Question de M. ROJOUAN Bruno (Allier - Les Républicains-R) publiée le 01/06/2023

M. Bruno Rojouan attire l'attention de Mme la ministre de la culture sur les obligations de fouilles archéologiques préventives qui s'appliquent pour les opérations d'aménagement.

La loi impose aux collectivités la réalisation de fouilles lorsque leurs projets d'aménagement ou de construction sont susceptibles d'affecter le patrimoine archéologique. Sans remettre en cause ce principe qui permet la sauvegarde de notre patrimoine, force est de constater que sa mise en oeuvre pose des difficultés dans bon nombre de territoires ruraux.
Dans le département de l'Allier, la situation de la communauté de communes de Lapalisse illustre bien ce phénomène : un projet d'extension d'une zone d'activités économiques est à l'étude, pour un montant de travaux de 1,3 million d'euros. À ces dépenses d'aménagement, il faut ajouter le coût des fouilles archéologiques préventives obligatoires pour un montant initialement estimé à 1,3 million d'euros par la direction régionale des affaires culturelles (DRAC) et qui, après consultation des entreprises, s'élève à 1,9 million d'euros, soit 150 % du montant des travaux !

En l'état, les collectivités se retrouvent dans l'incapacité de supporter de telles dépenses ou bien contraintes de le faire avec des montages financiers faisant doubler le prix de vente du mètre carré aménagé, bien loin des prix moyens pratiqués sur le territoire.

Et ce cas n'est pas isolé : des situations similaires ont été vécues à Dompierre-sur-Besbre et Varennes-sur-Allier qui ont dû renoncer devant le coût exorbitant des fouilles, et des difficultés ont été rencontrées à Gannat et Creuzier-le-Neuf.

Le développement économique dans ces conditions est bloqué, les aides pour supporter le coût des fouilles via le Fonds national pour l'archéologie préventive (FNAP) étant plafonnées à 50 % du coût prévisionnel.
Il est important que l'État prenne conscience de cette difficulté et apporte des solutions pour mieux accompagner le développement en ruralité, qui risque par ailleurs d'être encore plus contraint avec l'application du « zéro artificialisation nette ».

Ainsi il lui demande dans quelles conditions elle peut s'engager à faire évoluer le plafonnement des subventions du FNAP et permettre qu'une partie de la dotation d'équipement des territoires ruraux puisse être fléchée vers ce type de projet.

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Réponse du Ministère auprès du ministre de l'intérieur et des outre-mer, chargé des outre-mer publiée le 07/06/2023

Réponse apportée en séance publique le 06/06/2023

Mme le président. La parole est à M. Bruno Rojouan, auteur de la question n° 719, adressée à Mme la ministre de la culture.

M. Bruno Rojouan. Monsieur le ministre, je souhaite appeler l'attention du Gouvernement sur les obligations de fouilles archéologiques préventives qui s'appliquent aux opérations d'aménagement.

La loi impose aux collectivités la réalisation de fouilles lorsque leurs projets d'aménagement ou de construction sont susceptibles d'affecter le patrimoine archéologique. Force est de constater que la mise en oeuvre de cette obligation pose des difficultés dans bon nombre de territoires ruraux.

Dans le département dont je suis élu, l'Allier, la situation de la communauté de communes de Lapalisse illustre bien ce phénomène : un projet d'extension d'une zone d'activités économiques est à l'étude, pour un montant de 1,3 million d'euros, mais à ces dépenses d'aménagement s'ajoute le coût des fouilles archéologiques préventives obligatoires, pour un montant initialement estimé à 1,3 million d'euros par la direction régionale des affaires culturelles (Drac) et qui s'élève, après consultation des entreprises, à 1,9 million d'euros, soit 150 % du montant des travaux !

Les collectivités sont dans l'incapacité de supporter de telles dépenses ou sont contraintes de le faire au moyen de montages financiers doublant le prix de vente du mètre carré aménagé, bien loin des prix moyens pratiqués sur le territoire...

Ce cas n'est pas isolé ! Des situations similaires ont été vécues à Dompierre-sur-Besbre et à Varennes-sur-Allier, qui ont dû renoncer à leur projet devant le coût exorbitant des fouilles, et des difficultés ont été rencontrées à Gannat et à Creuzier-le-Neuf.

Dans ces conditions, le développement économique de ces territoires est bloqué, d'autant que l'aide du Fonds national pour l'archéologie préventive (Fnap) est plafonnée à 50 % du coût prévisionnel des travaux.

Il convient que l'État prenne conscience de cette difficulté et apporte des solutions pour mieux accompagner le développement en ruralité, qui risque par ailleurs d'être encore plus contraint avec l'application du « zéro artificialisation nette » (ZAN).

Monsieur le ministre, le Gouvernement peut-il s'engager à faire évoluer le plafonnement des subventions du Fnap et à envisager qu'une partie de la dotation d'équipement des territoires ruraux (DTER) puisse être fléchée vers ce type de projet ?

Mme le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Jean-François Carenco, ministre délégué auprès du ministre de l'intérieur et des outre-mer, chargé des outre-mer. Monsieur le sénateur Rojouan, il faut en effet concilier les exigences de la recherche scientifique, de la conservation du patrimoine et du développement économique et social, nul ne peut le nier.

Afin d'anticiper les enjeux archéologiques de leurs projets et de réduire le coût des fouilles, les communes peuvent interroger en amont les Drac pour connaître la sensibilité archéologique des terrains considérés.

Le financement des fouilles repose essentiellement sur les maîtres d'ouvrage, sur le fondement de prix établis par les opérateurs présents sur le marché. Toutefois, vous l'avez signalé, les aménageurs peuvent bénéficier d'aides financières, certes plafonnées, attribuées par le Fonds national pour l'archéologie préventive. Pour les prises en charge, les communes situées en zone de revitalisation rurale qui réalisent une zone d'aménagement concerté ou un lotissement peuvent donner mandat à l'opérateur de fouilles pour encaisser directement l'aide accordée, ce qui permet d'éviter une sortie de trésorerie.

Par ailleurs, l'impact du coût de la fouille sur l'équilibre financier du projet fait partie des critères d'éligibilité de la subvention.

En moyenne annuelle, entre 2016 et 2022, 44 % des fouilles ont reçu annuellement un soutien financier de l'État et 53 millions d'euros d'aides ont été accordés en 2022 ; c'est loin d'être négligeable.

Pour ce qui concerne plus particulièrement la situation de la communauté de communes de Lapalisse, à laquelle vous faites référence, le diagnostic a révélé une forte densité de vestiges archéologiques, dont la chronologie s'étire du second âge du fer au Moyen Âge central. Après échange avec les collectivités - voici la mesure qui va vous intéresser -, il a été convenu que l'emprise globale de la fouille serait scindée en trois phases, ce qui permettra d'échelonner l'aménagement sur cinq ans et d'accompagner d'éventuelles évolutions du projet.

Il n'y a pas de dépenses de trésorerie immédiates, mais le Gouvernement considère qu'il faut préserver les fouilles archéologiques.

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