Question de M. DOSSUS Thomas (Rhône - GEST) publiée le 29/06/2023

Question posée en séance publique le 28/06/2023

M. le président. La parole est à M. Thomas Dossus, pour le groupe Écologiste - Solidarité et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)

M. Thomas Dossus. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Monsieur le ministre, un jeune homme de 17 ans est mort hier. (Marques d'agacement sur des travées du groupe Les Républicains.) Nahel a été abattu par un agent de police, à bout portant.

Aujourd'hui, au nom du groupe écologiste, j'adresse pensées et condoléances à sa mère, à sa famille et à ses amis.

Aujourd'hui, après une nuit de colère dans certaines villes d'Île-de-France, notre rôle doit être d'appeler au calme, au nom du respect pour le temps du recueillement à la mémoire de Nahel et au nom du respect de la justice et de la vérité.

Ce matin, face aux images, le Président de la République a parlé d'un acte inexcusable et inexplicable. Inexcusable ? Sans aucun doute. Inexplicable ? Certainement pas. Oui, il y a des raisons qui ont conduit à ce drame.

Nous nous rappelons les efforts que vous avez déployés, monsieur le ministre, pour combattre dans cet hémicycle toutes les propositions visant à améliorer les rapports entre la police et la population, vous montrant ainsi fidèle à votre doctrine 100 % répressive.

Nous nous rappelons votre acharnement à vouloir interdire de filmer l'action de la police

Et nous voyons comment, depuis des années, drame après drame, avec détermination, vous défendez la honteuse loi Cazeneuve, qui permet à la police d'ouvrir le feu sur les chauffeurs d'une voiture selon des conditions manifestement trop floues.

Depuis que cette loi est en vigueur, on constate que les tirs sur des véhicules ont augmenté de 40 % par rapport aux cinq années précédentes. (Protestations sur des travées du groupe RDPI.)

L'an dernier, treize décès ont été enregistrés après des refus d'obtempérer lors de contrôles routiers. C'est un triste record. (Nouvelles marques d'agacement sur les travées du groupe Les Républicains.)

Cette loi, manifestement trop laxiste, a certainement contribué à développer le sentiment d'impunité qui a conduit au drame d'hier.

Monsieur le ministre, si vous voulez que le calme revienne - ce que nous appelons de nos voeux -, il est temps de revenir sur cette loi. Combien de morts supplémentaires faudra-t-il pour que vous en preniez conscience ? (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)

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Réponse du Ministère de l'intérieur et des outre-mer publiée le 29/06/2023

Réponse apportée en séance publique le 28/06/2023

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'intérieur et des outre-mer.

M. Gérald Darmanin, ministre de l'intérieur et des outre-mer. Monsieur le sénateur, comme Mme la Première ministre vient de le faire à l'instant et comme l'a fait le Président de la République, je veux dire à mon tour la peine que nous inspire le drame qui s'est déroulé hier, à Nanterre. La justice devra apporter des réponses très rapidement et des sanctions seront prises contre un policier qui, manifestement, ne s'est pas conformé à la législation, à la déontologie ni à la formation de la police nationale, d'après les images extrêmement choquantes que nous avons vues et d'après les premiers éléments de l'enquête que la presse a relayés.

Toutefois, monsieur le sénateur, je crois que, en toute chose et en tout temps, il faut avoir de la dignité. Je crois qu'il ne peut y avoir de récupération politique au moment où une famille pleure son enfant, au moment où des écoles viennent d'être attaquées, au moment où vingt-quatre policiers ont été blessés, au moment où partout en France s'exprime une légitime émotion et se manifeste un énervement dont on ne peut tolérer qu'il enfreigne les règles de la République.

Vous avez établi, monsieur le sénateur, un drôle de parallèle, en exprimant votre volonté que nous légiférions sous le coup de l'émotion. Vous avez - et c'est affreux - profité de ce terrible drame pour rappeler votre opposition à la loi mise en place sous le président Hollande et le Premier ministre Cazeneuve, en des temps qui étaient ceux des attentats terroristes.

L'article de cette loi, que vous mentionnez, prévoit non pas que des policiers ou des gendarmes puissent tirer sur une voiture - c'est totalement faux et c'est fou de le dire, dans cet hémicycle, devant tous les Français, monsieur le sénateur -, mais qu'ils puissent, dans certaines circonstances, lorsqu'ils sont eux-mêmes en danger de mort, utiliser leur arme.

Le policier qui a utilisé son arme était-il en danger de mort ? C'est ce que montrera l'enquête judiciaire. A priori, les images que nous avons tous vues sont choquantes, parce qu'elles montrent une conduite qui ne correspond pas à ce que prévoit la loi de 2017. Je ne suis pas l'auteur de cette loi et il ne s'agit pas pour moi de la défendre devant vous.

Je veux surtout rappeler que le temps est au deuil, au recueillement et à la dignité républicaine, et non pas à la récupération politique. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI, UC et Les Républicains. - Mme Sylvie robert et MM. Jean-Michel Houllegatte et Thierry Cozic applaudissent également.)

M. le président. La parole est à M. Thomas Dossus, pour la réplique.

M. Thomas Dossus. Monsieur le ministre, il n'y aura pas de paix ni de justice sans vérité. (Exclamations sur les travées des groupes Les Républicains, UC et RDPI.) Et la vérité, c'est que vous continuez de soutenir cette loi, alors qu'elle a conduit à ce drame. La vérité, c'est que cette loi provoquera d'autres drames. (Mêmes mouvements.)

M. Marc-Philippe Daubresse. Vous n'êtes pas digne de l'écharpe que vous portez !

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