Question de Mme NOËL Sylviane (Haute-Savoie - Les Républicains) publiée le 29/06/2023

Mme Sylviane Noël attire l'attention de M. le ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé de la ville et du logement, sur la nécessité d'offrir des outils plus performants aux acteurs locaux pour répondre à la crise du logement.

Le 5 juin 2023, la Première ministre a annoncé un certain nombre de mesures visant à lutter contre la crise du logement que connaît notre pays. Si certaines des idées évoquées vont dans le bon sens, elles ne suffiront pas aux acteurs locaux pour faire face à forte pression foncière que connaissent nos territoires.

Comme l'a souligné la Première ministre dans son intervention, de nombreuses collectivités n'atteignent pas les objectifs qu'elles s'étaient fixés en matière d'urbanisme.
Toutefois, cet état de fait n'est pas dû à une mauvaise volonté des acteurs locaux, mais bien à un manque d'incitations à la construction. Pour que les collectivités puissent investir dans de nouveaux logements, il faut que l'État leur donne les moyens de le faire.

Or, depuis maintenant dix ans, les aides à la construction n'ont cessé d'être revues à la baisse, à l'image des aides à la construction d'habitations à loyer modéré (HLM). La suppression de la taxe d'habitation, qui représentait une incitation forte à la construction pour les élus locaux par les revenus importants qu'elle générait, va également dans ce sens.
Ce manque de ressources s'accompagne paradoxalement d'importantes contraintes pour nos collectivités, qui entravent leurs marges de manoeuvre. Par exemple, la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains impose à de nombreuses communes de disposer d'au moins un quart de logements sociaux, alors que la construction dans ce secteur est de moins en moins soutenue par l'État.

La Haute-Savoie est en première ligne de la crise du logement. Entre 2014 et 2022, le département a vu sa population gonfler de 52 000 personnes, et la dynamique démographique reste à la hausse, avec en moyenne 10 000 nouveaux arrivants par an. En raison notamment des contraintes grandissantes et d'un manque de ressources, le nombre de permis de construire accordés a diminué de 30 % en un an en Haute-Savoie.

Pourtant, la construction doit à tout prix reprendre, le département ayant aujourd'hui besoin de 40 000 logements supplémentaires pour faire face à la demande. Les prix de l'immobilier explosent, détruisant les rêves de propriété de plus en plus de ménages. Ainsi, le resserrement du spectre du prêt à taux zéro aux logements collectifs et neufs dans les zones tendues annoncé par la Première ministre va contribuer à exclure les plus précaires de l'accès à la propriété.

Nos collectivités ont besoin de davantage de ressources et d'un échelonnement dans le temps des contraintes, afin de disposer de plus grandes marges de manoeuvre pour piloter l'urbanisme et la construction à leur échelle. L'assouplissement du volet zéro artificialisation nette de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets ne suffira pas s'il n'est pas accompagné d'une politique volontariste de l'État pour accompagner les acteurs locaux face à la crise du logement.

Aussi souhaite-t-elle connaître les intentions du Gouvernement quant aux mesures envisagées afin d'offrir aux collectivités territoriales les outils nécessaires pour répondre au mieux aux besoins locaux en logements, sans pour autant sacrifier les ambitions environnementales portées à différentes échelles.

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Transmise au Ministère auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé du logement


Réponse du Ministère auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé du logement publiée le 26/10/2023

Face à une crise multifactorielle, le Gouvernement propose une réponse multifactorielle, car il n'existe pas de mesure miracle de court terme quand une industrie cyclique est soumise à une multiplication par 3 des taux d'intérêt. La priorité structurelle du Gouvernement est de refondre les règles de la politique du logement pour éviter la reproduction de la crise, en donnant des outils et des responsabilités aux collectivités locales par une réforme de décentralisation, car elles connaissent les besoins et les contraintes mieux que l'Etat central. Et, dans l'intervalle, le Gouvernement agit pour offrir le cadre d'une relance des parcours résidentiels des Français. Pour les Français qui travaillent, pour les jeunes, le Gouvernement souhaite développer le logement locatif intermédiaire, qui donne accès à des logements à loyers décotés proches des transports dans les villes grandes ou moyennes. 16 000 ont été produits en 2022, et le Gouvernement créera de nouveaux outils pour accroître ce développement, en loi de finances ou par le reclassement flash de 209 communes au titre du zonage ABC le 2 octobre 2023. Pour les Français qui souhaitent s'ancrer dans un territoire, dans un projet familial, qui commencent une retraite, le Gouvernement souhaite maintenir le prêt à taux zéro pour le neuf dans les zones tendues et l'ancien en zones détendues, dans lesquelles la résorption de la vacance est une priorité. Le Gouvernement travaille aussi à faciliter l'accès au crédit : il y a encore aujourd'hui 70 000 crédits attribués par mois, c'est plus que dans beaucoup d'autres pays européens, grâce à un système robuste, et le Gouvernement continue à travailler avec les banques pour maintenir cette dynamique. Et, pour les Français qui ont besoin d'un logement à un loyer abordable, avec un taux d'effort adapté à leurs ressources, le Gouvernement augmente la capacité d'investissement des bailleurs sociaux en signant avec l'ensemble du Mouvement HLM un document d'engagements qui a été unanimement salué. Cet accord prévoit 1,2 Md€ sur 3 ans pour rénover près de 400 000 logements sociaux. Il prévoit aussi 650 M€ de bonifications d'intérêt pour 8 Md€ de prêts : après la limitation du taux du livret A à 3 %, qui évite une charge de 1,4 Md€ pour les bailleurs sociaux, c'est près de 650 M€ par an qui seront redonnés aux bailleurs qui investissent dans la rénovation ou dans la production. La reconquête des friches urbaines constituant également un enjeu majeur d'aménagement durable des territoires, le fonds Friches sera pérennisé de manière pluriannuelle au sein du Fonds vert afin d'accompagner les collectivités locales en finançant des opérations de recyclage de friches et la transformation de foncier déjà artificialisé, notamment pour produire du logement. Il convient également de favoriser la relance de la construction en levant les freins à la délivrance des autorisations d'urbanisme en zone tendue, mais aussi de fluidifier les différentes étapes du parcours résidentiel, que ce soit au niveau de la location (développement du logement intermédiaire, doublement des bénéficiaires de la garantie Visale) ou de l'acquisition (prolongation et transformation du prêt à taux zéro et développement du bail réel solidaire). Le Gouvernement est conscient de l'ampleur de la crise, de sa complexité, et du besoin de redonner de la confiance au secteur et surtout aux Français : face à la multiplicité des attentes, il choisit résolument la multiplicité des réponses et la confiance aux collectivités locales.

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