Question de M. DECOOL Jean-Pierre (Nord - Les Indépendants-A) publiée le 29/06/2023

M. Jean-Pierre Decool attire l'attention de Mme la secrétaire d'État auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée de l'écologie, sur la valorisation des sédiments issus de dragage de canaux. Le Nord compte 680 km de voies d'eau, 90 écluses et plus de 100 ouvrages de régulation des niveaux d'eau. Les sédiments, essentiellement non dangereux, qui résultent du ruissellement des territoires avoisinants, s'y accumulent inévitablement !
Dans le droit communautaire, les sédiments sont des déchets. Cela implique mécaniquement une procédure couteuse de traitement. L'entretien des voies d'eaux est donc empêché et l'excès de sédiments dans les canaux génère régulièrement des entraves à la navigation, à l'écoulement fluide de l'eau et produit un gisement « passif » conséquent de sédiments pour l'ensemble du réseau.
Dans le Nord, la gestion des eaux est primordiale pour contribuer efficacement à la lutte contre les inondations. En effet, des canaux, rivières et bassins entretenus seraient plus à même d'accueillir des crues liées à de fortes précipitations.
Les pistes d'évolutions semblent donc venir, dans un premier temps, des méthodes de retraitement qui permettraient de respecter les conditions fixées par le droit de l'Union européenne et, dans un second temps, du cadre réglementaire qui permettrait, très concrètement, de consacrer ces techniques en encadrant les réemplois qu'elles permettent dans des domaines précis, à l'instar de l'arrêté du 4 juin 2021 fixant les critères de sortie du statut de déchet pour les terres excavées et sédiments ayant fait l'objet d'une préparation en vue d'une utilisation en génie civil ou en aménagement.
La France accuse du retard dans la définition d'un cadre réglementaire national favorable à la valorisation des sédiments, qui a favorisé le développement de filières dans les pays voisins, au détriment de notre économie.
Ainsi souhaiterait-il l'interroger, d'une part, sur le périmètre de l'arrêté du 4 juin 2021 et, d'autre part, sur la possibilité de recenser les techniques permettant de valoriser les boues de dragage afin d'étendre ce périmètre à d'autres réutilisations, notamment agricole eu égard aux atouts fertilisants de certains sédiments.

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Réponse du Ministère auprès du ministre de l'intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé des collectivités territoriales et de la ruralité publiée le 05/07/2023

Réponse apportée en séance publique le 04/07/2023

Mme le président. La parole est à M. Jean-Pierre Decool, auteur de la question n° 776, adressée à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée de l'écologie.

M. Jean-Pierre Decool. Le Nord compte 680 kilomètres de voies d'eau, 90 écluses et plus de 100 ouvrages de régulation des niveaux d'eau. Les sédiments, essentiellement non dangereux, s'y accumulent inévitablement.

Le droit communautaire considère les sédiments comme des déchets. Cela implique mécaniquement une procédure coûteuse de traitement. L'entretien des voies d'eau est donc empêché, tandis que l'excès de sédiments dans les canaux génère régulièrement des entraves à la navigation, mais pas seulement.

Dans les Hauts-de-France, la gestion des eaux est primordiale pour contribuer efficacement à la lutte contre les inondations. En effet, des canaux, rivières et bassins entretenus seraient plus à même d'accueillir des crues liées à de fortes précipitations. Des canaux non navigués, régulièrement curés, pourraient agir comme des bassins de rétention et de régulation.

La France accuse du retard dans la définition d'un cadre réglementaire national de valorisation des sédiments, ce qui a favorisé le développement de filières de valorisation dans les pays voisins, au détriment de notre économie.

J'ai eu l'occasion d'évoquer cette problématique dans cet hémicycle à la suite des fortes inondations que le Nord a connues en décembre 2021 et lors d'un retour d'expérience placé sous l'autorité du préfet et organisé avec les acteurs de terrain, notamment avec Voies navigables de France (VNF), le vendredi 17 décembre 2021.

Je tiens par ailleurs à saluer l'expérimentation, menée par VNF à Wambrechies, d'une plateforme de dépotage susceptible de prendre en charge d'importantes quantités de sédiments, et ainsi, de répondre aux besoins liés au projet de canal Seine-Nord.

Madame la ministre, il serait inconcevable de voir ces sédiments finir sur des sites de dépôt avant d'être exportés vers la Belgique et les Pays-Bas, où l'on peut plus facilement les réutiliser.

Ne serait-il pas possible d'étendre le périmètre de l'arrêté du 4 juin 2021, afin de permettre la réutilisation des sédiments en tant que matériau de construction ou pour un usage agricole, eu égard aux propriétés fertilisantes de certains sédiments ?

Mme le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Dominique Faure, ministre déléguée auprès du ministre de l'intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité. Monsieur le sénateur, chaque année, dans notre pays, l'entretien des voies de navigation et des ports génère 50 millions de mètres cubes de sédiments. En parallèle, le secteur du BTP consomme en France 400 millions de tonnes par an de granulats extraits du sol.

Le 25 janvier dernier, ma collègue Bérangère Couillard, secrétaire d'État chargée de l'écologie, a engagé une feuille de route avec les acteurs économiques de la région des Hauts-de-France et VNF pour enclencher une dynamique d'économie circulaire vertueuse en matière de valorisation de ces sédiments.

Cette feuille de route est le résultat de travaux expérimentaux menés dans la région pionnière des Hauts-de-France avec le concours des acteurs économiques du BTP et de l'École nationale supérieure des techniques industrielles et des mines de Douai et avec l'accompagnement de la région ainsi que du ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires.

Grâce à cette démarche d'économie circulaire territoriale, les sédiments pourront être recyclés dans le béton et d'autres produits du BTP. À l'échelle de la région des Hauts-de-France, quelque 300 000 tonnes de sédiments par an pourront ainsi être recyclées au lieu d'être mises en décharge, ce qui permettra de dégager des gains d'un montant de 15 millions d'euros par an et de créer 400 emplois.

D'autres voies de valorisation des sédiments sont envisageables, notamment leur utilisation comme fertilisants et supports de culture, sous réserve qu'ils ne soient pas pollués.

Le ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire parachève un décret d'application de la loi du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire qui établira prochainement un socle commun de critères pour les matières fertilisantes et les supports de culture.

Vous le voyez, monsieur le sénateur, le Gouvernement est au travail sur ce sujet.

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