Question de M. DÉTRAIGNE Yves (Marne - UC) publiée le 01/06/2023

M. Yves Détraigne souhaite appeler l'attention de M. le ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de la transition numérique et des télécommunications sur la récente étude concernant la fréquentation des sites pornographiques par les mineurs, réalisée à la demande de l'ARCOM, le régulateur de l'audiovisuel et du numérique, chargée de la protection des publics et de la diversité dans les médias.
Au total, plus de deux millions de mineurs consultent des sites pornographiques chaque mois, selon une étude publiée par l'Arcom et Médiamétrie. Cette étude conclut à une fréquentation en masse, et en hausse constante depuis 2017, des sites pornographiques par les mineurs (30 % contre 37 % chez les adultes). Un mineur sur deux, âgé de 12-13 ans, consulterait chaque mois des sites pornographiques.
Les images véhiculées sur ces sites inappropriées à un certain âge sont souvent dégradantes et violentes. Elles ne sont pas sans conséquence sur le développement relationnel du mineur. Or, le code pénal interdit déjà d'exposer les mineurs à des images pornographiques.
Pourtant les textes législatifs qui existent ne sont pas respectés, et ce, malgré l'arsenal mis à disposition de l'ARCOM. Il faut donc mettre en place un système plus efficient qui empêche la consultation de ce type de site par des personnes mineures. Le filtrage par carte bancaire serait un premier pas, le pouvoir d'ordonner, sans passer par un juge, le blocage par les opérateurs et le déréférencement des sites pornographiques qui n'empêchent pas les mineurs d'accéder à leur contenu également...
Soutenant l'engagement pris par le Président de la République lors de la Journée internationale des droits de l'enfant, en novembre 2019, à l'Unesco, de mieux réguler l'accès aux contenus pornographiques en ligne par des mineurs, il lui demande donc de prendre rapidement les mesures nécessaires pour que les sites concernés appliquent la législation et mettent en place les solutions technologiques pour cela.

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Transmise au Ministère de la justice


Réponse du Ministère de la justice publiée le 03/08/2023

La lutte contre l'exposition des mineurs à des images violentes ou pornographiques en ligne constitue un enjeu majeur en matière de protection de l'enfance. La loi 2020-936 du 30 juillet 2020 a constitué une avancée importante en la matière en précisant que l'infraction de diffusion d'un message à caractère pornographique définie à l'article 227-24 du code pénal est désormais constituée, y compris lorsqu'une personne mineure déclare être âgée de plus de 18 ans. Ce délit est puni d'une peine de trois ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende. En matière de pornographie, cette loi a par ailleurs renforcé les pouvoirs de l'autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (ARCOM) pour faire cesser l'accès aux sites à caractère pornographique lorsqu'ils sont consultables par des mineurs. Le président de l'ARCOM dispose ainsi désormais de la faculté de saisir le président du tribunal judiciaire de Paris à l'issue d'une mise en demeure afin d'ordonner qu'il soit mis fin à un service de diffusion d'un contenu à caractère pornographique accessible à des mineurs. Une réflexion est en cours s'agissant des moyens techniques de nature à empêcher le visionnage de tels contenus par les mineurs afin de concilier fiabilité du contrôle et protection des données et de la vie privée. La possibilité de systématiser l'utilisation d'une carte bancaire est ainsi étudiée, bien que puissent être soulevées l'absence de garanties, quant à l'âge réel des utilisateurs de même que la problématique de leur anonymat. Afin de renforcer la protection des mineurs, un projet de loi visant à sécuriser l'espace numérique a été déposé au Sénat le 10 mai 2023. Il propose de renforcer les pouvoirs de l'ARCOM. Il lui confère en effet la mission d'élaborer un référentiel établissant les exigences techniques auxquelles doivent répondre les systèmes de vérification d'âge, tant en matière de fiabilité du contrôle que de protection de la vie privée. La valeur contraignante de ce référentiel se traduit par la possibilité pour l'ARCOM de prononcer une sanction pécuniaire après mise en demeure en cas de non-respect. Il prévoit en outre l'instauration d'une procédure permettant au président de l'ARCOM de décider de contraindre un service de communication au public en ligne à un blocage en cas de diffusion d'un contenu à caractère pornographique accessible à des mineurs après mise en demeure, sans passer par une saisine du président du tribunal judiciaire de Paris. Ce projet de loi propose enfin de pénaliser les fournisseurs de services d'hébergement qui ne satisfont pas à la demande émise par l'autorité compétente de procéder au retrait dans un délai de 24 heures d'un contenu en ligne d'images ou de représentations de mineurs présentant un caractère pédopornographique, en étendant le délit actuellement applicable en matière de contenus incitant au terrorisme. Il convient par ailleurs de souligner d'autres avancées récentes en matière de protection des mineurs en ligne, telle la loi n° 2022-300 du 2 mars 2022 qui prévoit la pré-installation d'un dispositif de contrôle parental sur les appareils connectés devant être proposée gratuitement à l'utilisateur lors de la première mise en service de l'équipement. Les conditions d'application de cette loi doivent être précisées par un décret en Conseil d'Etat en cours d'élaboration.

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