Qu'attendez-vous ?

M. Christophe Béchu, ministre. Comment baisser la fiscalité sur le foncier non bâti pour les agriculteurs, si cela s'accompagne de la réduction d'une partie des rendements ?

M. le président. Il faut conclure !

M. Christophe Béchu, ministre. Il s'agit d'une réflexion globale et collective. Par conséquent, je vous donne rendez-vous dans les semaines à venir pour débattre de cette transition. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. - Exclamations ironiques sur les travées du groupe GEST.)

M. le président. La parole est à M. Daniel Breuiller, pour la réplique.

M. Daniel Breuiller. Monsieur le ministre, je vous remercie de me répondre par des questions...

Pour la crise de la covid-19, vous avez mobilisé sans compter, et c'était heureux ! Pour la crise climatique, c'est non, et cela nous choque.

Monsieur le ministre, si la dette financière est un sujet sérieux et la transition fiscale une nécessité, commencez par l'ISF climatique, qui est une demande partagée sur toutes les travées de cet hémicycle (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.), ou plutôt sur les travées situées à gauche (Sourires.), ainsi que par nombre de nos concitoyens. C'est la raison pour laquelle 170 élus vous ont demandé de créer cet ISF.

M. le président. Il faut conclure !

M. Daniel Breuiller. Il vous appartient de rendre leur pétition caduque. (Applaudissements sur les travées des groupes GEST, SER et CRCE.)

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