Question de M. TABAROT Philippe (Alpes-Maritimes - Les Républicains) publiée le 01/06/2023

M. Philippe Tabarot attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur et des outre-mer sur le débordement de l'entrée illégale de migrants dans les Alpes-Maritimes et sur la réquisition par l'État d'équipements privés et publics.

La frontière franco-italienne est une passoire et le département des Alpes-Maritimes, du fait de sa situation géographique, en est la première victime. Pourtant, l'État non seulement ne respecte pas la plupart du temps ses engagements de réorientation équitable sur l'ensemble du territoire, mais il reste sourd face aux appels à l'aide répétés des élus locaux, qui dénoncent cette situation depuis plusieurs années.

Le département des Alpes-Maritimes est submergé et les structures d'accueil dédiées aux migrants sont saturées. Dans ce contexte, les maires deviennent spectateurs de la réquisition par les autorités de l'État d'établissements publics ou privés, comme les hôtels, sur leur territoire. Les exemples se multiplient avec des hôtels réquisitionnés à Antibes ou Châteauneuf-de-Grasse, ou encore un gymnase à Menton.

Ainsi, dans ce contexte pour le moins alarmant et symbole d'absence de dialogue social, il lui demande de cesser ces décisions arbitraires face aux maires qui ne sont pas de nature à renforcer la confiance entre les élus locaux et l'État.

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Réponse du Ministère auprès du ministre de l'intérieur et des outre-mer, chargé des outre-mer publiée le 07/06/2023

Réponse apportée en séance publique le 06/06/2023

Mme le président. La parole est à M. Philippe Tabarot, auteur de la question n° 730, adressée à M. le ministre de l'intérieur et des outre-mer.

M. Philippe Tabarot. Monsieur le ministre, l'immigration clandestine est incontrôlée. L'État n'arrive pas à juguler cette pression illégale.

Mon département des Alpes-Maritimes, que représente aussi la sénatrice Patricia Demas, en est tout un symbole : 40 000 migrants clandestins ont été interpellés sur toute l'année 2022 à la frontière italienne, selon le préfet.

Cette défaillance ne se limite pas seulement à une absence de contrôle, elle porte également sur l'explosion du nombre de jeunes clandestins, dits « mineurs non accompagnés » (MNA).

Le président du département, les parlementaires, les maires ne cessent de lancer un cri d'alarme face à cette accélération inquiétante.

Plus de 5 000 de ces mineurs sont entrés dans notre pays, dont 2 000 dans les seules Alpes-Maritimes. Les structures sont débordées par cette saturation qui dépasse largement la mission de protection de l'enfance, malgré des efforts importants du département de l'ordre de 20 millions d'euros. Je peux en témoigner, puisque j'ai été président du foyer de l'enfance.

Symbole supplémentaire de cette embolie, le préfet des Alpes-Maritimes ne cesse de prendre des arrêtés de réquisition à répétition d'équipements tantôt privés, comme un hôtel à Antibes, à Châteauneuf-de-Grasse ou encore à Biot, tantôt publics, comme un gymnase à Menton.

Ces réquisitions sont réalisées à marche forcée, sans aucune concertation ni aucun échange avec les maires, qui sont clairement mis devant le fait accompli.

L'État ne peut multiplier ces réquisitions et faire peser sur les maires le poids de ses propres carences sur les territoires.

Au-delà du fait qu'il devrait revenir à l'État d'assumer pleinement cet accueil, comme nous le suggérons au Sénat, quand allez-vous cesser ces réquisitions ? Les maires, spectateurs malgré eux, sont clairement débordés par ces décisions qu'on leur impose !

Mme le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Jean-François Carenco, ministre délégué auprès du ministre de l'intérieur et des outre-mer, chargé des outre-mer. Monsieur le sénateur Tabarot, la pression migratoire à la frontière franco-italienne des Alpes-Maritimes est très forte depuis plusieurs mois. Elle a été multipliée par quatre depuis le 1er janvier 2023 par rapport à la même période de 2022. Or il se trouve que Nice est à la frontière italienne.

Le dispositif de mise à l'abri géré par le conseil départemental est soumis à de très fortes tensions.

Des capacités nouvelles ont été mobilisées par le conseil départemental - plus de 700 mineurs non accompagnés sont pris en charge actuellement - grâce à des conventions passées avec les gestionnaires de structures d'accueil : hôtels, centres de vacances notamment. Je remercie le conseil départemental des Alpes-Maritimes de l'effort indéniable qu'ils consentent.

Le parquet de Nice a également mobilisé des ressources nouvelles afin d'accélérer la prise des ordonnances de placement de façon à réorienter des mineurs vers d'autres départements. En dépit de cela, le dispositif d'accueil peut être occasionnellement saturé, comme c'est aujourd'hui le cas.

C'est dans ce cadre, mais à deux reprises seulement depuis le début de l'année 2023, que le préfet des Alpes-Maritimes, à la demande du président du conseil départemental, a réquisitionné deux structures afin de permettre la prise en charge des mineurs.

Une résidence hôtelière d'Antibes a ainsi été mise à disposition pendant un mois en mars et un gymnase a été mobilisé à Menton pendant huit jours en avril.

Dans les deux cas, les maires des communes concernées ont été préalablement informés par le préfet des raisons pour lesquelles ces réquisitions avaient dû être prises, à la demande du conseil départemental. La coopération entre le conseil départemental, le préfet et les maires me semble de bon aloi. Elle fonctionne correctement.

Nous recherchons activement aujourd'hui toutes les solutions utiles à l'exercice par la collectivité départementale de la mission d'aide sociale à l'enfance que lui confère la loi, dans l'esprit d'échange et de dialogue qui prévaut déjà dans les Alpes-Maritimes.

Mme le président. La parole est à M. Philippe Tabarot, pour la réplique.

M. Philippe Tabarot. Monsieur le ministre, la situation est bien plus préoccupante que vous ne l'admettez. Les maires sont beaucoup plus sollicités que vous ne voulez bien le reconnaître. Vous devez cesser cette politique migratoire, faite surtout par procuration sur le dos des maires.

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